Relance des entreprises confisqués dans le cadre de lutte contre la corruption : Un projet économique global
Le ministre de l’Industrie Yahia Bachir a souligné jeudi que la relance des entreprises confisquées pour corruption est un « projet économique global », lors d’une visite à Guelma où six unités récupérées font l’objet d’un plan de réhabilitation, incarnant la volonté de l’État de transformer un patrimoine estimé à plus de 1500 milliards de dinars en outil de souveraineté économique et de création d’emplois.
Six ans après le début de la grande offensive judiciaire contre la corruption, l’Algérie entre dans une phase cruciale de valorisation économique des biens confisqués. Le ministre de l’Industrie, Yahia Bachir, a donné jeudi à Guelma le ton d’une nouvelle doctrine gouvernementale en affirmant que la relance des unités industrielles récupérées dans le cadre de la lutte contre la corruption « n’est pas simplement la relance d’une activité à l’arrêt, mais un projet économique global ». Intervenant dans les locaux de la filiale Céréales et Conserveries de l’Est, située dans la commune d’El Fedjoudj, ancienne propriété du groupe Amor Benamor désormais rattachée au Groupe public agro-industries AGRODIV, le ministre a rappelé la « forte volonté de l’État de transformer les actifs industriels récupérés en véritable levier de production fondé sur une bonne gouvernance ». Cette visite, qui a concerné six unités industrielles récupérées dans le cadre des affaires de lutte contre la corruption, « procède de l’approche de terrain adoptée par le ministère, en exécution des directives du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, visant à relancer l’industrie nationale sur des bases économiques solides et à renforcer son rôle dans la création de la richesse et d’emplois, ainsi que dans la réalisation de la sécurité industrielle et alimentaire », a précisé Yahia Bachir.
L’ampleur du défi est considérable. Depuis 2019, dans le sillage du mouvement populaire du Hirak et de l’élection du président Tebboune, l’État a récupéré un patrimoine économique colossal : plus de 350 entreprises, 15 000 hectares de terrains agricoles et industriels, ainsi qu’un important parc immobilier estimé à plus de 12 000 logements et locaux commerciaux, selon les chiffres du ministère des Finances. La valeur totale de ces actifs, autrefois gelés ou laissés à l’abandon, représente un potentiel économique supérieur à 1500 milliards de dinars, soit 11,58 milliards de dollars. Parmi les entreprises confisquées, près de 65% relèvent du secteur industriel et commercial, avec une forte concentration dans l’agroalimentaire, les matériaux de construction, la logistique et le textile.
La stratégie de reconversion prend une forme concrète. Le ministre a souligné à Guelma que « la mission de relance de ces unités récupérées, dans cette wilaya, spécialisées dans les industries agroalimentaires de transformation, a été confiée au groupe public AGRODIV en vue de la garantie d’un approvisionnement régulier en matières premières, le respect des normes de qualité et de sécurité alimentaire, et l’assurance d’une interconnexion de ces unités avec les réseaux de distribution et les marchés nationaux ». Cette approche révèle une volonté de ne pas se contenter d’une simple reprise administrative, mais de réinsérer ces outils de production dans des chaînes de valeur cohérentes, adossées à des groupes publics disposant des capacités logistiques et commerciales nécessaires. Après avoir écouté un exposé détaillé sur le tissu industriel local qui compte 89, Yahia Bachir a considéré que « certaines unités industrielles de nature stratégique, comme l’unité CYCMA de production de cycles et de motocycles, font l’objet d’une attention particulière car elles représentent un modèle pour le développement d’une industrie mécanique nationale compétitive ». La visite de cette entreprise publique économique, située au chef-lieu de wilaya, a permis au ministre de suivre une présentation exhaustive du plan de relance des activités avant d’inspecter les différents ateliers dédiés à la production de vélos, de motocycles et de tricycles pour personnes à mobilité réduite. L’objectif affiché est de reconstruire des filières industrielles complètes, capables de substituer les importations et de générer des emplois durables. Sur les 350 entreprises confisquées, environ 120 structures ont déjà été restituées à l’État, tandis qu’une quarantaine ont repris une activité effective grâce à un plan de relance ciblé mené par le ministère de l’Industrie. Pour le ministre l’objectif est de faire de ces actifs récupérés un instrument de « sécurité industrielle et alimentaire ».
Sous la conduite du Premier ministre Sifi Ghrieb, nommé récemment, le gouvernement entend transformer ces avoirs issus des affaires de corruption en véritables outils de création de richesse et de souveraineté économique.
Amar Malki

