Ould Kaddour extradé
L’ex-PDG de Sonatrach est arrivé hier à Alger
Fin de cavale pour l’ex-PDG du groupe Sonatrach, Abdelmoumène Ould Kaddour.
En effet, l’ancien patron de la compagnie nationale des hydrocarbures arrêté par les services de sécurité émiratis a été extradé, hier, vers l’Algérie. C’est du moins ce qu’a annoncé, hier, la radio algérienne. Une extradition qui permettra, selon des sources judiciaires, le jugement d’Abdelamoumen Ould Kaddour qui a fait l’objet d’un mandat d’arrêt international pour deux affaires traitées par le pôle financier du tribunal de Sidi M’hamed, soit l’attribution douteuse de marchés de gré-à-gré à BRC (Brown Root Condor) et l’acquisition par Sonatrach de la Raffinerie d’Augusta. L’ex-premier responsable de Sonatrach a été appréhendé par la police émiratie à l’aéroport de Dubaï, en provenance de Paris et devait se rendre à Mascat, à Oman, rappelons-le au mois de mars dernier. Il y a lieu de rappeler dans ce sens que l’ancien Premier ministre, Abdelaziz Djerad, avait annoncé, le 24 février dernier, à partir de Hassi Messaoud que «le Pôle pénal économique et financier a ouvert une enquête sur l’affaire de la raffinerie d’Augusta, dans laquelle un mandat d’arrêt international a été émis contre le principal accusé».
Sachant qu’Ould Kaddour est considéré comme étant la boite à pandore de l’homme fort du régime Bouteflika, l’ex-ministre de l’Énergie et des mines, en l’occurrence Chakib Khelil, qui est installé, depuis 2018, aux Etats Unis d’Amérique (USA). Chakib khelil, sa femme et son fils Sinai font l’objet de mandats d’arrêts internationaux lancés par le pôle financier du tribunal de Sidi M’hamed. Et pour cause, l’ex-ministre de l’Énergie est cité dans l’affaire dite Sonatrach 1 et 2. Et Ould Kaddour est un proche de l’ex-ministre Chakib Khelil qui fut derrière sa nomination à la tête de la société mixte algéro-américaine BRC.
Ceci dit, Ould Kaddour a déjà été condamné en 2007 à 30 mois de prison par le tribunal militaire de Blida pour «divulgation d’informations classées secret défense», dans le cadre de l’affaire BRC, voit rouvert le dossier de l’attribution des marchés de gré à gré par plusieurs départements à l’époque où il était aux commandes de l’entreprise algéro-américaine. Mais le plus gros dossier que la Justice aura à traiter est celui de la raffinerie d’Augusta. Après avoir été réhabilité par le régime de l’ex-Président Bouteflika, Abdelmoumène Ould Kaddour a été nommé, en 2017, P-DG de la Sonatrach. En 2018, celui-ci finalise l’acquisition, par la compagnie nationale des hydrocarbures, de la raffinerie italienne d’Exxon mobil. Une transaction qui avait fait scandale dès l’annonce. Au cours des premiers mois de 2018, Ould Kaddour annonçait en grandes pompes, via plusieurs canaux étrangers, que Sonatrach s’offrait la raffinerie d’Esso Italia, filiale de la major US Exxon Mobil, à Syracuse en Sicile, pour la bagatelle de 750 millions de dollars. Cette transaction inclut également les trois terminaux pétroliers de Palerme, Naples et Augusta, ainsi que des participations dans des pipelines reliant la raffinerie aux différents terminaux. A l’époque le désormais ex-P-DG de la Sonatrach assurait que cette transaction permettait à la Sonatrach de mettre la main sur des infrastructures stratégiques en Méditerranée, en plus d’assurer le processing du pétrole algérien afin de mettre fin à l’importation des carburants.
Or, tous ces arguments avaient été battus en brèche par les experts financiers dès le départ puisqu’ils s’étonnaient d’abord du fait que la Sonatrach puisse acheter pour près d’un milliard de dollars une raffinerie vieille de plus de 70 ans, et qui avait nécessité un investissement supplémentaire de 100 millions de dollars pour sa maintenance, et d’autres fonds pour répondre aux engagements en matière d’environnement. Des financements que la compagnie nationale a d’ailleurs dû mobiliser sur un emprunt auprès de l’Apicorp. Autrement dit, c’est la pertinence voir même l’opportunité de cette acquisition qui avait été remise en cause. Les experts s’étonnaient, également, du fait que cette raffinerie puisse être le fer de lance de la stratégie d’internationalisation de la Sonatrach qui reprenait alors une structure qu’Esso peinait à vendre sur un marché du raffinage déjà en surcapacité. Last but not least, l’argument du processing du pétrole algérien vole en éclat, car la raffinerie d’Augusta est adaptée pour le traitement des pétroles lourds du Moyen-Orient et non le pétrole algérien léger et à faible teneur en soufre. Le groupe Sonatrach a dû signer un contrat d’approvisionnement avec Saudi Aramco pour faire faire fonctionner la raffinerie et ses personnels qui coûtent une masse salariale annuelle de 10 milliards de DA. Et pour ne rien arranger au scandale, la Sonatrach n’a, à aucun cas, fait main basse sur la propriété des structures de stockage et les quais qu’Ould Kaddour agitait comme appât. Elle y accède via des concessions et des participations sur une partie des infrastructures. Le tribunal de Sidi M’hamed avait ouvert le dossier de la raffinerie d’Augusta en juillet 2020. L’ancien vice-président commercialisation du groupe Sonatrach Ahmed Mazighi a été entendu dans l’affaire. Il est depuis en détention provisoire.
Faiçal Bedjaoui