La loi de finances 2026 présentée au Conseil de la Nation : Le poids de l’économie informelle anime les débats
Le élus du Conseil de la Nation ont alerté lundi sur l’économie parallèle, lors de l’ouverture du débat sur la Loi de finances 2026 et interpellent le gouvernement sur le pouvoir d’achat.
Le ministre des Finances, Abdelkrim Bouzred, a présenté lundi devant les membres du Conseil de la Nation le projet de loi de finances pour l’exercice 2026, lors d’une séance plénière présidée par Azzouz Nasri, en présence de membres du gouvernement.
Le nouveau texte, adopté par l’Assemblée populaire nationale le 18 novembre dernier, prévoit un budget de dépenses de l’État s’élevant à 17.636,7 milliards de dinars pour 2026, tandis que les recettes budgétaires devraient atteindre 8.009 milliards de dinars durant la même année. Élaboré sur la base d’un prix référentiel du baril de pétrole à 60 dollars et d’un prix de marché estimé à 70 dollars, le projet table sur des recettes pétrolières de 2.697,9 milliards de dinars. Le ministre a précisé que ces mesures visent à « renforcer la performance de l’économie nationale, en particulier dans les secteurs hors hydrocarbures qui connaissent un essor qualitatif qu’il convient de valoriser ». Sur le plan macroéconomique, le ministre Bouzred a indiqué que l’économie nationale devrait maintenir son rythme de croissance au cours des trois prochaines années, avec un taux prévu de 4,1% en 2026, 4,4% en 2027 et 4,5% en 2028, ainsi qu’un taux de croissance hors hydrocarbures oscillant entre 6 et 7%, grâce à la dynamique observée dans plusieurs secteurs, notamment l’industrie, l’agriculture, la construction et les services.
Le budget prévisionnel comprend 6.005 milliards de dinars de dépenses de transfert, incluant les subventions destinées aux différents établissements publics et organismes sous tutelle, dont les universités et les centres de formation, les transferts destinés aux personnes englobant les pensions de retraite et l’allocation chômage, ainsi que les subventions aux produits de large consommation s’élevant à 675 milliards de dinars. Le texte propose également des amendements à la loi monétaire et bancaire, permettant de porter la durée de règlement des avances sollicitées par le Trésor public auprès de la Banque d’Algérie d’une à deux années, et d’élever leur plafond de 10% à 20% des revenus annuels.
34% de la masse monétaire échappe au circuit officiel
Cette présentation a donné lieu à un débat approfondi au sein de l’hémicycle, et notamment à la lumière de la présentation du rapport de la Commission des affaires économiques et financières qui a révélé une donnée alarmante : 34% de la masse monétaire en circulation échappe au circuit officiel, constituant l’un des principaux défis pour la régulation du marché financier. Dans son rapport préliminaire, la Commission des affaires économiques et financières du Conseil de la Nation a soulevé une série de préoccupations majeures adressées au ministre Bouzred. Les interrogations des sénateurs se sont concentrées principalement sur les moyens de réduire le déficit enregistré dans le solde global du Trésor public et d’améliorer le niveau de vie des citoyens. Les recommandations ont insisté sur la nécessité de prendre en considération le pouvoir d’achat des citoyens face à la hausse des prix, tout en demandant des éclaircissements sur la manière dont la croissance économique prévue se traduira concrètement sur le terrain et prendra en charge les préoccupations quotidiennes des citoyens.
Les membres de la commission ont également questionné le ministre sur l’amélioration des conditions d’investissement et les modalités de son soutien et de son encouragement. Ils ont sollicité des précisions concernant le volet budgétaire, les prévisions d’augmentation des recettes, la diversification de l’économie nationale et les mécanismes adoptés pour soutenir les investissements hors secteur des hydrocarbures, notamment dans les domaines de l’agriculture, de l’industrie et du tourisme, ainsi que sur la concrétisation effective de ces programmes. Les sénateurs ont interpellé le gouvernement sur les mécanismes de lutte contre le marché parallèle des devises, les moyens d’achever les projets à l’arrêt et de finaliser les programmes de développement local dans les secteurs de l’agriculture, du logement, de la pêche maritime et de la santé.
Parmi les dossiers sensibles abordés figure celui de l’importation de véhicules, avec une demande de reconsidération du dossier et l’octroi de licences d’importation pour les véhicules de moins de cinq ans. Les sénateurs ont également évoqué la faiblesse du recouvrement fiscal, le soutien à l’emploi et l’amélioration des conditions de travail. Ils ont par ailleurs réclamé des éclaircissements concernant le budget des onze nouvelles wilayas dont la création a été décidée par le président de la République, ainsi que sur le dossier de numérisation des secteurs sensibles d’importance économique, notamment celui des finances.
En réponse à ces préoccupations, le représentant du gouvernement a expliqué que « sur le plan des principes, la majorité des pays recourent à l’emprunt pour financer le déficit budgétaire », soulignant que « le véritable débat réside dans la connaissance de la capacité de l’économie nationale à supporter les niveaux d’endettement ». Il a affirmé que « l’économie algérienne est aujourd’hui capable de relever ce défi, selon la reconnaissance des institutions financières internationales, à leur tête le Fonds monétaire international ». C’est dans ce contexte qu’il a révélé le chiffre de 34% de la masse monétaire circulant hors du cadre officiel, représentant « l’un des principaux défis posés pour la régulation du marché financier ». Concernant les frais d’expédition des produits importés, le ministre a précisé que la mesure concerne les dépenses relatives aux opérations d’importation en vigueur jusqu’au 31 décembre 2025, dans le but de faciliter les opérations d’expédition, tandis que les autres opérations d’importation restent soumises au programme prévisionnel et au document de domiciliation bancaire conformément aux procédures en vigueur.
S’agissant de la numérisation du secteur des finances, le représentant du gouvernement a assuré que « l’opération touche à sa fin à travers les différents services et structures », saluant les efforts déployés au niveau des domaines de l’État, des impôts, du budget et de la comptabilité. Il a annoncé que le début de l’année prochaine verra « la révélation de toutes les réalisations accomplies, notamment en ce qui concerne les nouveaux services numériques adoptés dans le secteur ».
Concernant le budget des onze nouvelles wilayas annoncées par le président de la République, le ministre a expliqué que « ces wilayas étaient auparavant des wilayas déléguées et disposent de ce qu’il faut pour exercer pleinement leurs prérogatives et fournir le service public au citoyen », confirmant que « ce dossier fait l’objet d’une prise en charge globale ».
Amar Malki

