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Une stratégie pour lutter contre les effets dévastateurs du réchauffement climatique

Par Abderrahmane Mebtoul

Professeur des universités, expert international, ancien Directeur des études au ministère de l’Énergie et au ministère de l’Industrie 1974/2016, Président de la commission transition énergétique des 5+5+ Allemagne 2019/2021.

Le Sommet de l’avenir (22-23 septembre 2024) aux Nations Unies à New York est l’occasion pour les dirigeants mondiaux de faire des choix difficiles – pour ouvrir la voie à la paix et à la prospérité mondiales, promouvoir la transformation numérique, protéger les droits de l’homme et surtout lutter contre les effets néfastes du réchauffement climatique. Un défi qui interpelle l’Algérie pays semi aride qui, selon les rapports des Nations Unies, sera fortement touché par le réchauffement climatique entre 2025 et 2030.

Les différentes COP ont eu des résultats mitigés. Selon le secrétaire général de l’ONU, seulement pour l’Afrique il faudra 7 milliards de dollars /an pour pallier la menace qui pèse sur des millions de personnes dans la Corne de l’Afrique. Or, le monde est appelé à changer de modèle de consommation pour aller vers une économie de l’énergie fossile classique et des biens consommables et surtout de l’eau qui sera un enjeu stratégique au XXIème siècle. C’est que nous assistons en ce début du XXIème siècle à des disparités de niveau de vie criantes qui font de notre planète un monde cruel et dangereusement déséquilibré. Depuis 1850, notre planète s’est réchauffée en moyenne de 1,1°C et selon le sixième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), le réchauffement planétaire en cours pourrait atteindre 1,5°C à 4,4°C d’ici 2100. Les experts du Giec indiquent que le réchauffement climatique devrait être contenu à +1,5°C au maximum d’ici 2100 pour éviter que notre climat ne s’emballe. Cette limitation sera hors de portée à moins de réductions immédiates, rapides et massives des émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone en 2050.C’est dans ce cadre mondial que l’abondance et l’opulence y côtoient d’une manière absolument insupportable la pauvreté et le dénuement. La lutte contre le réchauffement climatique engage la sécurité du monde où les rapports de l’ONU prévoient une sécheresse sans pareille à l’horizon 2030 avec une pénurie d’eau douce et donc une crise alimentaire. Fondamentalement, si nous échouons à passer à un monde à faible émission de carbone, c’est l’intégrité globale de l’économie mondiale qui sera menacée, et en premier lieu l’Afrique, car le climat mondial est un vaste système interconnecté. Selon la Banque mondiale, l’Afrique n’est responsable que de 3,8 % des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde et pourtant, du Sahel à la corne de l’Afrique, et jusqu’au sud du continent, les pays africains subissent de plein fouet les effets dévastateurs de sécheresses et d’inondations de plus en plus sévères avec des conséquences dramatiques sur l’agriculture et son soubassement l’eau douce, sur la production de nourriture où l’agriculture est le moyen de subsistance de 80 % de la population du continent. (voir le débat Pr Abderrahmane Mebtoul Radio Beur/Fm Paris le 30/10/2022 17h sur les enjeux géostratégiques et TV- LCP chaîne parlementaire sur le réchauffement climatique et la sécurité mondiale 31 octobre 2022 Paris France en présence de plusieurs experts disponible sur YouTube).D’une manière générale, le monde connaît un bouleversement inégal depuis des siècles, d’un côté pluies diluviennes, inondations de l’autre côté, sécheresse et incendies. Pour réduire les coûts, impossible à supporter par un seul Etat, il s’agira d’accélérer la coopération internationale et la transition énergétique (l’efficacité énergétique, le développement des énergies renouvelables et de l’hydrogène vert, bleu et blanc ). Il devient impératif pour les pays développés et pour l’intérêt de l’humanité qu’à une vision strictement marchande se substitue un co-développement pour une richesse partagée. Le dialogue des civilisations et la tolérance sont des éléments plus que jamais nécessaires à la cohabitation entre les peuples et les nations. D’une manière générale, pour les pays en voie de développement qui aspirent au bien-être des stratégies d’adaptation avec l’aide des techniques nouvelles des pays développés, devant adapter une stratégie progressive pour ne pas freiner leur développement, pouvant tolérer un minimum. Si l’Afrique, l’Asie dont la Chine et l’Inde plus de 4 milliards d’habitants sur les 8 milliards avaient le même modèle de consommation énergétique que l’Europe et les USA, qui accaparent en 2022 plus de 40% du PIB mondial estimé à plus de 100.000 milliards de dollars pour moins d’un milliard d’habitants, est une question qui se pose souvent.

Les effets négatifs du réchauffement climatique

Le réchauffement climatique a sept effets négatifs qui menacent la sécurité mondiale. Premièrement, pour la hausse du niveau des mers, le constat est la hausse moyenne des températures qui provoque une fonte des glaces continentales (glaciers, icebergs, etc.). Le volume de glace fondue vient s’ajouter à celui de l’océan, ce qui entraîne une élévation du niveau des mers où rès de 30% de cette élévation est due à la dilatation causée par l’augmentation de la température de l’eau. Le taux moyen d’élévation du niveau marin s’accélère, était de près d’1,3 mm par an entre 1901 et 1971, d’environ d’1,9 mm par an entre 1971 et 2006, et près de 3,7 mm par an entre 2006 et 2020 et pourrait augmenter de 1,1 m d’ici 2100. Comme impact, les zones côtières seront confrontées à des inondations dans les zones de faible altitude plus fréquentes et plus violentes et à l’augmentation de l’érosion du littoral. Deuxièmement, la modification des océans qui absorbent naturellement du gaz carbonique, en excès dans les océans, acidifie le milieu sous-marin, ce qui provoque la disparition de certaines espèces, notamment des végétaux et des animaux tels que les huîtres ou les coraux. En plus de son acidification, la modification des océans entraîne une baisse de sa teneur en oxygène, réchauffement et augmentation de la fréquence des vagues de chaleur, affectant les écosystèmes marins et les populations qui en dépendent. Troisièmement, l’amplification des phénomènes météorologiques extrêmes provoque l’évaporation de l’eau, ce qui modifie le régime des pluies plus intenses, avec les inondations qui les accompagnent dans certaines régions, et des sécheresses plus intenses et plus fréquentes dans de nombreuses autres régions. En effet, lors de pluies violentes, les sols ne peuvent pas fixer l’eau, s’écoulant alors directement vers les cours d’eau plutôt que de s’infiltrer, les nappes d’eau souterraines ne pouvant se reconstituer. Le réchauffement planétaire entraîne le dérèglement des saisons et le déplacement des masses d’air qui pourraient, à long terme, accroître le nombre d’événements climatiques extrêmes: tempêtes, ouragans, cyclones, inondations, vagues de chaleur, sécheresses, incendies. Quatrièmement, le réchauffement climatique est une menace sur les plantes et les animaux car les cycles de croissance des végétaux sauvages et cultivés sont modifiés: gelées tardives, fruits précoces, chute des feuilles tardives, etc. Beaucoup d’espèces ne supporteront pas les nouvelles conditions climatiques et l’agriculture devra s’adapter en choisissant des espèces précoces.. Les comportements de nombreuses espèces animales sont perturbés et devront migrer ou s’adapter sous menace d’extinction. Cinquièmement, l’impact du réchauffement climatique bouleverse les conditions de vie humaine. Certains de ces effets sont irréversibles où selon le rapport du Giec, environ 3,3 à 3,6 milliards de personnes vivent dans des habitats très vulnérables au changement climatique. Si le niveau des mers augmente d’1,1 m d’ici 2100, près de 100 millions de personnes seront contraintes de changer de lieu d’habitation, et certaines terres côtières ne seront plus cultivables et en plus , le changement climatique accroît les risques sanitaires: vagues de chaleur, cyclones, inondations, sécheresses, propagation facilitée de maladies. Sixièmement, les dérèglements climatiques perturbent la distribution des ressources naturelles, leur quantité et leur qualité. De plus, les rendements agricoles et des activités de pêche sont impactés. Les rendements agricoles pourraient baisser d’environ 2% tous les 10 ans tout au long du XXIe siècle, avec des fluctuations chaque année. Septièmement, les impacts sur les coûts. Ainsi, l’AIE les engagements gouvernementaux actuels ne permettraient d’atteindre que 20% des réductions d’émissions d’ici 2030 et devant investir chaque année jusqu’à 4000 milliards de dollars /an au cours de la prochaine décennie. La priorité est de diriger la majorité de ces investissements vers les industries écologiques créatrices de valeur ajoutée et de nombreux emplois : les véhicules électriques, l’hydrogène, le captage / stockage du carbone et biocarburants,, sur l’efficacité énergétique dont le transport de l’énergie, le Btph, l’industrie sans compter d’autres secteurs comme la santé , l’agriculture et les loisirs avec un nouveau mode du tourisme. Cela nécessite la réforme du système financier mondial du fait que les obligations vertes représentent en 2021 seulement 2% de la valeur du marché obligataire mondial. Sans changement de trajectoire, les prévisions du Nges, qui s’appuient sur la simple mise en place des politiques actuelles, envisagent une perte de production équivalant à environ 5% du PIB mondial d’ici 2050, et jusqu’à 13% d’ici 2100.

Le cas de l’Algérie

Qu’en est-il de la politique de l’Algérie, pays semi-aride, contre les effets du réchauffement climatique ? . Selon le rapport de la Banque africaine de développement, l’Algérie aurait besoin entre 2023/2030 d’un besoin de financement de 22 milliards de dollars entre 2023/2030 , devant mettre en place des actions opérationnelles se prémunir contre les catastrophés naturelles. L’Algérie a adopté un plan ambitieux contre le réchauffement climatique du fait qu’elle a connu, au cours du siècle dernier, une augmentation de température de 0,3°C par décennie ainsi qu’un déficit de pluie de 15%. L’Algérie fait face de fait à un stress hydrique et face auquel elle devra trouver des solutions. Certes elle dispose d’eaux souterraines. La nappe de l’Albien est la plus grande nappe d’eau souterraine au monde, environ 50.000 milliards de mètres cubes, étant à cheval sur trois pays, l’Algérie, la Libye et la Tunisie. 70% de la nappe se trouvant en territoire algérien au sud-est du pays. Mais selon les experts consultés, il faut des études de rentabilité sérieuses y compris la protection de l’environnement pour éviter de détruire l’éco-système, en tenant compte du non renouvellement de la nappe, du coût d’exploitation, à quel profondeur, la majeure partie étant de l’eau saumâtre nécessitant des unités de traitement. Cette réserve est aussi considérée comme étant stratégique par les autorités. L’Algérie a donc opté pour un programme ambitieux de réalisation d’unités de dessalement d’eau de mer qui est un choix stratégique afin de couvrir les besoins en eau douce à hauteur de 60% à l’horizon 2030 devant lutter contre la dégradation de la qualité de l’eau, l’intrusion des eaux marines au niveau des nappes aquifères et la détérioration des infrastructures, causée principalement par les inondations. L’Algérie s’est engagée dans la lutte contre le changement climatique où en 2015, elle a ratifié l’accord de Paris sur le climat (COP21). Le Groupe pétro-gazier national, Sonatrach a rejoint l’initiative Zéro Routine Flaring by 2030, lancée en 2015 par le secrétaire général des Nations unies et visant à mettre fin au torchage systématique de gaz d’ici 2030. Récemment, l’Algérie a mis en place un Plan national Climat 2020-2030 portant sur 155 projets pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation avec les impacts négatifs des changements climatiques et l’accompagnement de la gouvernance climatique.

En conclusion, le monde connaît un bouleversement inégal depuis des siècles, d’un côté pluies diluviennes, inondations, de l’autre côté, sécheresse et incendies, entraînant des coûts colossaux, impossibles à supporter par un seul État et une menace pour l’avenir de l’humanité, d’où l’urgence d’une action collective. Il s’agit comme cela a été recommandé par la majorité des institutions internationales de lutte contre le réchauffement climatique d’avoir une vision stratégique autour de six axes : premièrement, comment faire évoluer le modèle des banques multilatérales de développement pour répondre aux défis du XXIe siècle ; deuxièmement , mettre en place une nouvelle méthode pour le développement durable ; troisièmement favoriser les partenariats pour une croissance verte ; quatrièmement mettre en place d’autres instruments et des financements innovants face aux nouveaux enjeux de vulnérabilité ; cinquièmement garantir des informations et des données plus fiables et comparables et sixièmement créer un environnement propice au secteur privé (infrastructures durables, financement des PME).

ademmebtoul@gmail.com

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