Subventions : la réforme reportée
Le ministre des Finances a affirmé hier que la réforme des subventions ne sera lancée qu’après la finalisation du processus de numérisation et du recensement précis des ménages devant bénéficier du soutien de l’État.
Poste budgétaire important, les transferts sociaux sont le reflet du caractère social de l’État. Les subventions qui s’illustrent à travers la politique de soutien des prix des produits alimentaires de large consommation, des exonérations fiscales dont bénéficient plusieurs aliments, le soutien aux prix de l’énergie et de l’eau, ont certes permis de maîtriser quelque peu l’impact de l’inflation importée et de préserver le pouvoir d’achat, dans le contexte actuel. Cependant, elles constituent un véritable défi pour la viabilité du budget de l’État dans la mesure où elles participent aux dépenses de fonctionnement, lesquelles sont pour une grande partie de nature incompressible. La politique de soutien au prix ne permet pas non plus de répondre pleinement à ses objectifs de justice sociale, dans la mesure où elle bénéficie souvent bien plus aux ménages aux revenus élevés qu’aux ménages vulnérables. Un constat qui a fait de la réforme de la politique des subventions une nécessité. Une réforme engagée en 2022, avec l’instauration de l’article 187 bis de la loi de finances 2022 qui ambitionne l’instauration d’un dispositif national de compensation monétaire au profit des ménages qui doit permettre de remplacer la politique de soutien des prix et de subvention des prix, par des transferts monétaires directes aux ménages vulnérables et ceux de la classe moyenne. Une réforme qui est cependant gelée en raison de l’absence d’un système statistique national fiable et d’un environnement numérique, permettant de recenser les ménages et leurs revenus et d’identifier de manière précise ceux qui sont éligibles à l’aide de l’État. Dans ce contexte le ministre des Finances, a affirmé hier que le processus de réforme des subventions est tributaire de la finalisation du processus de numérisation et du recensement des ménages éligibles. Laâziz Faïd a affirmé lors de son intervention au forum du quotidien El Moudjahid que l’opération est reportée jusqu’à la finalisation de la numérisation, car il n’est pas possible d’appliquer un soutien ciblé sans un recensement précis de ses bénéficiaires. Il a ajouté que la réforme des subventions est reportée jusqu’à ce que à ce que toutes les conditions nécessaires à la mise en place d’un système permettant de garantir une répartition juste des subventions directes soient mises en place. Il a souligné que l’objectif est de parvenir à la justice car « le dossier est délicat et sensible et sera traité une fois toutes les conditions remplies ».
Lors de son intervention, le premier argentier du pays a d’ailleurs insisté sur le caractère social de l’État. Un caractère reflété par les dispositions de la loi de finances de 2024, notamment à travers l’amélioration du pouvoir d’achat des citoyens par la revalorisation des salaires des fonctionnaires et l’augmentation de la valeur des dépenses des transferts (intervention économique et sociale de l’Etat) qui ont atteint cette année 4.208 milliards DA (autorisations d’engagement).Il a précisé que la valeur des transferts sociaux, à savoir les allocations, pensions et aides octroyées par l’Etat est passée de 1.900 milliards de DA en 2020 à 2.900 milliards de DA au titre de l’année en cours, avec 704 milliards de DA alloués à la subvention des produits de base de large consommation comme céréales, huile, sucre, eau de mer dessalée et énergie). M. Faid a également indiqué que ces affectations reflétaient les efforts de l’Etat visant l’amélioration du pouvoir d’achat du citoyen, notamment à travers l’augmentation des salaires de la Fonction publique, conformément à l’engagement du président de la République prévoyant une augmentation des salaires à 47%. Dans le même sillage, le ministre a indiqué que le montant total des salaires affectés par la loi de finances en vigueur s’élève à 5.275 milliards de DA, soit 34,5 % du budget de l’Etat. Le montant alloué à la révision de la grille indiciaire des salaires des fonctionnaires et agents publics (2,8 millions de fonctionnaires) pour l’année 2024 s’élève à 578 milliards DA, selon le ministre. L’aide de l’Etat s’est, également, manifesté sous forme de plusieurs mesures fiscales adoptées, telles que l’exonération temporaire jusqu’à la fin de l’année en cours de la TVA pour les opérations d’importation et de vente de légumineuses, de riz, ainsi que pour les opérations de vente de légumes et fruits frais, d’œufs, de volaille, et de dinde produits localement, a poursuivi M. Faid.
La hausse de l’allocation voyage en examen
Lors du forum, le ministre des Finances a eu à répondre aux questions de la presse, notamment la question de l’ouverture des bureaux de changes dans le sillage de la nouvelle loi monétaire et bancaire. A ce propos, Laâziz Faïd a expliqué que le texte réglementaire encadrant l’opération a été émis il y a peu de temps. Il est prévu que la Banque d’Algérie publie une instruction dans les jours à venir, ajoute le ministre précisant que la question des bureaux de changes relève de la compétence exclusive de l’Autorité monétaire. Il en est de même pour l’allocation voyage. A ce propos, le ministre indique que le dossier relatif à la hausse de l’allocation est en examen, sans plus de détails.
Le ministre a également évoqué l’ouverture de nouvelles succursales de banques publiques à l’étranger. Il a rappelé l’ouverture prochaine de la Banque internationale d’Algérie (BIA) en France, relevant de la BEA, en sus d’une banque en Côte d’Ivoire, afin d’accompagner et de financer les exportations hors hydrocarbures, soulignant que cette étape faisait suite à l’ouverture, récemment, de deux banques publiques en Mauritanie et au Sénégal. Enfin et concernant la relance de la Bourse d’Alger à travers la cotation de nouvelles institutions, le ministre a affirmé que l’entrée prochaine du Crédit populaire d’Algérie « CPA » insufflera une « nouvelle dynamique » au marché financier, ajoutant que l’opération de cotation permettra d’ouvrir 135 Mds DA en actions de la banque publique.M. Faid a indiqué, dans ce sens, que « le CPA entrera très prochainement en bourse en attendant l’a cotation des actions de la BDL, exprimant son souhait que « les 135 Mds DA qui seront ouverts pour l’investissement en bourse permettront d’insuffler une nouvelle et réelle dynamique à la bourse », a-t-il ajouté.
Sabrina Aziouez