Procès de Tayeb Louh et de Saïd Bouteflika : Des révélations ahurissantes
Très attendu, le procès de l’ancien ministre de la Justice, Tayeb Louh, s’est finalement ouvert aujourd’hui après avoir été reporté le 26 septembre dernier. Et comme prévu, le procès de l’affaire dite des SMS a été riche en révélations retentissantes mais aussi et surtout en déclarations surréalistes. Car le procès a vu défiler à la barre d’anciens hauts responsables. En plus de l’ancien ministre, l’ex-inspecteur général et autres anciens cadres du département de la Justice, le frère et conseiller du défunt président Bouteflika, Saïd Bouteflika et le patron de l’ETRHB Ali Haddad sont impliqués dans cette affaire. Un procès qui doit également voir défiler 36 témoins VIP, dont l’ancien premier ministre Noureddine Bedoui, l’ancien secrétaire général de la présidence de la République, Habba Okbi, des magistrats et l’homme d’affaires Mahieddine Tahkout. Une affaire qui a trait à l’abus de fonction, aux interférences et aux pressions exercées sur les magistrats dans le traitement de plusieurs dossiers allant des élections à l’affaire Sonatrach II
Les auditions ont été inaugurées par le passage de l’ex-inspecteur général du ministère de la Justice, El Hachemi Tayeb, lequel n’a pas hésité à charger son ancien ministre, en affirmant qu’en tant qu’exécutant il se chargeait du rôle d’intermédiaire entre Tayeb Louh et les magistrats. Or, le point d’orgue de l’audience a été la prestation du principal accusé. Tayeb Louh a joué la carte du procès politique pour tenter de se dédouaner, mettant à l’amende tantôt « le manque de professionnalisme » des magistrats, et tantôt son successeur Belkacem Zeghmati qui occupait alors le poste de procureur général de la Cour d’Alger avant d’être limogé après avoir émis un mandat d’arrêt international contre Chakib Khelil dans le cadre de l’Affaire Sonatrach II. Une affaire qui a d’ailleurs été au cœur du procès. Tayeb Louh a d’ailleurs été confronté par le juge et le procureur aux preuves matérielles collectées, notamment les SMS retrouvés sur les sept téléphones portables de l’ancien Garde des Sceaux. Des SMS échangés notamment avec Saïd Bouteflika. Aux interférences sollicitées par Noureddine Bedoui dans une affaire de garde d’enfants, aux instructions adressées aux magistrats pour favoriser le FLN dans le traitement des candidatures et des résultats des élections, ou encore l’intervention dans le procès opposant le président de l’USMA Saïd Allik à Ali Haddad en faveur de ce dernier, Louh oppose des arguments procéduriers, même s’il a été établi que les instructions imposées aux magistrats sont loin d’aller dans le respect des procédures ou des lois de la République. Mais, c’est l’annulation du mandat d’arrêt contre Chakib Khelil, son épouse, Nadjat Aaraft, et leurs deux fils qui a donné lieu aux déclarations les plus ahurissantes. Interrogé sur le fait que cette annulation ne respectait en rien la procédure, Louh qui a d’abord mis à l’index une erreur de Belkacem Zeghmati, et a indiqué que cette affaire était traitée en concertation avec l’ex-président Bouteflika. Il a fini par lancer un « pourquoi pas » !!!
Pour sa part, Saïd Bouteflika a assumé l’ensemble de ses agissements dans cette affaire, en affirmant qu’il était l’intermédiaire entre l’ex-ministre de la Justice et le défunt président Bouteflika. Il ajouté que l’affaire Chakib Khelil n’était pas une « affaire de justice, mais une affaire politique », avant d’ajouter que son frère « n’allait tout de même pas poursuivre Chakib Kheli », au regard des liens profonds qui le lient aux Bouteflika.
Hocine Fadheli