Corée du Sud : Le président menacé de destitution
Une crise politique majeure secoue la Corée du Sud le après que le président Yoon Suk Yeol ait tenté mardid’imposer la loi martiale, avant de faire marche arrière moins de six heures plus tard face à une fronde populaire et parlementaire sans précédent.
Dans une allocution surprise, le président conservateur avait initialement justifié sa décision par la volonté de « protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes » et de « éliminer les éléments hostiles à l’État », pointant une « dictature législative » dans le contexte de difficultés budgétaires. L’annonce présidentielle a immédiatement déclenché une mobilisation massive. Des troupes ont été déployées, avec des hélicoptères militaires atterrissant sur le toit du parlement. Plus de 280 militaires sont entrés dans l’enceinte parlementaire, tentant de pénétrer dans l’hémicycle où 190 députés sur 300 sont parvenus à se réunir. Les manifestants ont rapidement investi les rues, scandant des slogans comme « Arrêtez Yoon Suk Yeol ! » Un manifestant a résumé la situation : « C’est à cause de cette loi martiale insensée décrétée par Yoon, qui est devenu fou ». L’opposition, emmenée par Lee Jae-myung, a qualifié la mesure d' »illégale » et annoncé son intention de « porter plainte pour rébellion » contre le président, ses ministres de la Défense et de l’Intérieur, ainsi que plusieurs responsables militaires et policiers. Le ministre de la Défense, Kim Yong-hyun, a présenté sa démission, déclarant : « Je regrette profondément et j’assume l’entière responsabilité de la confusion et de la préoccupation causées au public par la loi martiale ».
La réaction a été unanime et immédiate. Même le parti présidentiel, le Parti du Pouvoir au Peuple, a pris ses distances. Son chef, Han Dong-hoon, a exigé que « le président doit expliquer cette situation tragique tout de suite et en détail », soulignant que « tous les responsables devront rendre des comptes ». Le chef de cabinet et plusieurs conseillers présidentiels ont démissionné collectivement. La Confédération coréenne des syndicats, forte de 1,2 million de membres, a appelé à une « grève générale illimitée » jusqu’à la démission de Yoon Suk Yeol, estimant qu’il avait « signé sa propre fin au pouvoir ». L’opposition a immédiatement déposé une motion de destitution qui pourrait être soumise au vote dès vendredi, nécessitant une majorité des deux tiers pour être adoptée.
Hier à l’aube, Yoon a finalement annoncé la levée de la loi martiale et le retrait des troupes de la capitale, provoquant des cris de joie des manifestants. La dernière activation de la loi martiale remontait à 1980, lors d’un coup d’État militaire réprimé dans le sang. Cette tentative de Yoon Suk Yeol, élu de justesse en 2022 et n’ayant jamais disposé de la majorité parlementaire, marque un tournant politique dramatique pour la démocratie sud-coréenne. La Bourse de Séoul a immédiatement réagi, terminant la journée en baisse de 1,4%, reflétant l’instabilité politique. Le président, dont la cote de popularité était déjà au plus bas, se retrouve désormais dos au mur, menacé de destitution et ayant perdu le soutien de sa propre formation politique.
Lyes Saïdi