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Technologie disruptive y compris dans le domaine religieux : Un appel à réguler l’IA

L’intelligence artificielle révolutionne jusqu’aux domaines les plus sacrés. Au Caire, lors de la 10e Conférence mondiale sur la fatwa, le ministre des Affaires religieuses Youcef Belmehdi a lancé un appel urgent à la régulation de cette technologie disruptive qui transforme radicalement l’orientation religieuse et l’émission des fatwas islamiques.

Face à plus de 70 délégations internationales réunies sous le thème « Former un mufti éclairé à l’ère de l’intelligence artificielle », le ministre algérien a exposé les enjeux cruciaux de cette révolution technologique qui touche désormais le cœur de la spiritualité musulmane. « Cette révolution permet d’optimiser le travail des muftis et d’accélérer l’accès à l’information, non sans soulever des défis éthiques auxquels il importe de répondre par la régulation », a-t-il déclaré, posant ainsi les bases d’un débat fondamental sur l’avenir de l’autorité religieuse. L’émergence d’applications d’intelligence artificielle capables de générer des réponses religieuses automatisées soulève des questions inédites sur l’authenticité et la légitimité du conseil spirituel. Ces outils technologiques, alimentés par d’immenses bases de données théologiques, promettent une accessibilité instantanée aux textes sacrés et aux interprétations jurisprudentielles, mais menacent simultanément l’essence même de la guidance spirituelle humaine. « Malgré son énorme potentiel, l’IA ne saurait se substituer au mufti, qui, lui, possède les outils de l’ijtihad, saisit les finalités de la charia et tient compte des complexités de la réalité humaine », a affirmé Belmehdi, traçant une ligne de démarcation claire entre capacités technologiques et sagesse spirituelle. Le défi dépasse la simple question technique pour toucher aux fondements de l’autorité religieuse contemporaine. « De nos jours, le mufti éclairé est celui qui, armé de savoir et de piété, sait allier authenticité et modernité, tout en étant conscient des mutations socioculturelles et des avancées technologiques », a souligné le ministre.

Cette transformation impose l’établissement d’un cadre réglementaire inédit. Belmehdi a appelé à « la mise en place de normes charaïques et éthiques pour réguler l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le domaine de la fatwa », insistant sur « l’encadrement scientifique continu par des oulémas, la garantie de la transparence, le respect de la diversité jurisprudentielle et la conscientisation de la société à la nécessité de se référer à des savants fiables ».

Paradoxalement, le ministre reconnaît que « le mufti doit pouvoir recourir à des systèmes de génération automatique de fatwas », admettant l’intégration inévitable de ces technologies dans la pratique religieuse contemporaine. Cette apparente contradiction illustre la complexité du défi posé par l’IA aux institutions religieuses traditionnelles.

L’urgence de cette problématique nécessite une coopération internationale sans précédent. Le ministre a jugé « nécessaire d’établir des échanges institutionnels en la matière à l’échelle internationale, à travers la création de plateformes de coopération et l’échange d’expériences dans le domaine de la fatwa, notamment en ligne ».

Cette conférence, rassemblant oulémas, muftis et ministres du monde entier, symbolise l’ampleur du défi civilisationnel que représente l’intelligence artificielle pour les traditions religieuses millénaires, questionnant l’équilibre délicat entre innovation technologique et préservation de l’authenticité spirituelle.

Salim Amokrane

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