Culture

Madani Namoun s’éteint à l’âge de 81 ans: Une figure emblématique nous quitte

La scène culturelle est en deuil. Madani Namoun, l’une des figures les plus marquantes du théâtre, du cinéma et de la télévision algérienne, s’est éteint mardi  à Alger, à l’âge de 81 ans, des suites d’une longue maladie.

Né le 7 mars 1944 dans les ruelles pittoresques de la Casbah d’Alger, Madani Namoun était prédestiné à embrasser l’art sous toutes ses formes. Dès l’âge de dix ans, sa voix résonnait déjà sur les ondes radiophoniques, animant des émissions enfantines qui préfiguraient une carrière artistique d’une richesse extraordinaire. Cette précocité artistique, nourrie par l’effervescence culturelle de l’époque, allait façonner l’une des personnalités les plus attachantes du paysage culturel algérien. Son parcours, débuté sous l’égide de l’ORTF, s’est enrichi grâce à des mentors de renom comme Réda Falaki et Allal El Mouhib, qui ont su déceler et cultiver son talent naturel pour la scène.

L’engagement patriotique du jeune homme l’amène à rejoindre la Révolution à l’âge de dix-sept ans, mais cette parenthèse héroïque ne fait que renforcer sa détermination à servir son pays par l’art. Après l’indépendance, son retour aux planches se concrétise de manière spectaculaire avec son interprétation dans « Montserrat » d’Emanuel Robles au Théâtre National Algérien, représentation donnée en présence du président Ahmed Ben Bella. Cette performance marque son entrée officielle dans le monde professionnel du théâtre et consacre un talent qui ne cessera de s’épanouir au fil des décennies.

Artiste d’une polyvalence remarquable, Madani Namoun a exploré tous les registres de l’expression artistique. Son incursion dans le chant, sous la direction d’Abderrahmane Aziz, témoigne de cette soif d’exploration créative qui le caractérisait. Sa participation à des émissions télévisuelles novatrices comme « La boîte magique » révèle un artiste en phase avec son époque, capable de s’adapter aux nouveaux médias tout en préservant l’authenticité de son jeu. Son palmarès radiophonique impressionnant, comptant près de huit mille pièces, illustre un engagement sans faille pour son art et une productivité créative exceptionnelle qui force l’admiration.

Au cinéma, Madani Namoun a marqué l’histoire du septième art algérien par des interprétations mémorables dans des œuvres devenues cultes. Ses rôles dans « Leila wa Akhawatouha » en 1977 et « Abwab Essamt » en 1987 ont contribué à définir l’identité du cinéma national naissant, apportant une dimension humaine et authentique à des personnages qui résonnent encore aujourd’hui dans la mémoire collective. Sa présence à l’écran, empreinte d’une sincérité désarmante, transformait chaque apparition en moment de grâce cinématographique. La télévision a également bénéficié de son talent exceptionnel à travers des séries qui ont marqué plusieurs générations d’Algériens. De « Chafika… Baad Lika’a » en 2004 à « El Imtihen Ess’aab » en 2006, en passant par « Djouha El Aouda » en 2008, chaque production télévisuelle enrichissait son répertoire et renforçait son statut d’artiste populaire. Mais c’est avec « Soultane Achour el Acher » entre 2016 et 2017 que sa popularité atteint des sommets inégalés. Son interprétation magistrale du personnage d’Ammi Borhane a conquis un public intergénérationnel, démontrant que le talent authentique transcende les époques et les modes. Le ministre de la Culture et des Arts, Zouhir Ballalou, a rendu un hommage émouvant à l’artiste disparu, soulignant que « l’Algérie a perdu une figure emblématique, qui a excellé sur les planches du théâtre, à la télévision et dans le cinéma, une figure ayant marqué la mémoire des générations par des personnages immortels qu’il a incarnés avec un talent et une performance exceptionnels ». Ces mots officiels reflètent l’unanimité qui entoure la reconnaissance de son génie artistique et de sa contribution inestimable au patrimoine culturel national.

Père de deux garçons, Madani Namoun portait un regard lucide sur l’évolution de la culture dans le pays, tout en restant fidèle à ses racines de la Casbah. Son parcours illustre parfaitement le bouillonnement culturel de l’Algérie post-indépendance, période faste qui a profondément marqué sa carrière artistique.

Mohand Seghir

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