L’APN installe une commission ad hoc chargée de l’élaborer : Une proposition de loi criminalisant la colonisation
Le président de l’Assemblée populaire nationale (APN), Brahim Boughali, a annoncé hier à Alger la mise en place d’une commission parlementaire spéciale chargée d’élaborer une proposition de loi visant à criminaliser la colonisation. Cette initiative s’inscrit dans la continuité des efforts déployés par l’Algérie pour obtenir une reconnaissance officielle des crimes commis durant la période coloniale française (1830-1962). Lors d’une journée parlementaire consacrée à cette question, M. Boughali a précisé que cette commission sera composée de représentants de tous les groupes parlementaires, et ce « en réponse au consensus de tous les courants politiques sur cette question, et en hommage à la mémoire de nos valeureux ancêtres, de la génération de la résistance à celle de la glorieuse Révolution de libération ». Le président de l’APN a également assuré que tous les moyens nécessaires seront mis à la disposition de cette commission pour accomplir ses missions. En outre, elle pourra faire appel à toutes les compétences, aux experts et aux juristes intéressés par les questions mémorielles et les crimes commis contre l’Algérie, l’Homme et l’Histoire durant la période 1830-1962. Cette démarche parlementaire intervient dans un climat de tensions diplomatiques récurrentes entre Alger et Paris concernant la question mémorielle. Elle fait suite notamment aux discours glorifiant la colonisation en France dans le sillage de la loi du 23 février 2005 adoptée par l’assemblée nationale en France sur les effets positifs de la colonisation. La commission de l’APN aura donc pour mission de documenter juridiquement les nombreux crimes perpétrés durant la période coloniale, parmi lesquels les massacres du 8 mai 1945 qui ont fait des dizaines de milliers de victimes, l’utilisation d’armes biologiques, les essais nucléaires dans le Sahara algérien (Reggane et In Ekker), ainsi que la pose de millions de mines antipersonnel le long des frontières. Ces actions sont aujourd’hui considérées par de nombreux historiens et juristes comme des crimes contre l’humanité ne pouvant être prescrits. Cette initiative s’inscrit également dans une dynamique continentale, après l’adoption par l’Union africaine d’une résolution classant l’esclavage et la colonisation comme crimes contre l’humanité. La criminalisation de la colonisation représente pour l’Algérie un enjeu fondamental de la construction nationale et de la préservation de sa mémoire collective. Comme l’a souligné le président Abdelmadjid Tebboune à plusieurs reprises, « le dossier mémoriel ne s’érode pas avec le temps et n’est pas négociable ». Cette commission parlementaire marque donc une nouvelle étape dans la politique mémorielle, qui vise à obtenir non seulement une reconnaissance des crimes coloniaux, mais également des réparations morales et matérielles pour les souffrances endurées par le peuple algérien durant 132 ans d’occupation française. Pour le président de l’APN, cette démarche n’est pas simplement un règlement de comptes avec l’histoire, mais une nécessité pour établir des relations équilibrées entre l’Algérie et la France, basées sur la vérité historique et le respect mutuel. Dans les prochains mois, la commission devra présenter un rapport détaillé et une proposition de loi qui seront soumis au vote de l’Assemblée populaire nationale, avant d’être transmis au Conseil de la Nation pour approbation finale.
Hocine Fadheli