Les cours du pétrole plongent dans le sillage de la guerre commerciale: Le Brent sous les 60 dollars !
Les marchés pétroliers ont connu ce mercredi un plongeon spectaculaire, avec le baril de Brent passant sous la barre symbolique des 60 dollars pour la première fois depuis février 2021. Cette chute brutale de 5,52% à 59,35 dollars s’inscrit dans un contexte d’escalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, les deux principaux acteurs du marché mondial de l’énergie.
Le West Texas Intermediate (WTI), référence américaine, n’a pas été épargné avec une dégringolade encore plus marquée de 5,86% à 56,09 dollars le baril pour livraison en mai. Cette tendance baissière s’explique principalement par la nouvelle guerre commerciale déclenchée par l’administration Trump, qui a imposé ce mercredi une salve massive de droits de douane supplémentaires visant principalement les produits chinois, portant les surtaxes totales à 104%. La riposte de Pékin ne s’est pas fait attendre. Initialement, la Chine avait prévu d’appliquer des surtaxes de 34% sur les produits américains, mais face à l’escalade, elle a annoncé un relèvement spectaculaire à 84% dès jeudi. Cette surenchère inquiète particulièrement les marchés énergétiques, la Chine étant le premier importateur mondial de pétrole, tandis que les États-Unis demeurent le premier consommateur.
Selon Susannah Streeter, analyste chez Hargreaves Lansdown, « les prix du pétrole ont encore baissé, les négociants s’attendant à un coup dur pour la croissance mondiale et la demande d’énergie ». Cette perspective pessimiste est partagée par John Plassard de Mirabaud, qui voit dans ce repli « le scepticisme quant à une désescalade à court terme » des tensions sino-américaines. La situation est d’autant plus préoccupante que cette guerre commerciale survient une semaine après la décision de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (OPEP+) d’accélérer l’augmentation de sa production.
Cette pression à la baisse pourrait compromettre la stratégie énergétique du président américain Donald Trump, qui prône une politique de forage intensif sur le territoire US. Comme le souligne Tamas Varga de PVM Energy, un prix trop faible de l’or noir rendra la production américaine non rentable, ce qui pourrait conduire à l’arrêt de certaines exploitations.
Goldman Sachs mise sur un baril à 55 dollars
La banque d’investissement Goldman Sachs anticipe une poursuite de cette tendance baissière. Dans une note publiée la veille, ses analystes tablent sur un baril de Brent à 62 dollars d’ici décembre 2025, puis à 55 dollars fin 2026. Ces prévisions, déjà pessimistes, pourraient être revues à la baisse en cas de récession américaine, avec un potentiel plongeon sous les 40 dollars à horizon fin 2026 dans le scénario d’un ralentissement économique mondial. L’impact de cette guerre commerciale se fait également sentir sur d’autres marchés énergétiques. Le gaz européen a atteint mercredi son plus bas niveau depuis septembre dernier, à 33,44 euros par mégawattheure, le contrat à terme du TTF néerlandais, référence européenne, affichant une baisse d’environ 5,8% à 34,10 euros.
Au-delà des marchés énergétiques, l’escalade des tensions commerciales entre Washington et Pékin menace la stabilité du système commercial multilatéral. La Chine a d’ailleurs saisi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour contester les nouvelles surtaxes américaines, qualifiant ces mesures d' »erreur qui s’ajoute aux précédentes » et qui « porte gravement atteinte aux droits et intérêts légitimes de la Chine ».
Cette crise intervient dans un contexte où les relations entre les deux superpuissances étaient déjà tendues, rappelant les épisodes de guerre commerciale sous la précédente administration Trump. Toutefois, l’ampleur des mesures actuelles et la rapidité de l’escalade inquiètent particulièrement les observateurs. La baisse simultanée des cours du pétrole et du gaz reflète les craintes des investisseurs quant aux conséquences économiques globales de ce conflit commercial, qui pourrait significativement freiner la croissance mondiale et, par conséquent, la demande énergétique. Face à ces incertitudes, les marchés pétroliers pourraient connaître une volatilité accrue dans les semaines à venir.
Samira Ghrib