Le président Tebboune dresse un bilan des réalisations et les perspectives de son second mandat: « La voie est tracée »
Dans un entretien accordé au quotidien français L’Opinion, le président de la République Abdelmadjid Tebboune a livré une analyse détaillée de son parcours présidentiel et de ses ambitions pour l’Algérie, dressant un tableau nuancé des défis relevés et des perspectives futures du pays. Le Président a reconnu avec humilité que son parcours n’était pas parfait, mais porteur d’espoir.
Cet entretien intervient à un moment charnière, alors que le président entame son second mandat, période qu’il considère comme décisive pour parachever les grandes réformes initiées depuis 2020. Revenant sur son arrivée au pouvoir en 2019, Tebboune a souligné la nécessité de reconstruire les institutions dans un délai très court, tout en reconnaissant les difficultés supplémentaires causées par la crise sanitaire. Malgré ces obstacles, il affirme avec conviction : « Nous avons tenu nos engagements et avons révisé la Constitution ». Cette révision constitutionnelle s’inscrit dans une perspective de transformation politique profonde que le président entend poursuivre. Interrogé sur son héritage politique, Tebboune a été particulièrement clair et sans ambiguïté : « Je n’ai pas l’intention de m’éterniser au pouvoir. Je respecterai la Constitution (qui limite à deux les mandats présidentiels) ». Cette déclaration illustre la volonté du Président de rompre avec les pratiques politiques passées et de s’inscrire dans un renouveau démocratique. Il s’est engagé à laisser « des infrastructures nouvelles, de grands chantiers et une réforme du système politique ». Le président a reconnu avec humilité que son parcours n’était pas parfait, mais porteur d’espoir : « Même si je n’ai pas tout réussi, j’aurais eu le mérite de montrer aux Algériens que cela était possible. La voie sera tracée. Ce sera aux générations futures de parachever le travail ». Sur le plan économique, Tebboune affiche un optimisme prononcé. Il prédit qu’avec la grâce divine, l’Algérie deviendra probablement dans deux ans un pays émergent, au niveau des pays du Sud de l’Europe, avec un PIB dépassant les 400 milliards de dollars. Ses perspectives sont précises : « Début 2027, tout au plus, nous aurons achevé la construction de notre programme de 3,5 millions de logements – deux millions sont déjà livrés -, nous en aurons aussi terminé avec le problème de l’eau et nous aurons réduit l’importation de matières premières pour nos usines ». Le président a détaillé ses ambitions industrielles : « Notre objectif est de fabriquer le maximum de produits sur place. Nous allons être parmi les plus grands pays exportateurs de phosphates et dérivés. Nous allons aussi développer l’énergie solaire et la production d’hydrogène vert, une nouvelle ressource qui renforcera l’attractivité industrielle de l’Algérie ». Ces projets visent non seulement à diversifier l’économie algérienne mais aussi à renforcer sa position énergétique internationale. Concernant les relations internationales, Tebboune a été particulièrement critique envers la France, rejetant catégoriquement ses aides au développement. « C’est de l’ordre de 20 à 30 millions par an. Le budget de l’État algérien est de 130 milliards de dollars et nous n’avons pas de dette extérieure », a-t-il souligné. Il a clairement affirmé : « Nous n’avons pas besoin de cet argent qui sert avant tout les intérêts d’influence extérieure de la France ». En revanche, il a salué la coopération avec d’autres pays, notamment la Chine et l’Italie. Sur les opérateurs chinois, il a déclaré : « Ils s’intéressent à de nombreux secteurs d’activité : des technologies de pointe à l’électronique en passant par le numérique, les batteries au lithium ». Quant à l’Italie, il a affirmé : « Nos amis italiens sont de bonne foi. On s’aide réciproquement et l’Italie renforce ses positions économiques chaque année ». Sur le plan politique intérieur, Tebboune a annoncé une série de réformes consensuelles : « Nous allons trouver un consensus pour réformer la loi sur les partis, le système électoral, les codes régissant les communes et les wilayas. Nous allons aussi renforcer l’économie de ces régions en créant une banque des collectivités locales ».
Concernant l’Union européenne, sa demande de révision de l’accord d’association répond à une ambition claire : permettre aux produits industriels et agricoles algériens d’accéder au marché européen dans des conditions préférentielles. « Notre ambition exportatrice s’affirme. En 2005, nous n’avions guère de production en dehors des hydrocarbures. Aujourd’hui, nous avons une production industrielle nationale », a-t-il souligné. Ce portrait présidentiel révèle un dirigeant conscient des défis, pragmatique dans ses approches et ambitieux pour son pays. Tebboune semble déterminé à transformer l’Algérie, en jetant les bases d’un développement économique diversifié et d’un système politique plus ouvert, tout en préservant son indépendance nationale.
Samir Benisid