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Des moudjahidate évoquent leur lutte pour l’indépendance : Djamila Boupacha appelle les jeunes à protéger leur pays

Elles se remémorent les années de lutte et de sacrifice avec plein de rêves en tête. Malgré le poids des années passées dans les geôles et les maquis, les Moudjahidates ont appris à se débarrasser de l’égoïsme et à rêver pour les autres, pour les nouvelles générations.

Des souvenirs remontent à la surface à l’occasion du 67ème anniversaire du déclenchement de la guerre de libération. Des Moudjahidates telles que Hassiba Benyelles et Djamila Boupacha parlent et évoquent leur combat pour une Algérie digne et indépendante. Hassiba, âgée à présent de quatre-vingt ans, se souvient encore de cette nuit du mois de février 1957 où elle a quitté, dans l’obscurité, sa maison familiale située à Sétif. Elle n’avait encore que 17 ans lorsqu’elle était partie, déguisée en homme, pour retrouver ses « frères moudjahidine ».  « J’étais au primaire lorsque le maître d’école nous a demandé, au terme d’une fête de fin d’année, de faire ovation à la France, ce que j’ai refusée de faire, faisant plutôt des acclamations pour mon pays, en criant haut et fort « Tahya El Djazaïr » (vive l’Algérie), suite à quoi le maître d’école m’a donné une grosse gifle devant tous mes camarades », raconte-t-elle faisant remarquer que c’est à partir de là qu’elle a commencé à ressentir de la rancœur envers la France. «Un sentiment que je ne cesserai d’éprouver jusqu’à ma mort » assure-t-elle.

Après l’Indépendance, Hassiba benyelles ne cessera jamais de rendre des visites aux familles des Chouhadas et de ces compagnons d’armes. « Ils ont laissé des enfants que je considère comme les miens et je suis fière d’eux », affirme-t-elle. D’ailleurs, nombre d’élèves de l’Ecole des cadets de la révolution de Tlemcen l’appellent « Maman » pour avoir travaillé à la Gendarmerie nationale et ayant ouvert son domicile familial aux enfants de l’Ecole qui lui sont très reconnaissants. Elle invite, à ce titre, les enfants d’aujourd’hui à travailler et à étudier pour contribuer à l’édification de l’Algérie par fidélité au serment des martyrs qui ont sacrifié leurs vies, ajoutant que l’Algérie est la terre, la vie et l’avenir de notre jeunesse que tout un chacun doit préserver », conclut-elle enfin en guise d’appel aux nouvelles générations qui devront préserver leur pays des dangers qui l’entourent surtout en cette période précise.

Pour sa part, Djamila Boupacha qui n’a pas pu décroché son diplôme d’infirmière n’ayant pas pu aller au bout de sa formation à l’hôpital de Béni Messous. Et pour cause, elle avait choisi  de rejoindre la révolution alors qu’elle n’avait que 17 ans. Djamila se remémore cette image « d’injustice, d’oppression, de pauvreté et de privation qu’enduraient les enfants du pays et qu’elle ne pouvait supporter ». « Mener la révolution et arracher l’indépendance » étaient les buts ultimes de cette héroïne, rebelle et fidaeia. « J’ai été formée à manier les armes et à utiliser le matériel de soins… nous avions dû franchir bien des montagnes entre Sétif et Tébessa, nous avions lutté et assisté à la mort de nos frères, c’était tellement dur de voir nos compagnons d’armes périr l’un après l’autre, mais l’Algérie mérite les sacrifices consentis pour son indépendance », témoigne-t-elle avec émotion tout en assurant que lorsqu’elle a quitté son domicile, elle était convaincue que son retour était incertain.  «Je savais également que ma mère, ayant peur pour moi, allait m’empêcher de rejoindre les rangs de la résistance. Seule, j’ai décidé de mon propre sort, pris le soin d’informer, à travers quelques mots, ma mère que je partais prêter aide à nos frères moudjahidine », poursuivait-elle tout en rappelant qu’elle s’était faite passer pour un homme avant de quitter son domicile la nuit.  «D’ailleurs la terreur de ce jour là je la ressens jusqu’à présent » se rappelle-elle.

Après avoir marqué de son empreinte l’histoire, en devenant l’icone de la révolution de tout un peuple et la muse de l’artiste peintre espagnol Pablo Picasso, Boupacha a fait couler beaucoup d’encre, en mettant à nu le visage hideux et barbare du colonisateur qui lui a infligé toute forme de torture lors de sa détention, après son arrestation en 1960 dans le domicile familial à Dely Brahim. Défendue par l’avocate franco-tunisienne Gisèle Halimi avec le soutien de Simone de Beauvoir, l’affaire de Boupacha a rallié l’opinion publique et annulé, partant, la peine de mort prononcée à l’encontre de la vaillante moudjahida. Elle sera  relâchée après les accords d’Evian. « Je me suis évanouie à l’annonce de la nouvelle, ce fut une utopie enfin devenue réalité », se rappelle-t-elle le jour de l’annonce de l’Indépendance tout en estimant que « l’allégresse de l’indépendance était certes incommensurable mais difficile aussi, j’avais tout de suite pensé aux familles de nos compagnons d’armes tombés au champ d’honneur, je pensais surtout à leurs parents qui attendaient, désespérément, leur retour ».

Akli Amor

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