La bataille fait rage entre l’UE et la Chine en Afrique : La course aux terres rares lancée
La compétition entre les Occidentaux et la Chine ne se pratique pas uniquement sur le terrain militaire, spatial ou technologique. Il concerne aussi le contrôle des terres rares et des « matières premières critiques », indispensables justement dans les industries de hautes technologies. Téléphones, ordinateurs, voitures électriques : toutes ces technologies utilisent des terres rares, des métaux qui sont au cœur de nos vies branchées et de la transition énergétique.
Sur ce terrain, la Chine (qui a déjà beaucoup de terres rares) a pris de l’avance sur tous ses concurrents en s’établissant dans de nombreux pays en Afrique, continent riche en terres rares. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la France est pressée de conclure un partenariat avec l’Algérie pour l’exploration et la production de matériaux rares.
Pour rattraper son retard sur Pékin, Bruxelles vient de présenter une nouvelle feuille de route pour sécuriser l’approvisionnement de ses 27 membres en ce qu’ils appellent des matières premières critiques. Le but ? Réduire leur forte dépendance vis-à-vis d’une poignée de pays, dont la Chine. Cette feuille de route dévoilée jeudi 16 mars par la Commission européenne consiste à proposer à des pays riches en matières premières critiques, en particulier en Afrique, des partenariats « gagnant-gagnant » axés sur le raffinage local de ces matières indispensables aux transitions écologique et numérique.
Concrètement, l’UE prévoit de créer une sorte de ‘’Club des CRM’’qui « réunira les pays consommateurs et les pays riches en ressources afin d’encourager les investissements durables dans les pays producteurs et de leur permettre de remonter la chaîne de valeur ». Ce document consulté par Euractiv, un portail d’information spécialisé dans les affaires européennes, précise que l’intérêt porte sur l’encouragement du raffinage et de la transformation des matières premières critiques comme le cobalt, le lithium, le nickel, le tungstène ou encore les terres rares dans les pays producteurs.
D’autre part, rapporte la presse européenne, l’UE proposera à ses partenaires commerciaux comme les États-Unis ou le Canada d’entrer dans ce qu’elle appelle le « club des investisseurs ». Outre les partenariats avec les pays producteurs, la nouvelle feuille de route prévoit l’extraction de 10% des matières premières critiques au sein de l’UE d’ici 2030 contre 3% actuellement, ainsi que la transformation et le raffinage de 40% ces matériaux dans l’espace européen contre 0 à 20% aujourd’hui. Les objectifs de recyclage ont été par ailleurs fixés à 15% du total des besoins des 27, qui souhaitent désormais ne pas dépendre d’un pays tiers unique pour plus de 65% de leur consommation annuelle de chacune des matières premières critiques. L’objectif est de « garantir un approvisionnement sûr, diversifié, abordable et durable » afin de « réduire la dépendance actuelle de l’UE à l’égard d’un seul ou de quelques pays ».
Mais attendant que l’UE mette en place sa feuille de route, la Chine demeure incontournable. Pour acquérir des terres rares, il faut obligatoirement passer commande auprès de la Chine, qui possède les plus grosses réserves du monde. Quelque 44 millions de tonnes d’oxydes de terres rares se trouveraient dans son sous-sol. Et, avec 61 % de la production, la Chine continue de dominer de manière écrasante le marché mondial. D’autant qu’il faut y ajouter une partie de la production birmane, que la Chine acquiert et raffine, selon une enquête de Global Witness publiée en août dernier. Dans le contexte de la course aux nouvelles énergies, nombre de pays espèrent aujourd’hui, comme l’UE, s’affranchir de cette dépendance vis-à-vis du géant chinois. C’est la raison pour laquelle l’Afrique devient objet de toutes les convoitises.
Khider Larbi