Ces privilèges dont bénéficie la France en Algérie
Les tensions diplomatiques qui ont marqué les relations algéro-françaises et l’instrumentalisation de la haine de l’Algérieces dernières semaines, révèlent au grand jour l’hypocrisie qui caractérise le discours de certains politiques français. C’est ce que souligne avec force un récent commentaire de l’Agence Presse Service (APS), qui met en lumière les contradictions flagrantes entre les accusations portées par l’extrême droite française et la réalité des privilèges dont bénéficie la France en Algérie.
L’APS, dans son analyse, rappelle que l’extrême droite hexagonale et une partie de la droite classique multiplient les attaques contre l’Algérie, l’accusant de profiter indûment d’aides françaises et de ne pas honorer ses engagements bilatéraux. Pourtant, souligne l’agence, un examen approfondi de la réalité des relations entre les deux pays dévoile une toute autre vérité : la France demeure le principal bénéficiaire d’avantages considérables sur le sol algérien, avantages soigneusement passés sous silence dans les discours incendiaires des tribunes politiques parisiennes. L’extrême droite française, toujours en quête de boucs émissaires, a trouvé un nouveau cheval de bataille : accuser l’Algérie de profiter de prétendues aides françaises et de ne pas respecter les accords signés entre les deux pays. Bruno Retailleau, figure emblématique de cette frange politique, n’a pas hésité à relayer cette rhétorique aussi fausse qu’invraisemblable, omettant d’évoquer un fait essentiel: si un pays tire un véritable profit des relations bilatérales, c’est bien la France, écrit l’APS. La convocation la semaine dernière de l’ambassadeur de France en Algérie, Stéphane Romatet, par le ministère des Affaires étrangères algérien a mis en lumière un dossier longtemps occulté, comme le rapporte l’APS : celui des biens immobiliers mis à disposition de la France par l’Algérie. Les chiffres avancés par l’agence sont éloquents et révèlent une asymétrie frappante. Pas moins de 61 biens immobiliers sont actuellement occupés par la France sur le territoire algérien, pour des loyers que l’on pourrait qualifier d’anecdotiques comparés aux valeurs réelles du marché immobilier. D’après le commentaire de l’APS, le plus emblématique de ces biens n’est autre que le siège de l’ambassade de France à Alger, un domaine princier de 14 hectares (140.000 mètres carrés) situé dans l’un des quartiers les plus prisés de la capitale algérienne. Pour cette propriété d’exception, l’État français verse un loyer si dérisoire qu’il ne permettrait même pas de louer une modeste chambre de service dans les quartiers populaires de Paris. Plus saisissant encore, précise l’agence, la résidence personnelle de l’ambassadeur français, connue sous le nom de « Les Oliviers », s’étend sur 4 hectares (40.000 mètres carrés) et était louée jusqu’à récemment au franc symbolique, sur la base d’un prix de bail resté figé depuis l’indépendance algérienne en 1962 jusqu’en août 2023. L’APS souligne que cette générosité algérienne n’a jamais trouvé d’équivalent pour les représentations diplomatiques algériennes en France, qui doivent s’acquitter de loyers conformes aux tarifs du marché parisien, parmi les plus élevés au monde. Un déséquilibre qui illustre parfaitement la nature des relations franco-algériennes, bien loin de l’image véhiculée par certains responsables politiques français qui se plaisent à dépeindre l’Algérie comme un État profiteur et ingrat.
Le commentaire de l’APS va plus loin en affirmant que les avantages dont bénéficie la France en Algérie ne se limitent pas au domaine immobilier. L’agence met en exergue l’accord de 1968, si souvent décrié par les politiques français, notamment par Bruno Retailleau qui en fait désormais son cheval de bataille électoral en vue de 2027. Cet accord, qui régit le statut des ressortissants algériens en France, est systématiquement présenté comme une faveur exceptionnelle accordée à l’Algérie. Pourtant, ce que les détracteurs omettent sciemment de mentionner, selon l’APS, c’est que la France a largement profité de cet accord pour s’assurer un flux constant de main-d’œuvre algérienne qui a considérablement contribué à la reconstruction et au développement économique de l’Hexagone dans les décennies d’après-guerre. L’agence rappelle que les travailleurs algériens ont alimenté les usines françaises, construit ses routes, ses ponts et ses immeubles, souvent dans des conditions précaires et pour des salaires modestes, participant ainsi activement à la prospérité française sans que leur contribution ne soit pleinement reconnue. Aujourd’hui encore, de nombreux secteurs de l’économie française, notamment dans les services, la restauration ou le bâtiment, dépendent fortement de cette main-d’œuvre. L’APS en conclut que l’accord de 1968, loin d’être un cadeau fait à l’Algérie, apparaît donc comme un instrument ayant servi avant tout les intérêts économiques français. L’APS évoque également l’accord de 1994, qui encadre divers aspects de la coopération entre les deux pays, notamment en matière de commerce et d’investissements, comme un autre exemple flagrant de cette asymétrie. Selon l’agence, cet accord a principalement permis aux entreprises françaises de bénéficier de conditions extrêmement favorables pour s’implanter et opérer en Algérie, alors que les entreprises algériennes continuent de se heurter à d’innombrables obstacles administratifs et réglementaires lorsqu’elles tentent de pénétrer le marché français.
L’APS analyse cette rhétorique fallacieuse comme s’inscrivant dans une stratégie plus large d’instrumentalisation politique des relations franco-algériennes. À l’approche des échéances électorales, l’algérophobie devient une arme électorale de choix pour certains, qui n’hésitent pas à attiser les tensions diplomatiques pour servir leurs ambitions personnelles. L’APS conclut son commentaire en affirmant que si la France souhaite véritablement ouvrir un débat sur la réciprocité et le respect des engagements bilatéraux, il serait peut-être temps d’examiner objectivement qui, de Paris ou d’Alger, a le plus bénéficié des accords signés depuis l’indépendance. L’examen des faits, loin des postures et des déclarations enflammées, révèle une réalité bien différente de celle dépeinte dans les discours politiques français. L’heure n’est plus à l’hypocrisie diplomatique ni aux accusations infondées, conclut l’agence.
Dans ce contexte, les récentes sorties médiatiques de Bruno Retailleau, qui semble vouloir faire de l’hostilité envers l’Algérie un tremplin pour ses ambitions présidentielles de 2027, à l’image de la stratégie adoptée par Nicolas Sarkozy en son temps, apparaissent particulièrement cyniques. En accusant l’Algérie de profiter d’aides au développement fantasmées ou en évoquant des dettes hospitalières prétendument impayées, la droite et l’extrême droite française jouent sur des cordes sensibles auprès d’un certain électorat, tout en taisant soigneusement la réalité des avantages considérables dont jouit la France en Algérie. Si certains responsables politiques français persistent à vouloir faire de l’Algérie un enjeu de politique intérieure, ils devraient au moins avoir l’honnêteté de reconnaître les privilèges considérables dont jouit leur pays sur le sol algérien. Les relations entre la France et l’Algérie méritent mieux que ces manipulations. Elles méritent la vérité, aussi inconfortable soit-elle pour ceux qui ont fait de la déformation des faits leur fonds de commerce électoral.
Salim Amokrane