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Ghaza : 10.000 martyrs sous les décombres !

Alors que le cessez-le-feu reste fragile dans la bande de Ghaza, la Défense civile palestinienne estime à 10.000 le nombre de victimes toujours ensevelies sous les ruines, tandis que l’aide humanitaire n’atteint qu’une fraction des besoins vitaux de plus de deux millions d’habitants, plongeant le territoire dans une crise sans précédent.

Douze jours après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, Ghaza fait face à une double tragédie humanitaire. D’une part, des milliers de familles palestiniennes attendent dans l’angoisse que les corps de leurs proches soient extraits des décombres des habitations détruites. D’autre part, la population affamée et déplacée ne reçoit qu’une aide dérisoire par rapport aux promesses faites lors de la signature de l’accord du 9 octobre dernier. La Défense civile palestinienne a lancé lundi un appel pressant à la communauté internationale. Son porte-parole, Mahmoud Basal, a confirmé qu’environ 10.000 Palestiniens demeurent ensevelis sous les ruines à travers le territoire. « Nous disposons d’une longue liste de noms de martyrs se trouvant sous les décombres, et nous recevons quotidiennement des appels désespérés de familles cherchant à connaître le sort de leurs proches », a-t-il déclaré. À Ghaza-ville seulement, 4.000 corps gisent sous les gravats, sans compter les quartiers de Tal al-Hawa et Zeitoun. L’extraction de ces victimes constitue une opération d’une complexité extrême nécessitant l’intervention coordonnée de multiples acteurs et surtout des équipements lourds que la Défense civile ne possède pas. « La situation à Ghaza n’a pas changé depuis le cessez-le-feu », a souligné amèrement Mahmoud Basal. Sur le front de l’aide humanitaire, les chiffres révèlent un décalage alarmant entre les engagements et la réalité. Selon le Bureau des médias de Ghaza, seulement 980 camions d’aide sont entrés dans l’enclave depuis le 10 octobre, alors que 6600 camions quotidiens étaient attendus conformément aux termes de l’accord. La moyenne journalière s’élève à peine à 89 camions, contre les 600 nécessaires pour répondre aux besoins élémentaires. Parmi ces convois dérisoires, on compte 14 camions de gaz de cuisine et 28 camions de carburant diesel destinés aux boulangeries, générateurs et hôpitaux. Une pénurie critique frappe tous les produits de première nécessité dont dépend la survie quotidienne des Ghazaouis.

Le Programme alimentaire mondial des Nations unies a tiré la sonnette d’alarme mardi depuis Genève. « Le maintien du cessez-le-feu est vital. C’est vraiment le seul moyen de sauver des vies et de lutter contre la famine dans le nord de Ghaza », a déclaré sa porte-parole Abeer Etefa. Elle a rappelé que dimanche dernier, aucune nourriture n’avait pu être acheminée en raison des combats qui ont repris, violant l’accord de trêve. « Nous savons que ce cessez-le-feu est fragile. L’essentiel est qu’il dure et que les gens, ainsi que nos équipes sur le terrain, gardent espoir », a-t-elle insisté, appelant à l’ouverture de tous les points de passage, particulièrement vers le nord où la situation alimentaire demeure extrêmement critique.

Cette violation du cessez-le-feu a d’ailleurs fait des victimes. Lundi, quatre Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens à l’est de Ghaza-ville, dans le quartier d’Al-Touffah, alors qu’ils tentaient de regagner leurs foyers pour en constater l’état. Un bombardement d’une école de l’UNRWA transformée en abri dans le camp de réfugiés de Nuseirat a également causé la mort de quatre personnes. Philippe Lazzarini, Commissaire général de l’UNRWA, a réitéré son appel à l’ouverture d’enquêtes indépendantes sur ces violations flagrantes du droit international humanitaire. Le bilan humain de cette agression s’alourdit chaque jour. Les autorités sanitaires palestiniennes ont annoncé mardi que le nombre de martyrs s’élevait désormais à 68229, avec 170369 blessés depuis le 7 octobre 2023, en majorité des femmes et des enfants. Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, 87 Palestiniens ont encore été tués et 311 autres blessés, tandis que 432 corps ont pu être récupérés. Au total, l’agression a provoqué plus de 238.000 morts et blessés, plus de 11000 disparus, des centaines de milliers de déplacés et une famine ayant coûté la vie à de nombreux Ghazaouis, principalement des enfants. Face à cette catastrophe humanitaire, les appels à la responsabilité internationale se multiplient. L’émir du Qatar, Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, a condamné mardi « la transformation de la bande de Ghaza en une zone impropre à la vie humaine » et les violations continues du cessez-le-feu, exhortant la communauté internationale à « assumer ses responsabilités en matière de protection du peuple palestinien et à veiller à ce que les auteurs du génocide soient tenus responsables ». Le mouvement de résistance palestinien Hamas a réaffirmé mardi son engagement à respecter intégralement l’accord de cessez-le-feu, se déclarant « pleinement confiant et fermement déterminé » à appliquer les termes convenus avec les autres factions palestiniennes. Le mouvement a exprimé l’espoir que les quantités d’aide humanitaire augmentent afin de répondre aux besoins urgents d’une population endurant des conditions extrêmement difficiles. Le Bureau des médias de Ghaza a qualifié la situation actuelle d' »asphyxie continue, de famine et de chantage humanitaire » exercés contre plus de 2,4 millions de Ghazaouis. Il a exhorté à un afflux immédiat et régulier d’au moins 600 camions quotidiens comprenant nourriture, fournitures médicales, articles de secours, carburant et gaz de cuisine, afin d’assurer les conditions de base pour la survie. Les agences gouvernementales locales se disent prêtes à coordonner pleinement leurs efforts avec les organisations humanitaires internationales pour faciliter l’entrée et la distribution équitable de l’aide à travers tout le territoire. Alors que le cessez-le-feu demeure précaire et régulièrement violé par l’occupation sioniste, Ghaza reste prise dans l’étau d’une crise humanitaire majeure où les vivants peinent à survivre et les morts attendent encore d’être dignement enterrés.

Lyes Saïdi

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