Une gestion commune pour les eaux souterraines
L’Algérie, la Tunisie et la Libye ont signé, mercredi à Alger, un accord portant création d’un mécanisme de concertation sur la gestion des eaux souterraines communes dans le Sahara septentrional doté d’un siège à Alger.
La relance de la coopération entre l’Algérie, la Tunisie et la Libye entre dans la phase concrète. Deux jours après la réunion de consultations tripartites entre le Président de la République Abdelmadjid Tebboune, son homologue tunisien Kaïs Saïed et le président du Conseil présidentiel libyen Mohamed El-Menfi à Tunis, les premiers projets de coopérations commencent à être mis en application. Un accord a été signé hier dans ce contexte à Alger entre les trois pays à propos d’un dossier stratégique, à savoir la gestion des eaux souterraines communes dans le Sahara septentrional. le ministre de l’Hydraulique, Taha Derbal, le ministre tunisien de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, Abdelmonem Belati, et le vice-ministre libyen des Ressources en eau, Mohammed Faraj Qunidi ont signé hier cet accord portant création d’un mécanisme de concertation sur la gestion Système Aquifère du Sahara Septentrional). Il faut dire que ce système hydrique qui s’étend sur une superficie d’environ 1,2 million de kilomètres carrés entre l’Algérie, la Tunisie et la Libye et dont 70% se trouvent en Algérie constitue une réserve stratégique d’eau. Selon les évaluations, ce bassin hydraulique renfermerait entre 40.000 et 50.000 milliards de m3 d’eau. Ce qui constitue un véritable enjeu pour la sécurité hydrique et de développement dans cette région aride. Les trois pays mise ainsi sur la coopération dans la gestion de cette réserve stratégique pour l’approvisionnement en eau potable et pour l’irrigation agricole. Premier jalon d’une coordination et d’un partenariat renforcé entre les trois pays qui s’imposent ainsi comme le noyau de relance de l’intégration économique maghrébine.
Des enjeux d’ailleurs mis en avant hier lors de la signature de l’accord. Dans ce contexte, le ministre de l’Hydraulique, Taha Derbal a affirmé que l’accord « ouvre une nouvelle page prometteuse en matière de coordination et de coopération entre nos pays dans un domaine vital sous-tendant tout processus de développement, à savoir les ressources en eau ». Et d’affirmer qu’il s’agissait de consacrer la volonté politique de poser les bases d’une coopération trilatérale, estimant que ledit document « ouvre la voie à la relance de la coopération et de la coordination dans d’autres domaines, à la lumière des opportunités et des potentialités disponibles ». Le ministre de l’Hydraulique a également souligné que cet accord « permettra aux pays signataires d’approfondir leur connaissance de leurs ressources hydriques communes dans le Sahara septentrional et d’intensifier l’échange d’informations dans ce cadre ». Doter le mécanisme d’un siège permanent en Algérie « reflète notre volonté de créer les conditions propices à son bon fonctionnement dans un cadre réglementé aux contours bien définis, au service des intérêts des trois pays et consacrant la souveraineté de chaque pays sur ses ressources hydriques », a-t-il soutenu. Le contexte actuel nous impose de mieux connaître nos ressources hydriques pour mieux les préserver, a-t-il dit, soulignant que la création de ce mécanisme traduisait la volonté de toutes les parties de « renforcer notre connaissance des ressources hydriques souterraines dans le Sahara septentrional » et d' »intensifier la coordination et l’échange d’informations et de données à cet égard ». Pour sa part, le ministre tunisien de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche a affirmé que l’accord portant création d’un mécanisme de concertation sur la gestion des eaux souterraines communes dans le Sahara septentrional « ouvre de grandes perspectives de coopération régionale et contribue à renforcer la sécurité alimentaire et hydrique et, partant, la sécurité nationale des pays signataires, afin que le bassin du Sahara septentrional demeure une source de vie et de prospérité ». Le sommet présidentiel ayant réuni récemment les dirigeants des trois pays à Tunis « confère à l’initiative de lancement de ce mécanisme de concertation une assise politique » permettant d’aller « le plus vite possible vers sa mise en œuvre sur le terrain », a estimé M. Belati. Il a également souligné la nécessité de fournir « le soutien financier et l’appui nécessaires au mécanisme, y compris à travers la coopération trilatérale et entre les établissements de recherche au niveau local ».
Le vice-ministre libyen des Ressources en eau a affirmé, pour sa part, que les nombreux défis auxquels la région est confrontée requièrent un renforcement de la coopération et de la coordination entre les trois pays dans divers domaines, et c’est ce qui a été concrétisé lors de la dernière réunion de Tunis, a-t-il dit. Il a indiqué que son pays aspirait, dans le cadre du Maghreb arabe, à « promouvoir la coopération s’agissant des ressources en eau communes dans le Sahara septentrional, à travers l’échange de données et d’informations et le développement, l’exploitation et la préservation de l’eau ». Concernant l’accord, le responsable libyen a affirmé « qu’il pose les bases d’une coopération constructive au service des peuples de la région, garantissant la gestion, le développement et la pérennité de ces ressources communes au profit des générations futures ». Pour rappel, les Présidents Abdelmadjid Tebboune, Kaïs Saïed et Mohamed Younes El-Menfi, ont convenu, lors de leur 1ère Réunion consultative tenue lundi à Tunis, « d’activer au plus vite des mécanismes conjoints pour l’exploitation des eaux souterraines communes dans le Sahara septentrional et d’accélérer la mise en œuvre du projet d’interconnexion électrique des réseaux de transport d’électricité entre les trois pays ». Ils sont également convenus de « créer un groupe de travail conjoint chargé d’élaborer des mécanismes permettant de mettre en place des projets et des investissements conjoints d’envergure dans des domaines et secteurs prioritaires, tels que la production de céréales et de fourrage et le dessalement de l’eau de mer, ainsi que d’autres projets et programmes de coopération visant à assurer la sécurité hydrique et alimentaire des trois pays », selon le communiqué final du Sommet de Tunis.
Samir Benisid