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Pour manquements déontologiques : L’ANIRA suspend quatre chaînes de télévision 

L’Autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel (ANIRA) a pris une décision ferme en suspendant quatre établissements exploitant des services de communication audiovisuelle suite à leur couverture controversée de l’accident tragique d’Oued El-Harrach. La suspension concerne El Bilad TV, El Wataniya TV, El Hayat TV et Echourouk TV, effective depuis 22h30 samedi soir pour une durée de 48 heures consécutives. Cette mesure s’applique « aussi bien à la diffusion satellitaire que la diffusion numérique en direct, avec interdiction de télécharger ou de republier tout nouveau contenu sur les plateformes numériques durant la période de suspension ». L’Autorité a également exigé « l’obligation du retrait immédiat de tous les contenus en infraction des sites, plateformes sociales et canaux numériques affiliés », démontrant sa volonté de contrôler strictement le respect des règles déontologiques sur tous les supports. Les manquements constatés sont particulièrement graves. L’ANIRA a identifié « de graves manquements professionnels, consistant notamment à interroger des blessés dans les services d’urgences et de réanimation, à poursuivre les familles des victimes dans leurs moments de choc, à diffuser des images et sons choquants sans avertissement préalable ». Plus préoccupant encore, l’Autorité dénonce la « recherche d’une maximisation des indicateurs d’interaction sur les réseaux sociaux au détriment de la dignité et de la vie privée du citoyen ». Cette critique souligne une dérive moderne du journalisme où l’audience prime sur l’éthique professionnelle. Dans son premier communiqué, l’ANIRA avait déjà exprimé son « rejet catégorique des pratiques de certaines chaînes de télévision » qui « sont allés jusqu’à interroger des blessés dans les salles de réanimation et à poursuivre les familles des victimes dans leurs moments de détresse et de pleurs, transformant ainsi la tragédie en matière à sensation ». La décision s’appuie sur « les dispositions de la loi 23-20 relative à l’activité audiovisuelle, ainsi que du décret exécutif 24-250 fixant les dispositions du cahier des charges applicable aux services de communication audiovisuelle ». Ces textes « interdisent toute atteinte à la dignité des personnes et à leur vie privée, ainsi que toute exploitation de la souffrance humaine ».

L’ANIRA rappelle que ces réglementations « imposent de prendre des mesures de précaution lors de la diffusion de scènes choquantes », ce qui n’a manifestement pas été respecté par les chaînes sanctionnées.

L’Autorité appelle l’ensemble des rédactions « à concentrer leurs efforts sur les reportages de terrain et les enquêtes journalistiques approfondies sur les circonstances de l’accident, à vérifier minutieusement les informations, à protéger les personnes éprouvées et à respecter les espaces médicaux ». Elle insiste sur le fait que « la liberté de la presse est une responsabilité » et annonce qu’elle « sera intransigeante avec toute violation portant atteinte à la dignité du citoyen et à la réputation de la profession ». Concernant les appels à l’élaboration d’une charte nationale de déontologie professionnelle, l’ANIRA précise que « l’élaboration, l’adoption et le suivi du respect de toute charte nationale de déontologie de la presse, relèvent des mécanismes et instances légalement compétentes ». Elle considère que « l’appel à une charte nationale en dehors de ces cadres constitue un dépassement de prérogatives », tout en restant « ouverte à toute initiative légalement fondée et contribuant à la promotion de la déontologie professionnelle ».

Salim Amokrane

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