Plus de gazoducs et un nouveau câble sous-marin : Alger et Rome renforcent leurs connexions
Une déclaration conjointe et quatre mémorandums d’entente dans plusieurs secteurs, ont été signés, hier, par l’Algérie et l’Italie, à l’occasion de la visite de travail et d’amitié en Algérie de la présidente du Conseil des ministres d’Italie, Georgia Meloni.
Deux de ces quatre mémorandums, qui concernent Sonatrach et le groupe italien ENI, visent « l’amélioration des réseaux de raccordement énergétique entre l’Algérie et l’Italie », et « la coopération technologique pour la réduction du torchage de gaz ». Ainsi, il est question de « l’extension de la capacité de transport de gaz existante, la pose d’un nouveau gazoduc pour transporter du gaz naturel et alternativement de l’hydrogène et de l’ammoniac bleu et vert, la pose d’un câble électrique sous-marin et l’extension de l’actuelle capacité de liquéfaction du gaz naturel ».
Des accords énergétiques qui revêtent une importance stratégique pour les deux parties et qui montrent tout l’intérêt que portent les autorités italiennes pour la coopération avec l’Algérie. La visite de la présidente du Conseil des ministres d’Italie, Mme Georgia Meloni, qui s’est achevée hier, a été une occasion donc pour passer en revue et consolider cette coopération que l’Algérie et l’Italie veulent renforcer, notamment dans le secteur énergétique, et élargir à d’autres secteurs d’activités. « Je tiens à saluer le niveau des relations stratégiques unissant l’Algérie et l’Italie, ainsi que les efforts consentis ces dernières années dans le sens de la consolidation du partenariat et de la promotion des échanges commerciaux qui ont enregistré des résultats exceptionnels en peu de temps », a indiqué le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors d’une conférence de presse conjointe, avec la présidente du Conseil des ministres italien, tenue à la fin de la cérémonie de signatures. « Le niveau des échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Italie est passé de 8 milliards de dollars en 2021, à 16 milliards de dollars, ce qui se veut un indicateur de rapprochement et le fruit des approches que nous avions adoptées pour consacrer une dynamique ascendante dans divers domaines de coopération », a-t-il encore ajouté. Il a encore indiqué qu’il avait « réaffirmé, lors des entretiens avec Mme Meloni, la détermination de l’Algérie à consolider sa place de partenaire stratégique de l’Italie en matière énergétique et à honorer ses engagements en tant que fournisseur régional et international fiable, de même que pour les investissements industriels italiens en Algérie ». Conscient qu’actuellement les italiens accordent une grande importance à la coopération énergétique, le gaz principalement, l’Algérie espère, indique Tebboune, que « l’Italie puisse être un hub pour les produits énergétiques, gaz, ammoniac ou hydrogène pour les autres pays italiens ».
Un hub pour les produits énergétiques algériens
D’ailleurs, pour ce qui est des deux mémorandums d’entente signés dans le secteur énergétique, la compagnie nationale Sonatrach a donné des détails relatifs à leurs contenus. « Le premier protocole d’intention stratégique vise à identifier les meilleures options pour accroître les exportations d’énergie de l’Algérie vers l’Europe, afin de garantir la sécurité énergétique tout en soutenant une transition énergétique durable », indique Sonatrach, dans un communiqué. « Il reposera, ajoute la compagnie, sur l’évaluation des quatre axes suivants : l’extension de la capacité de transport de gaz existante, la pose d’un nouveau gazoduc pour transporter du gaz naturel et alternativement de l’hydrogène et de l’ammoniac bleu et vert, la pose d’un câble électrique sous-marin et l’extension de l’actuel capacité de liquéfaction du gaz naturel ». A ce propos, le Président Tebboune, et tout en précisant que les deux parties ont signé ce mémorandum pour entamer les études, a précisé que ce « nouveau gazoduc, ne sera pas comme l’actuel, puisque en plus du gaz, il transportera de l’hydrogène et de l’ammoniac ». Il est question, a-t-il ajouté, de « fournir l’Italie » mais par-delà, « l’Europe ». Le deuxième mémorandum signé entre les deux compagnies « identifiera les opportunités de réduction des émissions de gaz à effet de serre en Algérie et les meilleures technologies pour mettre en œuvre une telle réduction », a encore indiqué Sonatrach.
Fiat à Oran et Vespa à Guelma
Quant aux deux autres accords signés hier, il s’agit d’un mémorandum d’entente « portant sur la coopération dans le domaine des activités spatiales à des fins pacifiques », paraphés entre l’Agence spatiale algérienne (ASAL) et son homologue italienne, et d’un autre entre le Conseil du renouveau économique algérien (CREA) et la Confédération économique et industrielle italienne, Confindustria, qui vise, entre autres, à renforcer la présence des entreprises italiennes en Algérie. Pour ce qui est des autres secteurs d’activités, Abdelmadjid Tebboune, a tenu à rappeler que le partenariat avec « Fiat » va se concrétiser au mois de mars prochain, avec l’entame de la production. Il a ajouté que des motos de la marque « Vespa » vont également sortir de l’usine de Guelma.
Dans tous les cas de figure, il est clair que l’Italie veut renforcer le partenariat avec l’Algérie et l’élargir à d’autres domaines. « Ce n’est pas un hasard si ma première visite en Afrique du Nord a concerné l’Algérie », a dit dans ce sens la présidente du Conseil des ministres d’Italie, Georgia Meloni, pour qui, ce dernier est « un partenaire fiable ». « Nous n’allons pas nous arrêter ici. Il faut renforcer le partenariat dans les domaines de l’énergie, économique, politique et culturel », a-t-elle encore déclaré, tout en rappelant que « l’Algérie est un partenaire très important, dans le cadre du plan Mattei pour l’Afrique ». D’ailleurs, elle a tenu à signaler que la signature de la déclaration conjointe intervient à l’occasion du vingtième anniversaire du « traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération » paraphé le 27 janvier 2003.
Palestine, Libye et Sahara occidental
Il est utile de rappeler qu’avant la cérémonie de signature de cette déclaration et mémorandums d’entente, le président de la République avait réservé un accueil solennel à la présidente du Conseil des ministres d’Italie, au siège de la Présidence de la République, avec laquelle il s’est entretenu en tête à tête par la suite. Des entretiens élargis aux délégations des deux pays se sont également tenus. Au-delà de la coopération économique, les deux parties ont certainement évoqué les questions géostratégiques régionales et internationales. A ce titre, le président de la République a profité de l’occasion, lors du point de presse, pour affirmer qu’il y a « convergence de vue » par rapport à la nécessité de « travailler ensemble » pour « contribuer à la paix et la stabilité dans la région méditerranéenne », de même pour nombre de questions régionales. Un intérêt, sur ce plan, exprimé également par Georgia Meloni, pour qui, le partenariat entre les pays des rives nord et sud de la Méditerranée, contribuera à « garantir la paix et la stabilité dans la région ».
Ainsi, évoquant la crise libyenne, Abdelmadjid Tebboune, a mis en exergue la « nécessité d’arriver à une solution consensuelle », sur la base « de l’organisation des élections » et en « soutenant la réconciliation nationale », dans ce pays, « dans le cadre d’un dialogue inclusif sous l’égide des nations unis ». Pour ce qui est du Mali, le président de la République a évoqué l’accord de paix et de réconciliation, issu du processus d’Alger, qui, d’après lui, « doit être concrètement appliqué ». « Nous avons exprimé notre volonté commune pour accompagner les Maliens et rendre possible le soutien politique et financier de la communauté internationale notamment à travers le renforcement du rôle de la Minusma », a-t-il ajouté. Dans le même contexte, le chef de l’Etat a tenu à « saluer » la position italienne concernant le dossier du Sahara occidental jugé « équilibrée » puisque, a-t-il précisé, « l’Italie appelle à une solution juste en soutenant le processus onusien et Staffan de Mistura », l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental. Pour ce qui est de la cause palestinienne, Tebboune a réaffirmé la position « de principe et constante » de l’Algérie dans la défense des droits du peuple palestinien pour un état indépendant avec comme capitale El Qods. Il a exprimé son souhait, à cet effet, que la Palestine puisse arracher dès cette année un siège aux Nations-Unis en tant que membre à part entière. La présidente du Conseil des ministres d’Italie a indiqué, par rapport à cette question, que l’Italie estime qu’ « il n’y a pas de solutions pour les deux états en dehors de négociations qui s’inscrivent dans le cadre de ce qui est prévu par la légalité internationale ».
Elyas Nour