Salaires, pouvoir d’achat et inflation : Le sens d’une appréciation du dinar
Le président de la République Abdelmadjid Tebboune a assuré dimanche soir que les revenus engrangés cette année permettront de financer une hausse des salaires et de l’allocation chômage dès janvier 2023, mais aussi d’espérer une réévaluation du dinar.
Le pouvoir d’achat est aujourd’hui au cours des préoccupations des plus hautes autorités de l’État. Une question qui a, bien entendu, été évoquée par le président de la République lors de la rencontre périodique avec les médias. Une rencontre qui a permis à Abdelmadjid Tebboune de réaffirmer l’engagement pris au mois d’avril dernier concernant la hausse des revenus des ménages. « Je m’engage à revoir à la hausse les salaires et l’allocation chômage ». Et de préciser que ces décisions allaient être introduites dans le cadre de la loi de finances 2023 à travers l’augmentation du point indiciaire ou directement des salaires à un niveau raisonnable pour respecter les équilibres mais aussi pour ne pas générer de l’inflation. C’est dans ce sens qu’il a évoqué « la possibilité d’augmenter les salaires à la faveur d’une seule décision ou de manière progressive tout au long de l’année », relevant toute l’importance de prendre « des mesures précises pour qu’il n’y ait pas de distribution de la rente qui contribuerait à la création de l’inflation ».
Des augmentations qui seront possibles au regard de la marge de manœuvre qu’offrent aujourd’hui les revenus engrangés cette années, notamment à la faveur de la hausse des exportations en valeur et en volume, particulièrement dans les hydrocarbures. Une évolution de la situation économique qui tend à permettre à l’Algérie de disposer des capacités pour « récupérer, à moyen terme, la valeur du dinar ». Une déclaration loin d’être anodine d’autant qu’elle ouvre la voie à une appréciation du dinar au cours des prochains moins. Bien que la gestion de la politique monétaire et des changes relève de la Banque d’Algérie, le propos tenu par le président de la République dimanche permet de s’attendre à un ajustement du régime des change du dinar, soumis à un régime de flottement dirigé. Une politique des changes qui a induit une dépréciation continue du dinar depuis au moins 2014, après le retournement du marché pétrolier laquelle a induit une baisse des revenus pétroliers. Argument qui a d’ailleurs été, à maintes fois, mis en avant par l’Autorité monétaire afin de justifier la baisse de la valeur du dinar jusqu’à atteindre des taux de change nominaux records à plus de 160 dinars pour un euro. Aujourd’hui avec l’appréciation du dollar, le billet vert s’échange à plus de 145 dollars. Il est cependant vrai que la dépréciation du dinar a également servi d’outil pour apporter certaines solutions à certaines problématiques immédiates de la politique économique. Elle a ainsi permis de gonfler des recettes budgétaires exprimées en dinars, dans un contexte de baisse des revenus pétroliers et gaziers, qui sont, eux, exprimés en dollars. Elle a également permis d’affaiblir le pouvoir d’achat à l’import en renchérissant les coûts des produits importés. Mais cette politique a également eu un effet pervers, celui d’alimenter l’inflation. Dans un contexte d’une inflation galopante au niveau mondial, le maintien d’un dinar déprécié ne semble plus pertinente d’autant plus que les priorités ont changé. L’appréciation de la monnaie nationale servirait ainsi d’instrument pour contenir l’inflation et contribuerait à améliorer le pouvoir d’achat. Ce serait ainsi un instrument de politique monétaire qui servirait un objectif de politique socio-économique.
Samira Ghrib