Lutte contre le terrorisme et le crime organisé transfrontalier au Sahel : L’Algérie met le CEMOC en ordre de bataille
L’Algérie a pris l’initiative jeudi de tenir à Alger une session extraordinaire du Conseil des chefs d’état-major des pays membres du Comité d’État-major Opérationnel Conjoint (CEMOC) qui regroupe l’Algérie, le Niger, la Mauritanie et le Mali.
Pour l’occasion, tout le monde a répondu présent. Y ont assisté en effet le général d’armée, Saïd Chanegriha, chef d’état-major de l’Armée Nationale Populaire, le général de corps d’armée, Mokhtar Bollé Chaâbane, chef d’état-major général des armées de la Mauritanie, le général de division Oumar Diarra, chef d’état-major des armées du Mali et le général de division Salifou Modi, chef d’état-major général des Armées du Niger.L’objectif premier de cette réunion a été, selon un communiqué rendu public par le ministère de la Défense nationale, de «débattre et d’entériner de nouveaux projets de texte relatifs à ce mécanisme de coopération sécuritaire, s’inscrivant dans le cadre de la redynamisation de la coopération et de la consolidation de l’interopérabilité entre les pays membres». La décision de l’Algérie d’enrichir les textes du CEMOC et de redynamiser la coopération sécuritaire dans la sous-région intervient au bon moment, surtout que des pays comme le Mali et le Niger ont besoin urgemment d’être soutenus dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.
De nombreuses villes du centre du Mali ont été régulièrement ces trois derniers mois les cibles d’attaques terroristes qui ont fait des centaines de morts. Encore en phase de reconstruction, l’armée malienne a du mal à enrayer la menace malgré le soutien de centaines d’éléments de la société militaire privée russe Wagner. Dans certaines régions du Nord, elle est complètement absente. Ce sont désormais les groupes affiliés à la Coordination des Mouvement de l’Azawad (CMA) qui ont décidé d’assurer eux-mêmes la sécurité de localités comme Kidal, Gao ou Ménaka. La situation n’est pas meilleure au Niger puisque des raids terroristes y sont signalés presque chaque mois, notamment dans la région de Diffa, entraînant des dizaines de milliers de réfugiés.
Dégradation de la situation sécuritaire
La dégradation continue de la sécuritaire au Mali ou au Niger est évidemment un motif d’inquiétude pour l’Algérie du fait qu’elle partage avec ces pays de longues frontières. C’est certainement la situation inquiétante que traversent ces pays qui a convaincue aujourd’hui l’Algérie de mettre le CEMOC en ordre de bataille. Dans ce sens, l’ANP a une expérience non négligeable en matière de lutte contre le terrorisme dont elle peut faire bénéficier les pays de la sous-région.La session extraordinaire du Conseil des chefs d’état-major des pays membres du CEMOC a d’ailleurs constitué, selon le communiqué du ministère de la Défense nationale, «une occasion pour échanger les points de vue et les évaluations de la situation sécuritaire prévalant dans la région ». Les échanges entre les chefs d’état-major des armées des pays membres du CEMOC ont portés particulièrement «sur l’approche sécuritaire adoptée dans le cadre de la lutte contre toutes formes de menaces sécuritaires, particulièrement la lutte contre le terrorisme, le crime organisé transfrontalier et l’immigration clandestine».
Comment va se décliner concrètement la rencontre de jeudi ? Lors de sa prise de parole, le Général d’Armée Saïd Chanegriha, Chef d’État-major de l’ANP, a indiqué que la rencontre s’inscrivait «dans une dynamique commune et efficiente de coopération et de coordination opérationnelles». «La concrétisation des aspirations des peuples de la sous-région à la paix, à la sécurité et au développement socio-économique, à travers la coopération et la consolidation des liens de solidarité, d’amitié et de bon voisinage entre les pays et les armées de la sous-région demeurent le principal objectif de la tenue de cette session », a soutenu le Général d’Armée Saïd Chanegriha.
Se voulant plus précis, le Chef d’État-major de l’ANP a mis l’accent sur le fait que « l’objectif ultime étant de traduire l’aspiration des peuples à la paix, la sécurité et le développement socio-économique de la sous-région et ce, à travers des actions réfléchies (…). ». En quoi consistent ces actions ? Celles-ci, a expliqué le chef d’État-major de l’ANP, visent «essentiellement l’endiguement des activités des groupes terroristes et celles des criminels, la consolidation de la résilience des populations pour y faire face et l’occupation du terrain, en vue de mettre sous contrôle permanent les anciens refuges et axes de déplacement des groupes terroristes».
Il existe donc un large spectre dans lequel l’Algérie peut apporter sa contribution à la lutte contre les groupes terroristes au Sahel, cela à commencer par la formation, le renforcement des capacités, l’octroi de matériels, l’échange de renseignement, le transport ou la reconnaissance. En revanche, il ne faut probablement pas s’attendre à ce que l’ANP participe à des combats sur des théâtres extérieurs, actions que la Constitution n’autorise que dans cas bien précis. Mais quoiqu’il en soit, l’initiative de l’Algérie est une bonne nouvelle pour les pays du Sahel.
Khider Larbi