Echorouk News TV suspendue dix jours pour discours à caractère raciste: L’ANIRA décide de sévir
Après une multiplication des écarts déontologiques, l’Autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel (ANIRA) vient de frapper fort en prenant une décision exemplaire contre une chaîne de télévision privée. En effet, l’instance de régulation a annoncé ce vendredi la suspension totale de la diffusion de la chaîne Echorouk News TV pour une durée de dix jours. Cette sanction, qui témoigne de la détermination des autorités compétentes à lutter contre les dérives médiatiques, intervient après plusieurs mises en garde restées sans effet concernant la prolifération des discours de haine et des propos à caractère raciste ou régionaliste dans le paysage audiovisuel national. Selon le communiqué officiel de l’ANIRA, cette décision fait suite à « l’usage d’un terme à caractère raciste extrêmement grave diffusé le 1er mai 2025 sur la page Facebook officiel de la chaîne Echorouk News TV, à la suite des descentes menées par les services de la Sûreté de wilaya d’Alger dans divers quartiers de la capitale, dans le cadre de la lutte contre le crime organisé, lors desquelles ont été interpellés des migrants en situation irrégulière, originaires de pays africains, présents sur des lieux d’intervention policière ». L’Autorité de régulation n’a pas manqué de préciser que le reportage en question contenait « un terme à caractère raciste et discriminatoire, attentatoire à la dignité humaine, véhiculant un discours de haine et d’incitation contre une catégorie de personnes en raison de leur race, leur couleur de peau ou leur appartenance géographique ». De tels propos constituent, selon l’ANIRA, « une violation manifeste des dispositions de la loi organique 23-14 relative à l’information, de la loi 23-23 encadrant l’activité audiovisuelle, ainsi que du décret exécutif 24-250 fixant le cahier des charges général applicable aux services de communication audiovisuelle ». L’ANIRA constate ce « dérapage » malgré ses mises en garde précédentes quant aux dangers liés à l’adoption d’un discours de haine et de racisme, et en dépit des sanctions déjà infligées à l’encontre de plusieurs chaînes audiovisuelles pour des infractions similaires. L’instance de régulation déplore qu’elle « continue, toutefois, d’observer de tels dérapages professionnels injustifiés et contraires à l’éthique, à l’encontre de nos frères africains avec lesquels nous partageons une histoire et un destin communs ». Cette affaire soulève également la question de la responsabilité éditoriale et de la formation des professionnels des médias. Après avoir auditionné les représentants de la chaîne incriminée, l’ANIRA a relevé « un manquement grave à l’éthique professionnelle et un manque de responsabilité dans le traitement d’un sujet sensible qui exigeait rigueur et professionnalisme, afin de préserver les valeurs de tolérance et de respect dans l’espace médiatique national ». Outre la suspension de diffusion pour dix jours à compter de minuit à la date de publication du communiqué, l’Autorité enjoint également aux responsables de la chaîne de « présenter des excuses officielles et explicites, accompagnées d’une dénonciation du contenu du reportage en question ». Cette sanction exemplaire s’inscrit dans un cadre plus large de lutte contre les discours de haine qui s’est intensifiée ces dernières années en Algérie, notamment avec l’adoption en 2020 de la loi 20-05 relative à la lutte contre les discours de haine. Cette législation, comme le rappelle l’ANIRA, « criminalise toute forme d’incitation au racisme ou à la haine et habilite les autorités compétentes à engager des poursuites à l’encontre des contrevenants ». Dans son communiqué, l’instance de régulation a tenu à rappeler les « liens historiques profonds » unissant l’Algérie aux peuples africains, de la lutte commune contre le colonialisme, aux défis de développement et de sécurité, soulignant que « tout discours à connotation raciste s’inscrit en porte à faux avec les principes de l’Algérie ». Cette position ferme témoigne de la volonté des autorités algériennes de préserver l’image du pays et ses relations historiques avec les nations africaines, tout en maintenant un niveau d’exigence élevé concernant l’éthique journalistique et le respect de la dignité humaine dans les médias. L’ANIRA a conclu son communiqué en renouvelant son appel à l’ensemble des médias audiovisuels à « se conformer strictement aux lois de la République et à respecter les règles de professionnalisme et d’éthique, afin de refléter l’image d’un média national responsable ».
Chokri Hafed