Ghaza : Tragédie à Jabalia
La tragédie de Jabalia, dans le nord de la bande de Ghaza, illustre de manière poignante l’ampleur de la barbarie du colonialisme sioniste, particulièrement dans l’enclave palestinienne en proie à une agression génocidaire depuis plus d’un an.
Au milieu des ruines de ce qui fut autrefois sa maison, Nidal al-Arabid pleure la perte de plus de dix membres de sa famille, victimes des bombardements incessants de l’occupant sioniste. Son témoignage déchirant révèle l’horreur vécue par les civils : « Toute ma famille est tombée en martyr lorsque les avions de guerre de l’occupation israélienne ont bombardé notre maison sans aucun avertissement » dit-il à l’AFP. La destruction ne s’est pas limitée à la famille d’al-Arabid. Tout un quartier a été rasé, emportant avec lui de nombreuses vies innocentes. « Ils ont détruit toutes les maisons de notre quartier et beaucoup ont été tués, y compris onze membres de la famille voisine, les Sayed, des femmes, des enfants et des personnes âgées, » ajoute-t-il.
L’offensive sioniste sur Jabalia est sanglante. La Défense civile de Ghaza a rapporté qu’au moins 69 personnes ont perdu la vie lors de cette offensive, précisant que de nombreuses autres restaient piégées sous les décombres des maisons effondrées. Ces chiffres, déjà alarmants, ne reflètent probablement qu’une partie de la réalité sur le terrain, alors que les équipes de secours peinent à atteindre toutes les victimes piégées sous les décombres.
La situation à Jabalia s’inscrit dans un contexte plus large de déplacements massifs et répétés de la population Ghazaouie. Soraya Assaliya, une femme au foyer de 40 ans, incarne le destin tragique de nombreux Palestiniens. Déplacée sept fois depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023, elle a été contrainte de quitter Beit Hanoun, dans le nord, au début de l’offensive. « Il [son mari] est coincé dans l’école de filles de Jabalia, qui se trouve en face d’un cimetière. Il y a des chars et il est impossible pour (les personnes réfugiées dans l’école) de partir », dit-elle à l’AFP Cette réalité brutale est dénoncée par Heba Morayef, directrice régionale d’Amnesty International, qui accuse l’armée d’occupation sioniste de « forcer les civils à choisir entre la famine et le déplacement, alors que leurs maisons et leurs rues sont pilonnées sans relâche par les bombes ». Ce constat amer souligne le dilemme impossible auquel sont confrontés les habitants de Ghaza : rester et risquer la mort sous les bombes, ou fuir vers un avenir incertain et tout aussi périlleux. Face à cette tragédie qui se déroule sous les yeux du monde, Soraya Assaliya exprime un sentiment de désespoir profond et d’abandon : « Il n’y a plus d’espoir. Le monde entier nous a tourné le dos. »
Au-delà de Jabalia, la situation dans l’ensemble de la bande de Ghaza ne cesse de s’aggraver. Le bilan de l’agression génocidaire sioniste s’alourdit de jour en jour, atteignant des proportions effroyables. Selon les autorités palestiniennes de la santé, on dénombre désormais 42 344 martyrs et 99 013 blessés, en majorité des femmes et des enfants, depuis le début de l’agression le 7 octobre 2023. Ces chiffres, qui ne cessent d’augmenter, témoignent de l’intensité et de la brutalité des opérations militaires menées par l’entité sioniste. Les dernières 24 heures ont été particulièrement meurtrières, avec 55 nouveaux martyrs et 329 blessés acheminés vers les hôpitaux de la bande de Ghaza, suite à quatre massacres commis contre des familles palestiniennes. La situation est d’autant plus alarmante que de nombreuses victimes restent inaccessibles, piégées sous les décombres ou sur les routes, les ambulances et les équipes de la Défense civile étant dans l’impossibilité de les atteindre en raison des bombardements incessants et des restrictions de mouvement imposées par l’occupant.
Trop de lignes rouges ont été franchies
Les frappes sionistes ne se limitent pas à Jabalia. D’autres régions de Ghaza sont également touchées, comme en témoignent les récents bombardements sur le camp de Khan Younes, au sud de l’enclave. Plusieurs Palestiniens sont tombés en martyrs lors de ces attaques, et de nombreux blessés ont été transportés au complexe médical Nasser. Ces opérations s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à étendre le contrôle sur l’ensemble du territoire Ghazaoui, au mépris des conséquences humanitaires désastreuses pour la population civile. La situation humanitaire, déjà critique, se détériore rapidement. James Elder, porte-parole de l’UNICEF, a dénoncé les « pires restrictions jamais connues » en matière d’aide humanitaire depuis le début de l’agression. Il souligne que la quantité d’aide acheminée dans la bande de Ghaza en août a été la plus faible en un mois depuis le début du conflit, avec plusieurs jours où aucun camion n’a été autorisé à pénétrer dans l’enclave. Cette restriction drastique de l’aide, combinée aux bombardements incessants et aux ordres d’évacuation touchant environ 85% de l’enclave, a rendu le territoire « totalement invivable », selon Elder. Le nord de Ghaza est particulièrement touché, n’ayant reçu aucune aide alimentaire pendant tout le mois d’octobre. Cette situation catastrophique affecte de manière disproportionnée les enfants, dont la situation, selon le porte-parole de l’UNICEF, « devient pire que la veille » chaque jour qui passe.
Philippe Lazzarini, commissaire général de l’UNRWA, a déclaré que « trop de lignes rouges ont été franchies » à Ghaza, déplorant la poursuite des attaques sionistes, le sabotage des infrastructures civiles et le refus délibéré d’une aide essentielle. Il souligne que ces tactiques sont utilisées par l’occupant sioniste pour forcer les gens à fuir, en violation flagrante du droit international humanitaire. La situation humanitaire continue de se détériorer, avec l’interdiction par l’entité sioniste de toute aide, y compris alimentaire, depuis le 30 septembre. Les deux points de passage vers le nord de Ghaza restent fermés, paralysant les services de base, notamment ceux de l’UNRWA.
La pression sur les infrastructures médicales, déjà au bord de l’effondrement, s’intensifie. Adrian Zimmerman, un responsable du Comité international de la Croix-Rouge à Ghaza, déplore que les hôpitaux soient soumis à une « pression immense » face à des demandes croissantes, tout en manquant cruellement de fournitures médicales essentielles. Cette situation dramatique compromet la capacité des soignants à prendre en charge les blessés et les malades, aggravant encore le bilan humain de cette guerre. Malgré ces conditions extrêmement difficiles, des efforts sont déployés pour maintenir certains services essentiels. Une deuxième phase de la campagne de vaccination contre la polio a débuté, avec près de 93 000 doses administrées dans le centre de Ghaza en une seule journée. Cette campagne, lancée après la confirmation du premier cas de polio en 25 ans dans l’enclave, se déroule en trois temps, en fonction des pauses dans les combats : d’abord dans le centre, puis dans le sud, et enfin dans le nord, la zone la plus difficile d’accès.
La situation des infrastructures médicales reste néanmoins critique. Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, a lancé un appel urgent à la protection des hôpitaux suite au ciblage par l’entité sioniste d’un centre hospitalier et d’une école dans le centre de Ghaza, où s’étaient réfugiés des civils déplacés. Les rapports faisant état de personnes tuées et gravement brûlées dans l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa soulignent l’urgence de respecter le statut protégé des établissements de santé en zone de conflit.
Face à cette tragédie humanitaire qui ne cesse de s’amplifier, la communauté internationale est appelée à intensifier ses efforts pour mettre fin aux hostilités et faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire. Les appels répétés à un cessez-le-feu immédiat et à la protection des civils restent largement ignorés, alors que la situation sur le terrain continue de se détériorer.
Lyes Saïdi