« L’Algérie a adopté plusieurs stratégies pour réaliser la sécurité alimentaire »
Face aux défis du changement climatique qui menacent la sécurité alimentaire mondiale, l’Algérie joue la carte de l’audace technologique et de l’expansion saharienne. Lundi, lors du 2e Bilan du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires à Addis-Abeba, le président Abdelmadjid Tebboune a dévoilé une stratégie révolutionnaire qui transforme les contraintes géographiques du pays en opportunités de développement. Son allocution, lue par le ministre du Commerce extérieur Kamel Rezig, dessine les contours d’une Algérie résolument tournée vers l’autosuffisance alimentaire. « L’Algérie a adopté plusieurs stratégies et politiques visant à réaliser la sécurité alimentaire et l’autosuffisance en produits agricoles et d’origine animale, en tenant compte des dimensions climatique, sanitaire et économique, pour atteindre des systèmes alimentaires résilients, inclusifs, sains et durables », a déclaré le chef de l’État. L’élément le plus spectaculaire de cette stratégie réside dans la conquête agricole du Sahara. Le président Tebboune a révélé que l’Algérie consacre désormais « 400.000 hectares de terres agricoles » à l’agriculture saharienne, « avec pour objectif d’atteindre un million d’hectares en 2025, ce qui constitue un exploit inédit pour faire face aux difficultés environnementales et relancer la vie dans un environnement rude ». Cette expansion représente un défi technique considérable qui positionne l’Algérie comme pionnière de l’agriculture en milieu aride. Pour soutenir cette ambition, le pays déploie une infrastructure logistique impressionnante. Trente silos de stockage d’une capacité de 100.000 tonnes chacun sont en cours de réalisation, complétés par 350 centres de stockage de proximité de 5.000 tonnes. Cette capacité de stockage renforcée s’accompagne d’un développement massif des systèmes de réfrigération, avec la construction de chambres froides de petite et moyenne taille sur l’ensemble du territoire national.
La stratégie hydrique constitue l’autre pilier de cette transformation. « L’Algérie a adopté une stratégie ambitieuse reposant sur trois axes », a expliqué le président de la République, évoquant « la réalisation de grands transferts d’eau à partir des régions enregistrant un excédant dans les réserves d’eau pluviale vers les régions en déficit, l’augmentation de la capacité de stockage avec la construction de barrages et la mobilisation des ressources en eau non conventionnelles à travers le dessalement de l’eau de mer ». L’année 2025 marque une étape cruciale avec la mise en service de cinq grandes stations de dessalement d’une capacité totale de 1,5 million de mètres cubes par jour.
L’approche algérienne se distingue par son caractère participatif et inclusif. « Une approche participative a été adoptée, associant différents acteurs nationaux et représentants d’organisations non gouvernementales et du mouvement associatif, en particulier les organisations professionnelles, ainsi que des chercheurs et des universitaires, en accordant une importance particulière aux femmes et aux jeunes », a souligné Tebboune. Le volet environnemental n’est pas en reste avec l’extension du projet de barrage vert, qui prévoit « une extension de 300.000 hectares et la réhabilitation et le développement de 500.000 hectares ». Ce projet forestier ambitieux vise à créer « des puits de carbone naturels sur environ 520.000 hectares » avec la plantation de 423 millions de plants, dont 300 millions dédiés au boisement et reboisement.
Sur le plan du financement, l’État multiplie les facilités d’accès au crédit via l’Agence nationale d’appui et de développement de l’entrepreneuriat et l’Agence nationale de gestion du microcrédit. Parallèlement, des partenariats stratégiques avec des entreprises italiennes et qataries se concrétisent dans les filières céréalières et laitières, témoignant de l’ouverture internationale de la stratégie algérienne. Cette transformation s’inscrit dans une vision continentale. Le président a réaffirmé « l’engagement de l’Algérie en faveur du développement durable en Afrique », rappelant l’achèvement du tronçon algérien de la route transsaharienne reliant Alger à Lagos et l’ouverture de lignes maritimes avec la Mauritanie et le Sénégal. Ces infrastructures contribueront au « renforcement des chaînes d’approvisionnement indispensables à la concrétisation de systèmes alimentaires durables ».
L’Algérie illustre déjà cette coopération régionale par son soutien aux pays voisins lors de l’invasion du criquet pèlerin, « à travers le soutien apporté par l’Algérie aux pays limitrophes en matériels et en pesticides ». En conclusion, le président a lancé un appel aux investisseurs internationaux, les invitant à « investir en Algérie, qui offre actuellement des conditions favorables et compétitives permettant de réaliser des investissements avantageux ». Cette ouverture économique accompagne une stratégie de transformation qui fait de l’Algérie un laboratoire d’innovation agricole face aux défis climatiques du XXIe siècle.
Samir Benisid