Révision de la loi portant activité syndicale : Les syndicats divergent
La réunion du Conseil des ministres s’est penchée dimanche sur le projet de Loi modifiant et complétant la Loi n 90-14, du 02/06/1990, relative aux modalités d’exercice du droit syndical. Un texte qui doit renforcer les droits et libertés syndicales, tout en éloignant les syndicats des cercles de décisions et de la sphère politique.
Bien que les organisations syndicales appellent depuis de nombreuses années au renforcement des libertés syndicales, beaucoup de syndicalistes préfèrent aujourd’hui réserver leurs opinions et attendent de lire les nouvelles dispositions et les amendements proposées avant de s’exprimer sur la teneur du texte et sur ses objectifs. Il est néanmoins des thèmes qui suscitent déjà le débat au sein du mouvement syndical et qui fait déjà l’objet de divergences. Il s’agit notamment de la question des rapports qu’entretient le monde syndical avec le monde politique. Et en cela, les lectures diffèrent d’une organisation à l’autre. Si du côté de l’UGTA, on estime que certains syndicats ne sont en réalité que des arrières boutiques de partis politiques, certaines organisations autonomes pensent qu’il est très difficile de séparer l’action syndicale de l’action politique.
En effet, de l’avis du secrétaire général de l’Union de wilaya de Béjaïa de l’UGTA Abdelaziz Hamlaoui, « il faudra avant tout mettre en application les lois du Code du travail en vigueur », citant l’exemple du secteur de l’éducation qui, dit-il « compte 28 syndicats à l’échelle nationale représentant à elles toutes moins de 20% de la totalité des travailleurs de ce secteur ».
Sur un autre volet, ce responsable de l’UGTA reconnait que plusieurs organisations syndicales dévient de leurs objectifs en s’inscrivant carrément dans des actions « purement politiques », estimant que « dans le secteur de l’éducation par exemple, le nombre de syndicats ne devrait pas dépasser cinq organisations à l’échelle nationale ».
L’autre représentant des travailleurs, en l’occurrence Nabil Ferguenis, du syndicat national des fonctionnaires de l’éducation estime que « l’erreur » commise auparavant c’est d’avoir poursuivi l’octroi d’agréments à des syndicats qui en réalité ne représentent aucunement les travailleurs, préconisant « la mise en place d’un régime déclaratif en remplacement à celui d’octroi d’agréments ». Il estime en ce sens que «la réelle représentativité se mesure sur le seul degré de mobilisation », avant de reconnaitre que des mouvements de grèves et autres actions avaient des arrières pensées politiques.
Le représentant du SNAFE estime qu’ « il est certes difficile de séparer le syndicaliste de l’homme politique », mais il admet que « des mouvements ont été déclenchés, avec des visées purement politiques ».
Dans tous les cas, ce qui est certain, c’est que tous admettent qu’il ya une pléthore de syndicats, notamment dans le secteur de l’éducation, pour ne citer que celui là, mais aussi que toutes les grèves déclenchées n’ont pas souvent comme objectifs la satisfaction des revendications socioprofessionnelles mais répondent plutôt à des schémas établis avec comme seul objectif, de saper une action mise en place par le ministère de tutelle ou carrément les autorités du pays. C’est le cas des grèves, programmées à la veille d’un événement politique comme l’organisation d’une élection. Et les exemples à ce sujet ne manquent pas. Pour rappel, le président de la République a indiqué dimanche en conseil des ministres que « l’exercice du droit syndical compte parmi les principaux fondements de la Démocratie et la Constitution de 2020 garantit et consacre ce droit », précisant que « la révision de la loi portant modalités d’exercice de l’action syndicale doit être adaptée aux résolutions du bureau international du Travail (BIT) ». « Ladite loi doit respecter les normes de représentation effective des syndicats, en associant les syndicats sectoriels à la mise en place de mécanismes juridiques pour évaluer la performance syndicale », a soutenu le président de la République. M. Tebboune a insisté, en outre, sur l’importance de « distinguer l’action syndicale de la responsabilité dans la gestion et de l’appartenance politique ».
Les modifications apportées à ladite loi visent à « renforcer les droits acquis des travailleurs, en permettant aux organisations syndicales de constituer des Fédérations, Unions et Confédérations quelles que soient la profession, la branche et le secteur d’activité auquel elles appartiennent », à la faveur de « la mise en conformité des dispositions de la Loi précitée avec les dispositions de la Convention internationale du Travail ». Lesdites modifications permettront « d’assurer la protection du délégué syndical contre toute décision de licenciement arbitraire, ayant un lien avec l’exercice du droit syndical », en prévoyant des mécanismes supplémentaires devant permettre sa réintégration légale en cas de refus manifeste de l’employeur de procéder à sa réintégration.
Boubekeur Amrani