Progression de 8% du PIB et réduction du déficit budgétaire : Les signes de la reprise
L’exécutif dévoile un budget de 17.636 milliards de dinars porté par la diversification économique et le soutien aux start-ups.
Le ministre des Finances Abdelkrim Bouzred a présenté dimanche devant l’Assemblée populaire nationale le projet de loi de finances pour 2026, tablant sur une croissance de 4,1% et un déficit budgétaire divisé par deux, dans un contexte de reprise économique marqué par la montée en puissance des secteurs hors hydrocarbures. Lors d’une séance plénière présidée par Brahim Boughali en présence des membres du gouvernement, le ministre a détaillé un budget de 17.636,7 milliards de dinars de dépenses pour des recettes estimées à 8.009 milliards de dinars. Un exercice budgétaire qui intervient, a-t-il souligné, dans un contexte national caractérisé par « une reprise progressive de l’économie, portée par les efforts du gouvernement dans les différents secteurs », mettant en avant « les efforts continus de l’Etat en matière d’encouragement de l’investissement, de diversification de l’économie, de relance des grands projets structurants et de développement des exportations ». Les indicateurs macro-économiques présentés témoignent d’une amélioration notable de la santé financière du pays. Le produit intérieur brut a bondi à 10.047 milliards de dinars au premier trimestre 2025, contre 9.300 milliards à la même période l’année précédente, soit une progression de près de 8%. Plus significatif encore, le déficit budgétaire devrait reculer drastiquement à environ 4.000 milliards de dinars fin 2025, contre les 9.200 milliards prévus initialement dans la loi de finances en cours. Cette performance résulte, a expliqué le ministre, « de la consommation de 70% seulement du budget et de la non dépense de certains financements programmés pour le secteur économique ». Abdelkrim Bouzred a d’ailleurs assuré que « le déficit budgétaire continuera de reculer à l’horizon 2028 ». Les indicateurs économiques, a précisé le ministre, montrent que l’économie nationale évolue dans « la bonne direction ». La trajectoire de croissance esquissée pour les trois prochaines années affiche des ambitions soutenues qui maintiendront « un rythme supérieur à la moyenne mondiale », avec 4,1% attendus en 2026, puis 4,4% en 2027 et 4,5% en 2028. Cette dynamique sera principalement portée par les secteurs hors hydrocarbures, dont la croissance atteindra près de 5% sur la période, grâce à des performances notables dans l’industrie avec une progression de 6,2%, l’agriculture à 5,4%, le bâtiment à 5,1% et les services à 5%. Les recettes au premier semestre ont d’ailleurs atteint 5.600 milliards de dinars, en hausse de 1.450 milliards en glissement annuel. Le ministre a souligné que « les recettes globales au titre du PLF 2026 dépasseront 8.000 milliards de dinars, ce qui reflète les efforts déployés pour mobiliser les ressources hors secteur des hydrocarbures, notamment dans le domaine fiscal ».
Stimuler l’investissement
Au cœur de ce projet de loi figure une batterie de mesures destinées à stimuler l’investissement et à dynamiser l’écosystème entrepreneurial. Le dispositif de soutien aux start-ups se trouve considérablement renforcé avec le doublement de la durée d’exonération fiscale lors du renouvellement de leur label, passant d’un à deux ans. Les incubateurs d’entreprises bénéficieront également d’avantages fiscaux reconduits automatiquement à chaque renouvellement de leur agrément. Cette mesure vise à introduire des modifications profondes dans le régime fiscal applicable aux organismes d’accompagnement détenteurs du label « incubateur », l’exonération d’impôt devenant renouvelable à chaque renouvellement du label. L’objectif est double selon le gouvernement : garantir la pérennité des organismes d’accompagnement et assurer la qualité de leurs services. La promotion des exportations hors hydrocarbures constitue un autre axe majeur du texte budgétaire. Les entreprises et exportateurs participant à des événements économiques internationaux spécialisés verront désormais leurs frais intégralement pris en charge par le Fonds spécial de promotion des exportations, contre une couverture partielle entre 50 et 80% auparavant. Cette mesure s’inscrit dans le cadre du renforcement des dispositifs d’incitation et de soutien offerts par l’Etat aux exportateurs, en vue de promouvoir les produits algériens et d’augmenter le volume des exportations hors hydrocarbures. Le projet de loi innove également en introduisant un statut fiscal favorable à la micro-importation, permettant aux personnes exerçant cette activité de bénéficier du régime des auto-entrepreneurs. Les importations dans ce cadre seront soumises à un taux réduit de droit de douane de 5% et exonérées de TVA et autres taxes douanières, avec un dédouanement simplifié. Les micro-importateurs seront assujettis à un taux d’imposition forfaitaire unique de 0,5% par transaction, calculé sur la valeur en douane majorée des droits de douane et d’une marge forfaitaire de 30%.
La transition énergétique s’inscrit comme une priorité stratégique du budget 2026. Les entreprises investissant dans le développement de l’hydrogène vert, les projets de boisement et reboisement, ainsi que la production et valorisation des énergies renouvelables pourront déduire ces dépenses de leur bénéfice imposable, dans la limite de 5%. Par cette mesure, l’Etat vise plusieurs objectifs : l’accélération de la transition énergétique, la création de richesse et d’emplois durables, ainsi que l’augmentation des exportations d’énergie propre. L’importation des matériaux destinés à la fabrication de panneaux solaires photovoltaïques bénéficiera d’un taux réduit de droits de douane de 5%, dans le but de renforcer la structuration du tissu industriel national et de le rendre capable de répondre à la demande locale croissante. Les électrolyseurs destinés à la production d’hydrogène seront totalement exonérés de droits douaniers.
Le secteur de la pêche maritime et de l’aquaculture bénéficie également d’un soutien appuyé. L’importation des matières premières entrant dans la production d’aliments destinés à l’aquaculture sera exonérée de droits de douane et soumise à un taux de TVA réduit de 9%. L’âge autorisé des navires d’occasion de grande pêche pouvant être dédouanés passe de cinq à quinze ans, offrant ainsi davantage de flexibilité aux professionnels du secteur. Les produits locaux issus de la fabrication d’aliments pour l’élevage des espèces aquatiques bénéficieront du même taux préférentiel.
Caractère social
Abdelkrim Bouzred a tenu à souligner la dimension sociale du budget 2026. Les mesures contenues dans le projet de loi, a-t-il affirmé, « reflètent l’attachement au caractère social de l’Etat, tout en maintenant un rythme de croissance économique soutenu, grâce aux réformes fiscales et financières et au renforcement de la dynamique des secteurs hors hydrocarbures ». Le ministre a expliqué que « le projet de loi continue de consacrer le caractère social de l’Etat », avec près de 6.000 milliards de dinars de dépenses de transferts sociaux. Cette enveloppe comprend 420 milliards de dinars pour l’allocation chômage, 424 milliards pour le soutien à la Caisse nationale des retraites et 656 milliards pour la subvention des prix des produits de base à l’instar du blé. Les transferts incluent également 2.800 milliards de dinars destinés aux établissements administratifs publics à l’instar des universités et des hôpitaux. Sur le plan fiscal, le texte prévoit une simplification des procédures avec la révision des modalités de remboursement des trop-perçus relatifs à l’impôt sur les bénéfices des sociétés et à l’impôt sur le revenu global, ainsi que la suppression du système de contractualisation concernant l’impôt forfaitaire unique. Le PLF 2026 comporte également des mesures de régularisation pour les entreprises ayant accusé un retard dans le paiement de leurs redevances fiscales, le maintien de la stabilité des prix des produits de large consommation, et un allègement de l’impôt sur le revenu global comme soutien indirect aux familles. Le ministre a précisé que les recettes hors secteur des hydrocarbures devraient augmenter de 6,6%, portant ainsi le budget général à 17.800 milliards de dinars en 2027 et à près de 19.000 milliards en 2028.
Lutte contre la fraude et le blanchiment
Le texte comporte en outre des mesures visant à renforcer la numérisation, à lutter contre la fraude, le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale, conformément aux engagements de l’Algérie envers les organisations internationales. Un intérêt particulier est accordé au renforcement de la coopération internationale, avec des dispositions facilitant l’activité de l’Agence algérienne de la coopération internationale pour la solidarité et le développement.
Les 258 députés de l’Assemblée populaire nationale ont entamé dimanche le débat du projet de loi, qui se poursuivra pendant trois jours. La journée de mardi prochain sera consacrée aux interventions des présidents des groupes parlementaires, suivies de la réponse du ministre des Finances. Le texte devrait être soumis au vote mardi.
Amar Malki

