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Gazoduc Alger-Lagos, la route transsaharienne et la dorsale à fibre optique   : Alger et Abuja passent à la vitesse supérieure

 Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’Etranger, Ramtane Lamamra, poursuit son marathon diplomatique. A

près avoir grandement contribué au succès éclatant du 31e sommet de la Ligue des Etats arabes dont les travaux se sont tenus la semaine dernière à Alger, le chef de la diplomatie algérienne s’est replongé dans son sujet de prédilection : l’Afrique, dont il est un grand spécialiste. Ce retour aux affaires africaines s’est fait à l’occasion de la visite à Alger, hier, du ministre nigérian des Affaires, Geoffrey Onyeama, avec lequel il s’est longuement entretenu.

Il faut dire que la visite en Algérie d’un officiel nigérian n’est jamais un événement banal ou anodin vu les liens historiques et la relation stratégique qui lient les deux pays. Quand un ministre nigérian se déplace en Algérie c’est généralement toujours pour traiter de dossiers politiques et économiques lourds dont les portées sont souvent régionales ou continentales. Les connaisseurs du continent ne s’étonnent pas puisque l’Algérie et le Nigéria font partie avec l’Afrique du Sud des poids lourds de l’Afrique qui ont été à l’origine des grandes dynamiques de développement dans lesquelles s’est engagée l’Union africaine. Ces trois pays auxquels se joindra plus tard le Sénégal ont été, à titre d’exemple, à l’origine du lancement en 2000 du NEPAD, le nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique. Le NEPAD est un projet de développement à l’échelle continentale grâce à des infrastructures. Il avait été initié par Abdelaziz Bouteflika, Thabo Mbeki, Olusegun Obasanjo et Abdoulaye Wade.

La visite du ministre nigérian des Affaires, Geoffrey Onyeama, n’a pas dérogé à la règle. Pour renforcer leur synergie, Alger et Abuja ont d’abord signé hier un « accord bilatéral portant création d’un Conseil d’Affaires algéro-nigérian qui a pour vocation de rapprocher les opérateurs économiques des deux pays et d’augmenter le volume des échanges commerciaux bilatéraux ». Par la suite, Ramtane Lamamra et son homologue nigérian ont fait le point sur l’avancée de dossiers hautement stratégiques autant pour l’Algérie et le Nigéria que l’Afrique de l’Ouest et l’Europe. Ces dossiers suivis par les deux capitales au jour le jour concernent, selon un communiqué rendu public par le ministère algérien des Affaires étrangères, le Gazoduc Alger-Lagos, la route transsaharienne et la dorsale à fibre optique qui doit arroser un grand nombre de pays du Sahel en internet haut débit. A l’occasion, les responsables ont réaffirmé l’engagement à réaliser les projets structurants initiés conjointement dans le domaine économique.

Projets structurants stratégiques

Il ne se passe d’ailleurs pratiquement pas un mois sans que des responsables des deux pays ne se rencontrent à Alger ou à Abuja pour faire en sorte que ces trois projets voient le jour le plus possible, surtout que la conjoncture internationale marquée par une crise énergétique est favorable. Cela vaut notamment pour le projet de gazoduc qui doit rallier Alger et Lagos via le Niger qui, une fois réalisé, va renforcer assurément le rôle géopolitique des trois pays. Le ministre algérien de l’Energie, Mohamed Arkab, a eu récemment plusieurs réunions de travail avec son homologue nigérian sur le sujet.

C’est de cette perspective que redoute le Maroc qui essaye, depuis plusieurs mois, de parasiter, mais sans succès, le projet. Comment ? En faisant la promotion d’un projet de gazoduc qui relierait Lagos à Casablanca ou Rabat via les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest. Lors de l’annonce du projet, tous les spécialistes en énergie ne sont pas empêchés de rire au nez de Rabat. Pourquoi ? Il est beaucoup plus long que le projet Lagos-Alger, deux fois plus cher (25 milliards de dollars contre 13 milliards de dollars) et trop difficile à réaliser. Par ailleurs, tout le monde sait que le Maroc n’a ni les financements et encore moins l’expertise pour mener un tel projet d’envergure. Ce n’est pas tout. Dans ses échanges avec les Européens, le Maroc a souvent démontré qu’il n’était pas un partenaire fiable et qu’il recourt souvent au chantage et il l’a bien démontré avec l’Espagne avec la question des migrants. Globalement donc, l’idée marocaine est une arnaque. En face, l’avantage du gazoduc dont font la promotion l’Algérie et le Nigéria est déjà à moitié réalisé. Disposant d’une longue expertise en matière d’exploration, de production et de commercialisation d’hydrocarbures, les deux pays ont par ailleurs toujours honoré leurs contrats.

Lors des échanges entre Ramtane Lamamra et Geoffrey Onyeama, il n’a pas été question que d’économie ou de business. Les deux responsables se sont beaucoup attardés aussi sur les dossiers politiques, surtout qu’il existe une grande convergence de vues sur plusieurs dossiers comme celui se rapportant au conflit du Sahara Occidental. Ce n’est pas étonnant puisque le Nigéria est l’un des plus grands soutiens du Front Polisario en Afrique.

Dans le prolongement de leur commun engagement panafricaniste, les Chefs de la diplomatie des deux pays ont également réaffirmé «leur convergence sur la nécessité de permettre à l’Afrique de mettre en œuvre sa propre vision stratégique en matière de paix, sécurité et développement et de promouvoir son unité pour se prémunir des tensions actuelles dans les relations internationales et du climat de polarisation qui en résulte ».  A cet égard, indique le communiqué du ministère des Affaires étrangères, « il a été souligné la nécessité de préserver l’attachement des pays africains aux principes du non-alignement et d’encourager leur participation collective à la reconstruction des relations internationales post-Covid et guerre en Ukraine ».

Khider Larbi

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