Documents gouvernementaux touchant à la « sécurité de l’État » : Les parlementaires tenus à l’obligation du secret
L’avant-projet de loi modifiant la loi organique fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation interdit aux parlementaires de publier ou transmettre aux médias les documents transmis par le Gouvernement dans le cadre de leurs missions.
L’avant-projet de loi modifiant la loi organique n° 16-12 du 25 août 2016 fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Populaire Nationale et du Conseil de la Nation ainsi que les relations fonctionnelles entre les chambres du Parlement et le Gouvernement est fin prêt. Attendu au lendemain des élections législatives de juin 2021, le texte est finalement programmé pour l’actuelle session, qui, faut-il le rappeler, avait été ouverte le 4 septembre dernier. Entre autres nouveautés introduites, le texte stipule qu’une proposition de loi peut être déposée par un seul député ou sénateur et non par 20 comme c’est le cas dans la loi en vigueur qui stipule dans son article 22 que «sous réserve des dispositions de l’article 137 de la Constitution, toute proposition de loi doit être signée par vingt (20) députés ou vingt (20) membres du Conseil de la nation». Il est désormais mentionné dans l’article en question que «sous réserve de l’article 144 de la Constitution, tout député ou membre du Conseil de la Nation peut proposer une loi». L’objectif étant d’accorder une plus grande marge de manœuvre pour les députés et sénateurs pour ce qui est des propositions de lois. Bien entendu, avant toute chose, il est question de mettre en conformité cette loi organique avec la nouvelle Constitution dans ses dispositions relatives au fonctionnement de l’APN et du Sénat.
L’avant-projet de loi permet aussi aux députés d’«interpeller» l’Exécutif sur n’importe quel sujet revêtant un intérêt national, « hormis les questions liées à la défense nationale et les secrets d’Etat dans les relations internationales». Dans la loi en vigueur, il est mentionné, dans l’article 66, que «les membres du Parlement peuvent interpeller le Gouvernement sur une question d’actualité». «Le texte de l’interpellation, signé, selon le cas, par trente (30) députés ou trente (30) membres du Conseil de la Nation, au moins, est communiqué au Premier ministre par le Président du Conseil de la Nation ou celui de l’Assemblée Populaire Nationale, dans les quarante-huit (48) heures suivant sa recevabilité», ajoute-t-on encore. A l’issue du conseil des ministres qui s’est tenu le 11 septembre dernier, la Présidence de la République avait indiqué, dans un communiqué, concernant ce projet de loi, que «le Président a mis l’accent sur l’importance de la relation fonctionnelle entre les deux chambres du Parlement et le Gouvernement ». Le chef de l’Etat a insisté, ajoute-t-on encore, «sur l’audition des membres du Gouvernement dans tous les domaines, à l’exception de la Défense nationale et des secrets d’Etat dans les relations extérieures, étant des domaines soumis au droit de réserve». L’Exécutif a, dans le même ordre, introduit un article, 87 bis, qui stipule que «le Gouvernement remet au Parlement, dans l’exercice de ses missions de contrôle, les documents et informations qu’il demande». Néanmoins, ajoute-t-on encore, «le membre du Parlement s’engage à ne pas diffuser, dans n’importe quel média, les informations ou documents qui sont susceptibles de porter atteinte aux intérêts de l’Etat et à l’ordre public». L’article 87 de la loi organique en vigueur stipule que «la publication de tout ou partie du rapport peut être décidée par l’Assemblée Populaire Nationale ou par le Conseil de la Nation, sur proposition de leur bureau et des présidents des groupes parlementaires, après avis du Gouvernement». L’article 87 bis 1 de l’avant-projet de loi indique encore que «n’est pas concerné par l’application des dispositions de l’article 87 bis, les informations et documents revêtant un caractère secret et stratégique en relation avec la défense nationale, la sûreté de l’Etat, intérieure et extérieure, aux intérêts vitaux de l’économie nationale, et ceux en lien avec des faits qui sont sous le coup d’une procédure judiciaire».
Autre nouveauté, le nouveau texte a introduit également la «procédure d’urgence», comme énoncé dans la Constitution. L’article 119 de la Loi fondamentale du pays stipule que «le Gouvernement peut demander au Parlement l’adoption de projets de loi selon la procédure d’urgence». A cet effet, l’article 37 bis de l’avant-projet de loi stipule que «le Gouvernement peut demander aux deux chambres du Parlement l’adoption de lois selon la procédure d’urgence». «L’examen de ces lois est prioritaire», ajoute l’article en question. L’article 37 bis 1 précise, par ailleurs, que «l’adoption de lois selon la procédure d’urgence est une mesure exceptionnelle». En dernier lieu, le nouveau texte n’a pas apporté de nouveauté concernant les questions orales et écrites, notamment pour ce qui est des délais que devraient respecter les membres du Gouvernement, comme réclamé par plusieurs députés. Il devra néanmoins être débattu au niveau de la commission juridique qui éventuellement pourrait soumettre des propositions dans ce sens.
Elyas Nour