Valorisation de phosphate de Bir El-Ater : Un accord stratégique algéro-pakistanais
Un accord minier stratégique a été signé mercredi entre l’Algérie et le Pakistan dans le domaine du développement de la production du phosphate. Un accord qui entre dans le cadre de la stratégie de développement des engrais phosphatés
Un mémorandum d’entente a été signé entre le groupe industriel minier « Sonarem », représenté par sa filiale « Somiphos », et la société « Fatima Fertilizers », filiale du groupe pakistanais Fatima. Cette alliance stratégique, paraphée sous la supervision du ministre d’État, ministre de l’Énergie, des Mines et des Énergies renouvelables, Mohamed Arkab, s’inscrit dans une démarche ambitieuse visant à « renforcer le partenariat bilatéral dans les domaines des industries minières et de la production des engrais tous types confondus ». La cérémonie, qui s’est déroulée au siège du ministère en présence du secrétaire d’État Noureddine Yassaâ, du PDG de Sonarem Belkacem Soltani, du PDG de Somiphos Lekhal Mokhtar et du directeur exécutif des opérations de « Grand Exploration and Mining Company » Mukhtar Abbas, marque un tournant dans la valorisation des ressources minières nationales. Cet accord traduit la volonté des autorités algériennes de transformer le potentiel minier national en véritable levier de développement économique, particulièrement dans le secteur stratégique des engrais phosphatés où l’Algérie dispose d’avantages comparatifs considérables.
Le mémorandum d’entente vise à « établir un cadre pour une coopération fructueuse entre les deux parties en matière de commercialisation du phosphate extrait du gisement Bir El Ater lors de sa première phase », ouvrant la voie à une collaboration approfondie dans la chaîne de valeur du phosphate. L’accord prévoit la mise en place de « dispositions contractuelles portant sur l’enrichissement de cette matière vitale et sa transformation ultérieure au niveau local », s’inscrivant pleinement dans la stratégie de développement d’une industrie des engrais phosphatés intégrée. Cette approche s’avère d’autant plus pertinente que les réserves du gisement de Bir El Ater « excèdent les 850 millions de tonnes », positionnant l’Algérie parmi les détenteurs majeurs de phosphate au niveau mondial. La transformation locale de ces ressources constitue un enjeu capital pour la création de valeur ajoutée et le renforcement de la compétitivité de l’économie nationale.
L’accord ambitionne également d’explorer « les opportunités de partenariat et d’investissement dans des projets industriels destinés aux marchés algériens et pakistanais ainsi qu’à d’autres marchés internationaux », témoignant d’une vision stratégique dépassant le cadre bilatéral. Cette dimension internationale revêt une importance particulière dans un contexte de volatilité des marchés des matières premières et de recherche de diversification des débouchés. Le partenariat prévoit « l’examen de la possibilité de réaliser des projets reposant sur la valorisation des ressources minières et la création de la valeur ajoutée à travers la fabrication locale », s’accompagnant d’un « échange des expertises techniques entre les deux sociétés ». Cette approche collaborative permet à l’Algérie de bénéficier du savoir-faire technologique avancé du groupe Fatima, reconnu pour son expertise dans la transformation des matières premières et le développement des industries de transformation.
La signature de cet accord s’inscrit dans le cadre plus large des « efforts de promotion de l’investissement dans le secteur minier et de renforcement des partenariats de qualité avec des partenaires asiatiques », reflétant l’orientation stratégique de l’Algérie vers une diversification géographique de ses partenariats économiques. Les pays asiatiques sont « reconnus pour leur expertises industrielles et technologiques avancées dans les domaines de la transformation des matières premières et du développement des industries de transformation », offrant à l’Algérie des opportunités de transfert technologique et de montée en gamme industrielle. Le choix du groupe pakistanais Fatima comme partenaire stratégique n’est pas fortuit. Ce conglomérat industriel figure « parmi les plus grands conglomérats industriels au Pakistan, opérant dans plusieurs domaines tels que les engrais, l’industrie chimique, l’énergie, le textile et l’agriculture ». Sa filiale « Fatima Fertilizer Company Limited », qualifiée de « leader dans la production d’engrais au Pakistan », s’est diversifiée dans le secteur minier « à travers des projets stratégiques dans la province du Baloutchistan, notamment dans les domaines de l’exploitation et de la transformation du phosphate, du cuivre, de l’or et du fer ». Cette expertise multisectorielle offre à l’Algérie des perspectives de coopération étendues, dépassant le seul segment des engrais phosphatés pour englober d’autres filières minières stratégiques.
Les deux parties ont exprimé « leur volonté de développer un partenariat stratégique basé sur l’intégration économique et l’exploitation des ressources minières disponibles », dans le contexte des « efforts des deux pays pour renforcer la sécurité alimentaire et développer les industries de transformation basées sur les ressources naturelles ». L’accord survient dans un contexte favorable à la stratégie algérienne de développement des engrais phosphatés, illustrée par plusieurs projets d’envergure visant à faire de l’Algérie un acteur majeur sur le marché mondial des fertilisants. Le projet de phosphate intégré de Bled El Hadba à Tébessa, lancé récemment, constitue un exemple emblématique de cette ambition industrielle avec un objectif de production de 10,5 millions de tonnes de phosphate brut par an et la transformation de 1,2 milliard de mètres cubes de gaz naturel pour produire près de 6 millions de tonnes d’engrais annuellement. L’Algérie, qui exporte déjà 7 millions de tonnes d’engrais manufacturées et de produits semi-finis, incluant 3 millions de tonnes d’urée, 2 millions de tonnes de phosphate traité et 2 millions de tonnes d’ammoniac, dispose d’atouts considérables avec ses réserves de phosphate qui la positionnent au Top 10 des pays possédant les plus grandes réserves mondiales avec un potentiel de 1,2 milliard de tonnes, confirmant son statut d’acteur incontournable du marché international des engrais phosphatés.
Samira Ghrib