La loi sur le tribunal des conflits promulguée : Moderniser la justice administrative
La nouvelle loi organique sur le tribunal des conflits vient d’être promulguée et publiée dans la dernière livraison du Journal officiel. Le président Abdelmadjid Tebboune a promulgué le 3 août 2025 la loi organique n° 25-13 qui modifie et complète substantiellement la loi de 1998 régissant le tribunal des conflits. Cette réforme, adoptée par le Parlement après avis du Conseil d’État et validation de la Cour constitutionnelle, modernise une institution clé du système judiciaire algérien. Constitué de neuf magistrats, la composition de l’instance maintient un équilibre parfait entre les deux ordres de juridiction : moitié issue de la Cour suprême, moitié du Conseil d’État, sous la présidence d’un magistrat nommé par alternance entre ces deux institution pour un mandat de cinq années. Le président de la République nomme tous les membres sur proposition du président du bureau permanent du Conseil supérieur de la magistrature, après avis conforme de ce dernier. Pour les magistrats du Conseil d’État, une consultation préalable du président de cette institution est obligatoire. La loi intègre la révolution numérique en autorisant la saisine par voie électronique, parallèlement aux requêtes écrites traditionnelles. Cette modernisation s’inscrit dans la dynamique de digitalisation de la justice algérienne amorcée par la loi de 2015 sur la signature électronique.
Les procédures de renvoi sont clarifiées et accélérées. Lorsqu’un juge constate un risque de contrariété de décisions entre les deux ordres de juridiction, il doit obligatoirement renvoyer l’affaire au tribunal des conflits. Le greffier dispose d’un mois pour transmettre l’ensemble du dossier, créant un mécanisme de prévention des conflits jurisprudentiels. La réforme valorise le rôle du commissaire d’État, véritable ministère public du tribunal des conflits. Nommé pour cinq ans par alternance entre les deux ordres de juridiction, il bénéficie désormais d’un adjoint et voit ses prérogatives étoffées.
Le nouveau texte impose au commissaire d’État la rédaction d’un rapport écrit dans le mois suivant la communication du rapport du conseiller rapporteur. Ce document doit exposer les faits, analyser la procédure et formuler des propositions de solution avec des demandes précises. La présentation orale de ses observations lors de l’audience publique complète ce dispositif renforcé.
Cette réforme s’inscrit dans une modernisation globale du système judiciaire algérien. En clarifiant les compétences et en accélérant les procédures, elle répond aux exigences d’efficacité de la justice moderne. Le tribunal des conflits, institution méconnue mais cruciale, gagne en visibilité et en légitimité.
L’obligation pour les requérants de préciser le conflit de compétence soumis permet une meilleure délimitation des questions et facilite leur règlement. Cette exigence de clarification évite les saisines abusives et oriente le tribunal vers sa mission première : la régulation des compétences juridictionnelles.
Les décisions du tribunal conservent leur autorité absolue, s’imposant à tous les magistrats des deux ordres sans possibilité de recours, hormis les demandes d’interprétation ou de rectification d’erreur matérielle. Cette intangibilité garantit la sécurité juridique et évite la multiplication des instances.
Hocine Fadheli