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La capitalisation boursière a été multipliée par plus de 7 fois : Une transformation profonde de la Bourse d’Alger

La Commission d’organisation et de surveillance des opérations de bourse (COSOB) a présenté dimanche son rapport annuel 2024, dressant le bilan d’une année exceptionnelle pour le marché financier algérien. La capitalisation boursière a bondi de 71 à 521 milliards de dinars, portée par l’introduction en bourse du Crédit Populaire d’Algérie qui a mobilisé plus de 42.000 investisseurs, tandis que les réformes réglementaires et la digitalisation ont posé les bases d’un marché modernisé et transparent.

L’année 2024 restera dans les annales du marché financier algérien. Les chiffres parlent d’eux-mêmes et témoignent d’un changement d’échelle radical pour un marché longtemps considéré comme embryonnaire et peu dynamique. La multiplication par sept de la capitalisation boursière en une seule année constitue une performance inédite qui bouleverse les perspectives de financement de l’économie nationale par le marché des capitaux. Cette métamorphose s’explique principalement par l’entrée en scène du Crédit Populaire d’Algérie, première banque publique à franchir le pas de la cotation. L’opération a permis de lever 112 milliards de dinars auprès d’un public d’investisseurs remarquablement élargi, dépassant les 42.000 souscripteurs. Ce succès démontre l’existence d’une épargne nationale disponible et en quête de placements, mais aussi la capacité du marché à absorber des opérations de grande envergure lorsque les conditions de confiance et de transparence sont réunies. Au-delà de cette introduction phare, l’ensemble de l’activité boursière a connu une accélération spectaculaire. La valeur des transactions a progressé de plus de 440 % pour atteindre 2,76 milliards de dinars, tandis que le volume des échanges s’est accru de 35 % avec près de 1,3 million de titres échangés sur l’année. Ces indicateurs reflètent un regain de confiance des investisseurs et une liquidité retrouvée après des années de léthargie. La place boursière d’Alger compte désormais huit titres cotés, incluant des acteurs majeurs comme Alliance Assurances, Biopharm, El Aurassi, Saidal, le CPA, la Banque de développement local, la PME AOM Invest ainsi que la startup Moustachir. Cette diversification sectorielle commence à dessiner les contours d’un marché plus mature et plus représentatif du tissu économique national.

Des rendements attractifs pour les actionnaires

Les performances réalisées par les sociétés cotées ont également contribué à raviver l’intérêt pour la Bourse. Selon les données compilées par la COSOB, cinq sociétés sur six inscrites au compartiment principal ont distribué des dividendes généreux à leurs actionnaires, avec des taux de rendement s’échelonnant entre 5,55 et 8,33 %. Alliance Assurances se distingue avec le rendement le plus élevé à 8,33 %, soit 35 dinars de dividende par action, en hausse de 17 % par rapport à l’année précédente. Le cours de l’action s’établissait à 420 dinars fin décembre. Biopharm, nouvellement introduite en mars 2024, a récompensé ses actionnaires avec un rendement de 6,81 % et un dividende de 160 dinars par action, le cours atteignant 2.250 dinars en fin d’année. Le laboratoire pharmaceutique Saidal a offert un rendement de 6,1 % avec 21 dinars par action, tandis que le CPA a distribué 125 dinars par action pour un rendement de 5,56 %. La BDL complète ce palmarès avec 77 dinars de dividende par action et un taux de rendement de 5,55 %. Seul l’hôtel El Aurassi n’a pas versé de dividende à ses actionnaires. Ces performances contrastent nettement avec celles du compartiment de croissance, segment destiné aux entreprises de plus petite taille qui ne représente que 0,22 % de la valeur totale transigée. La startup Moustachir a affiché un rendement de 1,05 % avec 8 dinars de dividende, tandis qu’AOM Invest a distribué 2,18 dinars par action pour un rendement de 0,75 %. Ces écarts illustrent la différence de maturité entre les grandes entreprises établies et les jeunes pousses en phase de développement.

Un cadre réglementaire renforcé et une digitalisation accélérée

L’essor du marché boursier en 2024 ne s’explique pas uniquement par des facteurs conjoncturels. Il s’inscrit dans une stratégie globale de modernisation portée par des réformes structurantes. La COSOB a adopté deux règlements majeurs qui refondent l’architecture du marché financier. Le premier, promulgué le 17 juillet 2024, concerne la prévention et la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive. Ce texte aligne le dispositif algérien sur les standards internationaux et renforce la crédibilité du marché aux yeux des investisseurs institutionnels. Le second règlement, adopté le 23 octobre 2024, crée les Organismes de Placement Collectif à Capital Risque. Ces véhicules d’investissement innovants sont destinés à financer les startups, les PME et les projets innovants, comblant ainsi un vide dans l’écosystème de financement de l’économie de la connaissance. Ces avancées s’inscrivent dans la continuité du règlement général de la Bourse adopté en 2023, qui avait déjà redéfini les règles de fonctionnement et élargi l’accès au marché. La transformation n’est pas seulement réglementaire, elle est aussi technologique. L’année 2024 a vu la création du Guichet Unique du Marché Financier, structure fédérant l’ensemble des acteurs et visant à simplifier les démarches des entreprises candidates à la cotation. Ce dispositif offre un accompagnement intégré et personnalisé, levant ainsi l’un des principaux obstacles à l’élargissement de la cote. Parallèlement, le lancement du Portail Electronique du Marché Financier permet désormais le dépôt et le suivi en ligne des demandes d’agrément et d’introduction en bourse, accélérant considérablement les procédures. Le dynamisme du marché se reflète également dans l’activité des sociétés de capital-investissement. Les cinq structures agréées ont réalisé treize prises de participation en 2024, irriguant le tissu économique en fonds propres. El-Djazair Istithmar, contrôlée par la BADR et la CNEP-Banque, gère désormais un portefeuille de 22 participations pour 1,83 milliard de dinars. La FINALEP, détenue par la BDL et le CPA, administre 44 participations totalisant 4,64 milliards de dinars. L’Algerian Startup Fund, soutenu par les six banques publiques, a investi 895,5 millions de dinars répartis sur 99 participations, démontrant l’appétit croissant pour l’accompagnement des jeunes entreprises innovantes. Pour 2025, la COSOB annonce la mise en œuvre opérationnelle du règlement sur les OPCR, la consolidation du Guichet Unique et l’élaboration d’un plan d’incitation à la cotation. Son président Youcef Bouzenada souligne que l’année écoulée a jeté les fondations d’un marché solide et transparent, affirmant la détermination de l’institution à poursuivre sa mission de modernisation au service du financement de l’économie nationale.

Sabrina Aziouez

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