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Une crise migratoire provoquée pour justifier l’interventionnisme militaire occidental : Le Makhzen, cheval de Troie de l’Otan en Afrique

Le massacre de migrants africains par les forces de répression marocaines à Melilla suscite l’indignation de la société civile internationale et de l’Afrique. Pourtant, l’Occident, si  prompts d’habitude à s’arroger le statut de défenseur des valeurs universelles et des droits de l’Homme, se refuse à condamner fermement un véritable crime contre l’Humanité. Au contraire, il veut faire de cette énième crise migratoire orchestrée par le Makhzen un justificatif pour consolider son interventionnisme militaire en Afrique, particulièrement au Sahel. 

C’est un véritable crime contre l’Humanité qui a été perpétrée par le régime marocain à la frontière avec l’enclave espagnole de Melilla. Bien que le bilan officiel de la répression violente qui s’est abattue sur les 2.000 migrants qui ont pris d’assaut l’enclave espagnole, dans un acte désespéré, soit de 23 morts, il est clair que le massacre a fait beaucoup plus de victimes. Vendredi, l’ancien ministre des droits de l’Homme sous Hassan II, Mohamed Ziane, jette un pavé dans la marre lors d’une manifestation dénonçant le massacre. Selon le propos de ce dernier, relayé par un tweet du journaliste marocain Ali Lemrabet, « le massacre a fait au moins 100 morts ». Un massacre qui a d’ailleurs suscité l’indignation de la société civile, mais aussi de l’Union africaine.  Ainsi, plusieurs manifestations ont secoué les villes marocaines et espagnoles pour exiger une plus grande réaction internationale pour dénoncer ce crime innommable et une enquête totalement indépendante pour faire toute la lumière sur les événements de Nador. Un désaveu pour toute la propagande makhzenienne qui cherche à trouver des justificatifs à l’injustifiable et à trouver dans les théories complotistes les plus fantaisistes le moyen d’impliquer l’Algérie dans des évènements qui n’ont pour racine que l’irrespect qu’affiche le régime marocain aux droits de l’Homme, à la vie humaine et le zèle dont il fait preuve pour se mettre au service d’agendas étrangers. Au-delà du fait que le Makhzen a, à plusieurs reprises, démontré la manière dont il use de la question migratoire dans le cadre de calculs politiques et qu’il a procédé à plusieurs reprises à des « lâchers » prémédités de migrants sur les deux enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla situées dans la région de Nador, c’est l’instrumentalisation des évènements de Melilla lors du sommet de l’Otan à Madrid qui interpelle aujourd’hui. Il apparaît aujourd’hui que ce n’est pas un hasard que les événements dramatiques de Melilla tiennent place à quelques jours de ce sommet. Et c’est la déclaration du ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, qui révèle toute l’insidiosité de la démarche. Après avoir joué en vain la carte de l’Union européenne dans sa confrontation avec l’Algérie, Albares cherche à jouer la carte atlantiste pour consolider l’assise d’un gouvernement Sanchez en perdition, face à une fronde parlementaire qui prend de l’ampleur. Lors du Sommet de Madrid, le chef de la diplomatie espagnole a affirmé ne pas exclure une intervention de l’Otan au Mali qui serait justifiée par les problèmes migratoires. « Si [les problèmes liés à l’immigration clandestine et au terrorisme au Mali] représentaient une menace pour notre sécurité, nous le ferions», a affirmé une dépêche de l’Agence France presse. 

Le Makhzen contre l’Afrique

Un propos étonnant dans la mesure où les phénomènes migratoires ne sont pas le propre du Mali. Plus encore, le chantage à la migration exercé par le Makhzen contre l’Espagne et qui a été parfaitement illustré lors de la crise migratoire de mai 2021, lorsque le Maroc avait lâché plus de 10.000 migrants marocains, en majorité des mineurs, sur Ceuta n’avait pas justifié un tel propos. Un chantage migratoire qui n’avait pas été assimilé à « une menace » sérieuse au point de justifier un interventionnisme militaire à l’époque ! Le fait est que le jeu joué par le régime marocain et le gouvernement Sanchez est limpide. Il s’agit d’instrumentalisation pour s’inscrire dans la nouvelle feuille de route de l’Otan qui profite de son redéploiement militaire en Europe pour consolider aussi bien le front Est que le front Sud avec un repositionnement des troupes en Italie et en Espagne, avec un intérêt croissant pour le redéploiement de la Chine et de la Russie en Afrique. Le Mali qui a récemment décidé d’éjecter les troupes françaises et de mettre fin à l’intervention militaire européenne après son échec cuisant sur le front de la lutte contre le terrorisme, semble être devenu le terrain d’expérimentation idéal pour la confrontation entre le bloc Est et le bloc Ouest, quitte a créer un nouveau bourbier et aggraver l’instabilité au Sahel. Les Maliens ont d’ailleurs fermement dénoncé le propos des Espagnols. Bamako qui a convoqué immédiatement l’ambassadeur d’Espagne a souligné que « ces propos sont inacceptables, inamicaux, graves [parce qu’] ils tendent à encourager une agression contre un pays indépendant et souverain ». Le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a indiqué lors d’un entretien à la télévision malienne que « la situation actuelle d’insécurité et d’expansion du terrorisme au Sahel est surtout liée à l’intervention de l’OTAN en Libye, dont nous payons encore les conséquences.»  La messe est dite, le Sahel a besoin de paix et non d’une nouvelle intervention de l’Otan. En tout état de cause, cette affaire démontre, si besoin est, le rôle que le Maroc joue en Afrique au service des agendas atlantistes. Hier, la commission africaine des droits de l’Homme et des peuples s’est dite « profondément consternée » et  a déploré le recours excessif à la force par la police marocaine contre les migrants africains. Il est cependant nécessaire de se pencher aujourd’hui sur le rôle joué par le Maroc et le régime du Makhzen en Afrique et au sein des instances panafricaines, d’autant qu’à travers cette dernière sortie et le lobbying actif mené par le Makhzen pour introduire l’entité sioniste en sein de l’UA, sa tendance à entretenir les divisions africaines, en sus de son refus obstiné de se soumettre aux règlements de l’UA et son acte constitutif démontrent que le régime marocain est un véhicule des politiques néocoloniales occidentales et est devenu le cheval de Troie de l’Otan en Afrique. 

Chokri Hafed

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