Culture

27e Sila: Des éditeurs appellent à soutenir l’industrie du livre

L’édition occupe une place stratégique dans la diffusion des œuvres intellectuelles et artistiques d’un pays. Elle joue un rôle central dans la transmission des connaissances, la valorisation des expressions culturelles nationales et l’enrichissement du débat d’idées. Cependant, ce secteur fait face à de nombreux défis économiques et structurels qui nécessitent un soutien public fort et pérenne.

La 27e édition du Salon international du livre d’Alger (Sila) a ainsi été l’occasion pour des professionnels de l’édition et du livre de réaffirmer la nécessité d’un soutien accru aux industries du livre dans les pays africains et arabes. Face aux défis économiques, linguistiques et de visibilité auxquels elles sont confrontées, ces filières éditoriales ont besoin d’un engagement fort des pouvoirs publics pour se développer et rayonner. Selon les chiffres rappelés, lors d’une rencontre professionnelle sur les enjeux du livre arabe et africain en marge du Sila, par le président de l’Union des éditeurs arabes, Mohamed Rashad, la production éditoriale dans les pays arabes ne dépasse pas 75 000 à 85 000 nouveaux titres par an. Un volume qui reflète la faiblesse structurelle de ces industries face à des marchés très concurrentiels. Cette fragilité s’explique par de multiples facteurs : des coûts de production élevés, des circuits de distribution peu développés, des lectorats restreints du fait des faibles taux de scolarisation et de pratique de la lecture, ou encore un environnement numérique qui bouscule les modèles économiques traditionnels. Selon Mohamed Rashad, également éditeur, le volume global de l’industrie de l’édition dans les pays arabes ne dépasse pas « 4 milliards » de dollars. Dans de nombreux pays africains, la situation est encore plus préoccupante, avec un « déclin » de la place de la langue arabe souligné par Mohanad El Djahmani, le président de l’Organisation nationale des éditeurs de livres (Onel). La traduction vers les langues locales, pourtant essentielle pour toucher un public plus large, peine à se développer, fragilisant encore davantage ces filières éditoriales. Relevant un « déclin » de la place de langue arabe dans certains pays africains, cet éditeur a appelé à « renforcer » l’enseignement de cette langue et encourager la traduction de l’arabe vers les langues africaines. Face à ces défis économiques et linguistiques, les éditeurs appellent à un soutien public renforcé pour asseoir de véritables industries du livre, à même de relever les enjeux majeurs de l’édition à l’ère du numérique.

Un engagement fort des États est indispensable pour permettre à ces filières éditoriales de se développer et de jouer pleinement leur rôle de vecteurs de la création intellectuelle et artistique nationale.Des aides à la publication, des subventions aux petits éditeurs, des dispositifs de soutien à la traduction ou à l’exportation seraient autant de leviers pour diversifier l’offre éditoriale et favoriser l’expression d’une pluralité de voix créatrices. L’essayiste Samia Bouharati a d’ailleurs souligné l’importance de « donner une large visibilité » à la production éditoriale locale, tous domaines confondus. Au-delà du soutien financier, les pouvoirs publics ont aussi un rôle déterminant à jouer pour créer un environnement favorable au développement du livre et de la lecture. Cela passe par des politiques ambitieuses en matière d’éducation, de bibliothèques publiques, de prix uniques ou encore de fiscalité du livre. Au-delà des enjeux purement économiques, le soutien public à l’édition dans les pays africains et arabes revêt aussi une dimension stratégique en termes de dialogue interculturel et de rayonnement. Comme le souligne Samia Bouharati, le livre représente un « vecteur d’ouverture sur les cultures et savoirs ». Encourager la traduction des œuvres locales vers d’autres langues, favoriser les échanges et les coopérations éditoriales entre pays du Sud, sont autant de moyens de valoriser la diversité des expressions culturelles et d’enrichir les regards croisés.

Mohamed Seghir

admin

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