L’attitude de Bamako dans l’incident du drone provoque une crise au Sahel: La riposte ferme d’Alger
L’Algérie vient de prendre des mesures diplomatiques et sécuritaires sans précédent en réaction l’attitude et les provocations de la Junte de Bamako.
Au cœur de cette crise se trouve l’instrumentalisation par les putschistes maliens d’un incident survenu dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, lorsqu’un drone malien a été abattu après avoir pénétré l’espace aérien algérien pour porter de graves accusations parfaitement infondées à l’encontre de l’Algérie. Cet événement, loin d’être isolé, s’inscrit dans une série de provocations qui ont poussé Alger à adopter une position de fermeté absolue face aux manœuvres hostiles orchestrées par la junte militaire malienne et ses alliés régionaux et extrarégionaux. Le ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines a officiellement exprimé sa « grande consternation » concernant les communiqués diffusés par le gouvernement malien et le collège des Chefs d’État de la CES. Dans sa réponse, Alger a rejeté catégoriquement les allégations des putschistes, les qualifiant de « mensongères » et visant simplement à dissimuler « l’échec manifeste de ce qui demeure un projet putschiste qui a enfermé le Mali dans une spirale de l’insécurité, de l’instabilité, de la désolation et du dénuement. »
Clique inconstitutionnelle
L’Algérie a particulièrement dénoncé une tentative de la part de Bamako de faire d’elle un « bouc émissaire » pour ses propres échecs. Le communiqué du MAE affirme sans ambages que « l’échec de cette clique inconstitutionnelle est patent à tous les niveaux, politique, économique et sécuritaire. Les seuls succès dont cette même clique peut se prévaloir sont ceux de la satisfaction d’ambitions personnelles au prix du sacrifice de ceux du Mali, de l’assurance de sa survie au détriment de la protection du Mali et de la prédation des maigres ressources de ce pays frère aux dépens de son développement. »
Face aux accusations maliennes hallucinantes établissant un lien entre l’Algérie et le terrorisme, Alger a réagi avec force, soulignant que « la crédibilité, l’engagement et la détermination de l’Algérie dans la lutte contre le terrorisme n’ont besoin ni d’être justifiés, ni d’être établis. » Le ministère des Affaires étrangères a retourné l’accusation en affirmant que « la première menace et la plus déterminante sans doute qui pèse sur le Mali aujourd’hui réside dans l’incapacité des putschistes à assumer la lutte anti-terroriste réelle et effective, au point d’en confier la gestion au mercenariat dont l’Afrique a tellement pâtit dans son histoire récente. »
Concernant l’incident du drone, l’Algérie a fourni des précisions techniques et chronologiques détaillées, maintenant fermement sa position. Le ministère a souligné que « toutes les données se rapportant à cet incident sont disponibles dans la banque de données du Ministère algérien de la Défense Nationale, en particulier les images radar qui établissent clairement la violation de l’espace aérien de l’Algérie. » Plus significatif encore, Alger a révélé qu’il ne s’agissait pas d’une première violation, mais bien de « la troisième en l’espace de seulement quelques mois », les précédentes ayant eu lieu le 27 août 2024 et le 29 décembre 2024. Le rapport détaillé de l’incident du 31 mars indique que le drone malien a « violé l’espace aérien de l’Algérie à minuit huit minutes sur une distance de 1,6 km », avant de s’éloigner puis d’y « retourner en prenant une trajectoire offensive. » Cette séquence d’actions a conduit à sa qualification comme « manœuvres d’hostilité caractérisée », justifiant ainsi l’ordre de destruction émis par le Commandement des Forces de Défense Aérienne algériennes. En réponse à ces événements et aux communiqués hostiles du Mali, du Niger et du Burkina Faso, l’Algérie a pris plusieurs mesures diplomatiques significatives. Le gouvernement algérien a exprimé son profond regret face à « l’alignement inconsidéré du Niger et du Burkina Faso sur les thèses fallacieuses présentées par le Mali » et condamné « le langage outrancier et injustifié tenu à l’égard de l’Algérie. » En conséquence, Alger a décidé de rappeler pour consultation ses ambassadeurs au Mali et au Niger, tout en différant la prise de fonction de son nouvel ambassadeur au Burkina Faso.
Fermeture de l’espace aérien
De son côté, le ministère de la Défense nationale a annoncé une mesure radicale : « Face aux violations répétées par l’État du Mali de notre espace aérien, le Gouvernement algérien a décidé la fermeture de ce dernier à la navigation aérienne en provenance ou à destination de l’État du Mali, et ce, à partir d’aujourd’hui 07 avril 2025 (hier). » Cette escalade s’inscrit dans un contexte régional particulièrement complexe. Le Sahel est devenu un théâtre d’influences étrangères multiples, avec la présence croissante des mercenaires russes du groupe Wagner, l’implication grandissante des Émirats arabes unis à travers des aides financières et militaires, les interférences de Rabat qui mène un rapprochement peur orthodoxe avec Bamako et désormais l’entrée en scène de Sadat, une société militaire privée turque, fournissant notamment des drones Baykar au Mali.
L’incident du drone illustre parfaitement la « tolérance zéro » adoptée par l’Algérie face à toute menace transfrontalière. Le communiqué du ministère de la Défense nationale avait d’ailleurs souligné que la semaine dernière que « cette opération de qualité confirme, une nouvelle fois, la grande vigilance et la disponibilité permanente des unités de l’Armée nationale populaire de préserver nos frontières terrestres, aériennes et navales, de toute menace qui porte atteinte à la souveraineté nationale. » Les observateurs notent que l’Algérie a historiquement joué un rôle de stabilisateur dans la région et un rôle clé dans la médiation des conflits maliens pendant plus d’une décennie et n’a cessé de dénoncer l’usage de mercenaires et de drones armés dans la région, considérés comme des menaces directes pour la stabilité sahélienne. La réaction algérienne traduit une exaspération face à aux provocations des autorités maliennes.
Certaines analyses soulignent d’ailleurs que l’attitude des autorités maliennes face à l’incident du drone, alors même qu’elles semblent incapables de mener une enquête approfondie ou d’accéder au lieu du crash, relève davantage de la « gesticulation médiatique » que d’une véritable démarche diplomatique.
La fermeture de l’espace aérien algérien aux avions maliens représente une mesure aux conséquences potentiellement lourdes pour Bamako, tant sur le plan économique que diplomatique. Elle illustre la détermination d’Alger à ne pas laisser sans réponse des provocations inacceptables. Alger semble déterminée à défendre fermement sa souveraineté et ses intérêts nationaux, tout en dénonçant ce qu’elle perçoit comme des manipulations orchestrées par des puissances extérieures cherchant à déstabiliser davantage la région pour servir leurs propres agendas.
Salim Amokrane