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Commerce du cabas : Un marché de 3 milliards de dollars à réguler

Selon une récente analyse du  Cercle de réflexion autour de l’entreprise (CARE), le commerce du cabas concernerait quelques centaines de milliers de personnes et représenterait un flux marchand annuel de 2 à 3 milliards de dollars.

Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a décidé au cours du dernier Conseil des ministres de prendre des mesures afin de régulariser le commerce informel transfrontalier, communément appelé « commerce du cabas ». Un phénomène qui a pris une ampleur considérable ces dernières années bien qu’ignoré par les autorités.

Une récente analyse du Cercle de réflexion autour de l’entreprise (CARE) estime que le commerce du cabas concernerait quelques centaines de milliers de personnes et représenterait un flux marchand annuel de 2 à 3 milliards de dollars, selon les sources interrogées à ce propos. Ces chiffres, bien qu’à prendre avec précaution selon CARE, donnent la mesure d’une activité qui dépasse largement le simple commerce de proximité. « Ce phénomène, bien qu’on le retrouve sous d’autres formes ailleurs, a pris en Algérie une ampleur tout à fait singulière. Il est devenu une modalité de subsistance institutionnalisée, à défaut d’être reconnue », souligne l’analyse du think tank économique.

Le commerce du cabas porte principalement sur des produits de première nécessité, des articles introuvables localement ou inaccessibles à des prix raisonnables, ainsi que des biens recherchés pour leur qualité perçue. Contrairement aux idées reçues, « il ne concerne ni des volumes industriels ni des réseaux organisés de fraude », précise CARE.

Loin d’être un simple parasite économique, ce commerce informel « remplit plusieurs fonctions sociales et économiques vitales ». Il agit comme « une soupape pour les ménages modestes, un filet de sécurité pour les sans-emploi, un révélateur de la demande populaire ».

CARE va plus loin en soulignant sa fonction de veille économique : « Il reflète les usages, les goûts, les carences du marché local. Il donne aux producteurs nationaux un accès, certes informel, mais précieux, à un laboratoire à ciel ouvert sur les tendances de consommation. » Cette dimension méconnue fait du commerce du cabas « un levier de montée en gamme et d’identification d’opportunités, bien plus utile que nombre de salons institutionnels ou d’études subventionnées ».

Pour CARE, l’ampleur de ce phénomène n’est pas fortuite. « Le commerce du cabas est le produit direct d’une succession de politiques publiques instables, parfois arbitraires, souvent contradictoires. »  Les critiques du secteur formel, « souvent formulées par des acteurs économiques installés, dénoncent un manque à gagner fiscal ou une forme de concurrence déloyale ». Mais CARE relativise ces griefs : « Ce commerce informel ne disqualifie pas l’offre nationale, il la stimule indirectement en lui révélant ses faiblesses. »

Les marges générées par ce commerce « relèvent de la survie, non de l’optimisation fiscale », et il « ne menace pas la production nationale » selon l’organisation. Cette réalité contraste avec les 2 à 3 milliards de dollars de flux qu’il représente, montrant l’écart entre la perception officielle et la réalité économique.

Face à ce marché colossal, CARE préconise un encadrement intelligent plutôt qu’une répression aveugle. L’organisation reconnaît les risques liés à « l’absence de traçabilité des produits » : risques sanitaires, médicaments contrefaits, cosmétiques non conformes.

Les solutions proposées visent à « sécuriser sans stigmatiser » : contrôles aléatoires a posteriori, formation ciblée des micro-opérateurs, normes d’étiquetage simplifiées. « Ce sont des mesures de bon sens, peu coûteuses », selon CARE.

Sabrina Aziouez

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