La situation des droits de l’Homme des plus inquiétantes au Maroc : Voilà comment le Makhzen traite les journalistes dans ses prisons
Si la situation des droits de l’homme au Maroc est déjà en soi catastrophique, et bien elle est au moins trois fois plus terrible dans les geôles de cette monarchie moyenâgeuse que certains médias occidentaux s’entêtent encore à présenter comme un modèle à suivre. Sommées par Mohammed VI de faire taire les voies discordantes à n’importe quel prix, la police politique du Makhzen y réserve les pires sévices aux voies discordantes. Un traitement particulièrement brutal et dégradant est infligé aux journalistes et plus généralement aux détenus d’opinion. Très peu de personnes sortent indemnes d’un séjour dans une prison marocaine. Les autorités marocaines sont connues pour avoir une longue expérience en matière de torture et d’assassinats de prisonniers politiques. La littérature sur ce sujet horrible est d’ailleurs très foisonnante.
Il s’agit là du constat glaçant établi par l’Observatoire Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme qui s’est intéressé à la situation des journalistes incarcérés dans les prisions de Mohammed VI. Dans un communiqué rendu public lundi, cet organisme affirme que les professionnels des médias marocains embastillés vivent dans des conditions horribles et absolument « contraires à toutes les normes internationalement admises ». Et la remarque vaut pour tous les détenus d’opinion. En clair, cela veut dire que le Makhzen et son armée de tortionnaires réservent un traitement particulier aux journalistes auxquels ils veulent faire payer leur engagement pour la liberté de la presse. Au Maroc, les journalistes sont dans la plupart des cas emprisonnés sur la base de dossiers vides ou d’éléments à charge créés de toutes pièces. « Les autorités marocaines ne se contentent pas de condamner à de lourdes peines et d’emprisonner des journalistes après des procès entachés de graves violations de la loi. Elles s’emploient aussi à restreindre leurs droits fondamentaux pour compliquer leurs conditions de détention, en confisquant leurs productions intellectuelles, en entravant les échanges avec leurs familles et en violant leurs droits (…)», alerte l’Observatoire Euro-méditerranéen des droits de l’homme.
Tortures morales et brutalités
L’ONG souligne, à ce propos, que très souvent les journalistes détenus payent cher quand leurs familles se plaignent publiquement des blocages de l’administration pénitentiaire et de la misère endurée par leurs proches en prison. Ils font l’objet, indique la même source, de mesures punitives. Les rédacteurs du communiqué de l’Observatoire Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme affirment que «les conditions de détention des journalistes dans les prisons marocaines peuvent s’apparenter à de la torture psychologique », expliquant que « les autorités restreignent délibérément l’exercice des droits les plus élémentaires des détenus dans une tentative apparente de les assujettir et d’intimider les autres pour augmenter le coût de la critique et de l’expression ».
La famille du journaliste Taoufik Bou Asreen, actuellement détenu à la prison Arjat 2, en sait quelque chose. Elle a confié à l’équipe de l’Observatoire Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme que « l’administration pénitentiaire a confisqué les journaux de Tawfiq et un projet de livre qu’il préparait à l’intérieur de la prison, cela en plus de lui avoir interdit d’appeler sa famille pendant plusieurs jours. A noter que Taoufik Bou Asreen souffre depuis avril dernier d’une hyperglycémie. Son état a nécessité son transfert hors de la prison pour recevoir des soins médicaux. L’administration pénitentiaire a accepté le principe du transfert à la condition néanmoins qu’il porte les habits dont sont revêtus les criminels et qu’il reste menotté pendant la visite médicale, ce que Tawfiq Bou Asreen a refusé catégoriquement. La visite a donc été annulée. Le journaliste est resté depuis sans soins médicaux. « Tu peux crever », lui aurait-on dit.
Bien qu’extrêmement difficiles, les conditions dans lesquelles vit Tawfiq Bou Asreen sont apparemment un paradis par rapport à celles endurées par le journaliste Souleiman Raissouni, directeur de publication du quotidien Akhbar Al Youm. Souleiman est une plume connue pour ses éditoriaux critiques demandant des réformes politiques au Maroc. L’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’Homme rapporte qu’il a tellement été maltraité et traumatisé qu’il a sombré dans un état d’ « isolement psychologique ». Son épouse, Kholoud Mokhtari a indiqué sur sa page Facebook qu’il a refusé de sortir de sa cellule pour la voir, une manière à lui de protester contre les traitements horribles dont il a été victime.
Preuves bidonnées et procès iniques
A rappeler Souleimane Raissouni a pris la tête de la rédaction d’Akhbar Al Yaoum en 2018 après la condamnation de son directeur de la publication, Taoufik Bouachrine, à quinze ans de prison pour «viol, tentative de viol et traite d’êtres humains». Des accusations que l’intéressé qualifie de grotesques. Tout comme Omar Radi, un autre journaliste marocain avant lui, Souleimane Raissouni est arrêté par la police le 22 mai 2020, pour une prétendue affaire de mœurs qui a déclenché un mouvement de solidarité localement ainsi qu’à l’international. Il sera tout de même condamné le 9 juillet 2021 pour « viol avec violence et séquestration ». Décapité, Akhbar Al Yaoum cessera de paraître quelques jours après. Le Makhzen a atteint son but : faire taire la presse afin de piller le Maroc et les Marocains en toute impunité.
Le responsable des médias de l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’Homme, Nour Alwan, explique que le Makhzen a carrément pensé et mis en place une « politique de répression et d’isolement des journalistes détenus ». Celle-ci, ajoute-t-elle, vient en prolongement « de mesures illégales adoptées par les autorités » pour casser les journalistes indépendants, cela à commencer par « les jeter en prison sur la base de fausses accusations à l’issue de procès iniques ». C’est un peu les mêmes procédés utilisés par l’abominable junte militaire birmane avec les Rohingyas qu’elle cherche à exterminer. Une fois en prison, le Makhzen s’arrange pour que les embastillés n’en sortent plus. Il est beau le Maroc du Makhzen et de Mohammed VI…
Khider Larbi