Projet de loi sur la lutte contre le narco-trafic : L’Algérie durcit sa législation
Face à l’ampleur croissante du fléau de la drogue qui menace la sécurité nationale et la stabilité sociale, l’Algérie procède à une refonte majeure de son arsenal juridique en matière de lutte contre les stupéfiants. Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, a présenté mardi devant les membres du Conseil de la Nation un projet de loi modifiant et complétant la loi 04-18 relative à la prévention et à la répression de l’usage et du trafic illicites de drogues et de substances psychotropes, marquant ainsi un tournant décisif dans l’approche gouvernementale de cette problématique. Selon le ministre Boudjemaa, ces nouvelles dispositions « visent à protéger la sécurité nationale des dangers de l’usage et du trafic de drogues et de substances psychotropes » par « le traitement approfondi et répressif de tous les dysfonctionnements sociétaux qui en résultent en adoptant des mécanismes de prévention et de sensibilisation ». L’une des innovations majeures du projet de loi concerne l’obligation de tests de dépistage pour l’accès à l’emploi public. Le ministre a précisé que le texte prévoit « la définition de nouveaux mécanismes susceptibles de protéger les organismes publics et les institutions d’utilité publique ainsi que les institutions et organismes relevant du secteur privé, où il est exigé de présenter des analyses médicales négatives pour la non-consommation de drogues et de substances psychotropes dans les dossiers des candidats aux concours de recrutement dans les organismes et institutions mentionnés ». Le volet éducatif n’est pas en reste avec l’introduction de dispositifs de dépistage dans les établissements scolaires. La loi modifiée stipule que « les examens de santé périodiques des élèves dans les établissements éducatifs, d’enseignement et de formation peuvent inclure des analyses pour détecter les indicateurs précoces de consommation de drogues, après accord de leurs représentants légaux ou, le cas échéant, accord du juge des mineurs compétent ». L’accompagnement post-carcéral constitue un autre pilier de cette réforme législative. En vertu des nouvelles dispositions, les mesures de prévention seront étendues pour inclure les condamnés dans des affaires de drogues et de substances psychotropes libérés après avoir purgé leur peine, qui « bénéficient d’un accompagnement des services de l’administration pénitentiaire spécialisés dans la réinsertion sociale des détenus ». Le renforcement des capacités d’enquête et de poursuite représente un aspect crucial de cette réforme. Le nouveau texte comprend des dispositions « qui aident au suivi efficace des crimes de drogues et de substances psychotropes et des fonds qui en résultent, et qui permettent d’enquêter sur les sources des fonds mobiliers et immobiliers de l’accusé ou du suspect d’avoir commis un crime parmi les crimes prévus dans cette loi, que ces fonds se trouvent sur le territoire national ou à l’étranger et l’empêcher de voyager jusqu’à l’achèvement des procédures d’enquête ou la décision sur l’affaire ». La dimension la plus discutée de cette réforme concerne l’introduction de la peine capitale pour les crimes de drogue les plus graves. Le projet de loi propose « d’imposer la peine de mort dans les crimes de drogues et de substances psychotropes graves, si le crime commis conduit directement à la mort, ou s’il est susceptible de causer des dommages graves à la santé publique ou s’il s’accompagne de circonstances qui augmentent sa gravité et ses effets sur la société ». Cette disposition marque un durcissement sans précédent de la législation algérienne en matière de stupéfiants et témoigne de la détermination des autorités à dissuader les trafiquants les plus dangereux. Le ministre Boudjemaa a souligné que ces dispositions nouvelles « établissent un équilibre entre les mesures préventives et thérapeutiques et l’aspect dissuasif », reflétant une approche holistique qui combine prévention, soins et répression.
Chokri Hafed