Minéraux critiques : Un enjeu énergétique, économique et géopolitique
Les minéraux critiques sont devenus un véritable enjeu économique, mais aussi géopolitique, notamment dans un contexte de transition énergétique et d’accélération de la révolution technologique. Que ce soit pour les industries liées aux énergies renouvelables, les nouvelles technologies, les technologies spatiales, et même les industries de défense, les minéraux critiques et les terres rares sont devenues essentiels. Et dans la mesure où la Chine contrôle la part la plus importante des réserves en minéraux critiques et en terres rares, les pays de l’OCDE commencent à afficher certaines craintes à propos de la disponibilité de ces minéraux. Des craintes qui se font plus présentes après que la Chine ait annoncé des restrictions sur l’exportation de ces minéraux pour répondre aux mesures de rétorsion occidentale sur l’exportation de semi-conducteurs et produits technologiques vers la Chine. C’est dans ce contexte que l’Agence internationale de l’énergie, qui défend les intérêts des pays de l’OCDE, a souligné la problématique des minéraux critiques dans son rapport annuel publié mardi. Elle estime ainis que l’approvisionnement en métaux et minerais nécessaires à la transition énergétique, dont la demande explose, demeure un «défi» avec de nombreuses incertitudes, met en garde l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Compte tenu d’une flambée de la demande, le marché global de ces minerais indispensables à la production de batteries, d’éoliennes et autres panneaux solaires a atteint en 2022 quelque 320 milliards de dollars, selon l’AIE. De 2017 à 2022, il a doublé de volume : la demande de lithium a triplé, celle de cobalt a progressé de 70%, celle de nickel de 40%. Cette croissance au galop devrait se poursuivre, «mais une combinaison de mouvements de prix volatils, de goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement et d’inquiétudes géopolitiques» compromet une transition énergétique sûre et rapide, met en garde l’AIE dans un premier rapport. L’Agence évoque le «risque de retards» dans les nouveaux projets de production et les «lacunes» technologiques, qui ne laissent pas de répit dans les efforts à déployer pour développer l’offre. Dans tous les cas, il faudra «davantage de projets» d’ici 2030, pour limiter le réchauffement mondial à 1,5° C par rapport aux niveaux pré-industriels, objectif de l’accord de Paris. L’AIE alerte aussi sur l’insuffisante diversité de l’offre, notamment pour le raffinage où la concentration est plus forte que jamais : l’agence basée à Paris rappelle que la Chine représente la moitié des projets d’usines de lithium, tandis que l’Indonésie concentre près de 90% des usines de raffinage de nickel en projet. Il est utile de rappeler que l’Union européenne a présenté au mois de mars dernier une nouvelle feuille de route pour sécuriser l’approvisionnement en matières premières critiques. Cette feuille consiste à proposer à des pays riches en matières premières critiques, en particulier en Afrique, des partenariats axés sur le raffinage local de ces matières indispensables aux transitions écologique et numérique.
Samira Ghrib