Rebattre les cartes de l’ordre mondial
C’est aujourd’hui que s’ouvre le 15e sommet des BRICS. Plus de 50 chefs d’État du Sud global et des représentants d’organisations internationales et régionales prennent part à cette réunion, la plus importante, depuis la création du groupe des économies émergentes. Un sommet au cours duquel le projet d’élargissement du groupe sera examiné, mais qui dessine surtout les contours d’un nouvel ordre économique et politique international. Le ton est d’ailleurs donné. Le sommet se tiendra sous le thème : « Partenariats pour une croissance accélérée, développement durable et multilatéralisme inclusif ».
L’Algérie prendra part à ce sommet qui s’ouvre aujourd’hui. C’est le ministre des Finances, Lâaziz Faïd, qui a été désigné par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, pour le représenter. Le premier argentier du pays se trouve d’ailleurs depuis dimanche à Johannesburg et doit prendre jeudi au forum BRICS Outreach Plus. Un communiqué du ministère des Finances rappelle dans ce sens que le forum, qui fait partie de l’agenda du 15e sommet des BRICS, réunira en plus des dirigeants des cinq pays du groupe, des chefs d’Etat et de gouvernement de 67 pays d’Afrique, d’Amérique latine, d’Asie et des Caraïbes, ainsi que des responsables d’organisations internationales et régionales.
Au-delà des questions économiques, le sommet des BRICS s’attache à dessiner les contours d’un multilatéralisme plus juste, à proposer une alternative à l’ordre international mis en place au lendemain de la seconde Guerre mondiale, dont les déséquilibres nourrissent les crises et les conflits. Ainsi et selon le ministère des Finances, « la participation de l’Algérie à ce forum traduit tout l’intérêt accordé par les autorités du pays à contribuer à la réflexion autour des questions liées à la reprise face aux crises multidimensionnelles, au renforcement d’un multilatéralisme juste et à la réforme de la gouvernance mondiale ».
Cet événement constituera une occasion pour les participants d’échanger au plus haut niveau sur des thématiques d’actualité, notamment les voies et moyens de renforcer la coopération des pays en développement pour assurer une reprise économique mondiale inclusive et un développement durable, ajoute la même source. « Ces thématiques qui seront débattues en présence d’éminentes personnalités et de chefs d’Etat, témoignent de l’importance d’une action solidaire pour un système économique mondial plus réactif et plus juste, permettant de lutter contre les inégalités, d’accélérer la transition climatique et de renforcer les chances d’atteindre les objectifs du développement durable », indique le ministère.
Il faut également souligner que le Sommet des BRICS doit se pencher sur le projet d’élargissement du groupe des cinq économies émergentes selon la formule BRICS+ proposée par la Chine. Plus d’une vingtaine de pays, des membres du G20 ont introduit une demande d’adhésion au groupe. L’Algérie a formulé une demande officielle d’adhésion en tant que membre observateur et est soutenue dans cette démarche par les membres des BRICS qui portent le projet d’élargissement du groupe, à savoir la Chine, la Russie et l’Afrique du Sud. Une adhésion aux BRICS pourra avoir un double effet positif sur l’Algérie. Sur le plan économique, elle permettra d’accélérer les réformes économiques, ainsi que la modernisation et la diversification de l’économie, de même que diversifier les partenariats et de sortir des limites des systèmes commerciaux et monétaires dollar-euro. L’Algérie a d’ailleurs des atouts à faire valoir de par son important potentiel économique, mais aussi de par son poids géopolitique en tant que pays pivot et de son militantisme diplomatique en faveur des causes justes et d’un multilatéralisme plus juste, à travers la réforme de la gouvernance mondiale.
Dimension géopolitique
Car, il est nécessaire de souligner que le 15e sommet des BRICS porte une dimension géo-économique et géopolitique. Si le projet d’élargissement des BRICS aboutit, le groupe pourra alors revendiquer 40% du PIB mondial et 50% de la population du globe. Il s’agit surtout de présenter une alternative pour le Sud global. C’est d’ailleurs cela qui a motivé l’enthousiasme de nombreux pays au projet d’élargissement du groupe, lequel entend rebattre les cartes d’un ordre mondial. Pour ce faire le groupe mise sur la mise en place d’alternatives d’abord aux institutions de Bretton Woods à travers la Nouvelle Banque de développement en proposant de prendre de manière réelle les besoins des pays pauvres et en développement et de lutter contre les pratiques commerciales abusives, mais aussi au système commercial et monétaire assis sur l’hégémonie du dollar. Il s’agit ainsi de faire face à la militarisation grandissante du billet vert qui se traduit par un élargissement constant du régime des sanctions économiques et commerciales et qui affecte de plus en plus de pays.
Le projet des BRICS est également assis sur la refonte de la gouvernance mondiale à travers la réforme de l’ONU. A ce propos, le président Sud-africain, Cyril Ramaphosa a indiqué dimanche dans une allocution sur la politique extérieure de son pays que les BRICS, « plaident en faveur d’un monde plus équitable et plus équilibré, régi par un système inclusif de gouvernance mondiale ».
Lyes Saïdi