Sahara Occidental : Les Espagnols tancent Pedro Sanchez
Des milliers de personnes ont manifesté hier à Madrid pour dénoncer le revirement du chef du gouvernement espagnol sur la question du Sahara occidental. Un revirement légitimement perçu comme une capitulation face au chantage du Makhzen
Le revirement unilatéral du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, continue à faire l’objet de condamnations et de dénonciations, émanant aussi bien des organisations non gouvernementales que des personnalités politiques et des groupes de parlementaires, espagnols et étrangers. Le président du Comité action et réflexion pour l’avenir du Sahara occidental, Najem Sidi, a indiqué que ««le référendum d’autodétermination restait la seule solution pour sortir de l’impasse». Il a expliqué qu’il est «nécessaire de revenir à la légalité internationale». «C’est une obligation morale et politique pour l’Espagne », a-t-il précisé dans une lettre qu’il a expédiée au Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez. La même source a exprimé son étonnement d’apprendre «la volte-face de votre gouvernement (espagnol) en faveur du plan marocain d’autonomie et en détournant le dos à la légalité et au droit internationaux», se disant «étonné par l’attitude du gouvernement espagnol qui a succombé aux pressions et chantages du Maroc». Le président du Comité action et réflexion pour l’avenir du Sahara occidental a déploré le fait que «l’Espagne s’est alignée in extenso sur la position marocaine soutenant le soi-disant plan d’autonomie pour le Sahara occidental». «Sachez que le seul grand perdant dans cette affaire, ce sont les Espagnols », a-t-il ajouté. Estimant cette «situation intolérable », le président du Comité action et réflexion pour l’avenir du Sahara occidental l’a qualifié d’ « affront, non seulement pour le peuple sahraoui qui se bat les armes à la main pour défendre ses droits légitimes à l’autodétermination et à l’indépendance, mais aussi pour tous ceux qui ont à cœur la justice et la liberté». Najem Sidi considère que «ce revirement donne l’impression que c’est le Maroc qui contrôle la prise de décisions des autorités espagnoles ». «Ce sera un leurre d’imaginer un instant que le Maroc renoncera aux enclaves de Ceuta et Melilla. Car il associe l’avenir de ces deux enclaves espagnoles au futur statut du Sahara occidental», a-t-il précisé. L’ancien chef du gouvernement espagnol et ex-président du Parti populaire (PP), José Maria Aznar, a critiqué la nouvelle position de son pays sur la question du Sahara occidental, la qualifiant «d’erreur historique». Intervenant sur les ondes de la radio locale RNE, Aznar a affirmé que «l’actuel chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, a envoyé un message de faiblesse au Maroc». «Nous en paierons le prix très clairement», a-t-il ajouté, expliquant que «la décision affecte les responsabilités historiques de l’Espagne par rapport au Sahara occidental». Il a également dénoncé une «insouciance très dangereuse et une erreur impardonnable, en adoptant cette décision sans consultation et sans discussion parlementaire préalable». «La décision est une erreur aux conséquences historiques et nous paierons un lourd tribut», a-t-il mis en garde. En Amérique latine et aux Caraïbes, plusieurs personnalités ont rendu une déclaration commune dans laquelle elles ont exprimé «leur solidarité avec le Front Polisario et le gouvernement sahraoui suite au revirement de l’Espagne sur la question du Sahara occidental». Le document souligne que «cette position déplorable était en violation du droit international». Cette déclaration est une réaction de l’ensemble de pays latino-américains et caribéens à la «trahison» du gouvernement de Pedro Sanchez. Elle regroupe notamment quelque 260 signataires, parmi lesquelles le prix Nobel de la paix, l’Argentin Adolfo Perez Esquivel, des dirigeants politiques, des députés, des congressistes, des défenseurs des droits de l’Homme, des académiciens et des personnalités issues du monde culturel et social. «Les peuples, les organisations sociales et le mouvement populaire d’Amérique latine et des Caraïbes veulent exprimer leur plus grande et plus large solidarité avec le Front Polisario et la République arabe sahraouie démocratique (RASD) face à la honteuse trahison du gouvernement espagnol et de son Premier ministre Pedro Sanchez contre la cause légitime du peuple sahraoui pour l’autodétermination et la pleine souveraineté sur son territoire», a-t-on indiqué. Les auteurs de cette déclaration affirment que «le gouvernement espagnol et le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), en soutenant la prétendue autonomie au Sahara occidental, appuient en pratique l’annexion coloniale illégale du Maroc, validant ainsi l’occupation militaire actuelle du territoire qui appartient historiquement au peuple sahraoui». Et d’ajouter que «cette décision est la manifestation d’une position déplorable qui viole le droit international et le principe d’autodétermination, et cautionne également les violations systématiques des droits de l’Homme dans les territoires occupés, perpétrées par les forces militaires et les agents de l’Etat marocain ». Les mêmes signataires détaillent la situation en faisant savoir que «Le conflit armé actuel entre l’armée d’occupation marocaine et l’armée populaire sahraouie, déclenché suite à la rupture du cessez-le-feu par le Maroc en novembre 2020, la nouvelle position du gouvernement de Pedro Sanchez traduit en pratique un soutien à la monarchie alaouite dans sa guerre contre la RASD». «Cela fait de l’Espagne le complice du Maroc dans la violation de l’intégrité territoriale du Sahara occidental», ont-ils tancé, condamnant «le discours hypocrite et «la politique de deux poids deux mesures de la diplomatie espagnole». « L’Espagne, en tant que membre de l’Union européenne et de l’OTAN, condamne l’opération militaire de la Russie en Ukraine, qu’elle qualifie d’agression qui viole l’intégrité territoriale de ce pays et d’autre part, elle soutient l’annexion et l’occupation illégale du Sahara occidental en appuyant la proposition d’autonomie du Maroc sur le territoire appartenant au peuple sahraoui», ont dénoncé les mêmes signataires.
Salim Abdenour