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Le journaliste algérien Mehdi Ghezzar interpellé puis relâché en France : Le double langage de Paris

Mehdi Ghezzar, entrepreneur et éditorialiste de la chaîne internationale AL24 News, a vécu une interpellation qui illustre les contradictions de la relation franco-algérienne actuelle. Arrêté mardi à Paris près de son domicile par les forces de l’ordre françaises, le journaliste algérien s’est vu signifier qu’il était inscrit au fichier S ainsi qu’au fichier des personnes recherchées, selon l’agence APS. Il s’agit là de dispositifs d’exception réservés aux individus considérés comme pouvant représenter une menace grave pour la sûreté publique, ce qui soulève de nombreuses questions quant aux motifs d’une telle classification. Retenu pendant plusieurs heures par la police française, Mehdi Ghezzar a été relâché mercredi matin, comme il l’a confirmé lui-même à AL24 News. Cette interpellation intervient dans un contexte de harcèlement répété dont se plaint le journaliste depuis plusieurs mois. « Sans aucune raison, c’est de l’intimidation », déplore-t-il, faisant état de contrôles systématiques lors de ses passages dans les aéroports parisiens, tant à l’entrée qu’à la sortie du territoire français, dans un climat d’hostilité qui ne cesse de s’alourdir.

La trajectoire professionnelle de Mehdi Ghezzar explique en partie l’attention dont il fait l’objet. Ancien chroniqueur de la radio RMC où il comptait parmi les voix les plus écoutées de l’émission Les Grandes Gueules, il a été écarté de l’antenne à la suite de ses prises de position sur le génocide à Gaza et de propos controversés sur André Azoulay, conseiller du roi Mohammed VI, et le Maroc. Désormais éditorialiste chez la chaîne publique AL24 News, il continue d’exercer son métier tout en subissant cette pression administrative.

L’agence APS souligne un paradoxe troublant dans cette affaire. « Finalement, et malgré le départ de Retailleau, rien n’a changé : ses méthodes sont bien enracinées au sein des institutions de la République française », constate-elle. Bruno Retailleau, l’ancien ministre de l’Intérieur connu ses positions anti-algériennes assumées, a quitté le gouvernement début décembre dernier. Son successeur Laurent Nunez a pourtant apporté un discours apaisé qui a permis de faire bouger les choses et de renouer le contact avec l’Algérie. Le nouveau ministre de l’Intérieur est d’ailleurs attendu à Alger où il a été précédé fin novembre par la secrétaire générale du Quai d’Orsay, Anne-Marie Descôtes. Les prémices d’un réchauffement entre Alger et Paris constatées depuis quelques semaines tardent manifestement à se traduire en actes concrets sur le terrain, notamment du côté français où les mesures ciblant spécifiquement les voyageurs algériens ont subitement refait surface. Les observateurs se demandent s’il s’agit d’un double langage de Paris ou d’une action néfaste des relais de l’ancien ministre Retailleau dans l’administration pour mettre en difficulté Laurent Nunez dans son entreprise de renouer le dialogue avec l’Algérie et bloquer la phase de réengagement entre les deux pays.

Au-delà du cas Ghezzar, de nombreux témoignages concordants font état d’un mauvais accueil réservé aux voyageurs algériens dans certains aéroports français, particulièrement en dehors de Paris. Les Algériens ne sont pas refoulés mais subissent de longs délais d’attente et des tracasseries avant de pouvoir entrer sur le territoire français. À la sortie, ils sont interrogés sur l’objet de leur visite et leur lieu de séjour. À l’entrée, ils doivent présenter l’ensemble des documents avec lesquels ils ont obtenu le visa, incluant hébergement, réservation d’hôtel, ressources financières et assurance voyage. Ces comportements ont été signalés dans plusieurs aéroports français, créant un décalage manifeste entre les intentions affichées au plus haut niveau et la réalité vécue par les ressortissants algériens.

Salim Amokrane

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