La communauté issue de l’immigration en colère après la mort d’un adolescent à Nanterre : La France malade de son racisme
Entre le « I can’t breathe » de l’afro-américain George Floyd, assassiné le 25 mai 2020 à Minneapolis par la police américaine et le « il m’a eu » du petit Nahel Merzouk, 17 ans, tué froidement à bout portant par balle, mardi passé, à Nanterre, il y a tout de même ce « shoote-le » de la police française qui s’assimile à l’US Police. Tout y est ! Du délit de faciès, à la xénophobie et la haine raciale, notamment au sein des rangs de la police française. Celle-ci et grâce à l’article scélérat de la loi Cazeneuve, use des armes comme en 1961 sur les bords de la Seine. Rien n’y a changé depuis. La politique ségrégationniste française s’illustre chaque jour un peu plus sous Macron pour stigmatiser le Maghrébin, l’Arabe et le Musulman qui doit, selon l’un des policiers, « retourner en Afrique » en dépit de son droit de sol et de son droit de sang.
La France malade de ses banlieues ? C’est l’idée que l’on veut imposer dans l’Hexagone depuis la mort du jeune Nahel, un franco-algérien d’à peine 17 ans, tué par balle à bout portant par un policier lors d’un contrôle d’identité. Une mort qui a mis en émoi toute une communauté stigmatisée par la classe politique française, qui s’est lancée dans une surenchère dans le débat sur l’immigration et particulièrement l’immigration d’origine algérienne, dans l’espoir de quelques gains électoraux. Car si le déchainement de colère qui a suivi la mort du petit Nahel et qui a plongé plusieurs villes françaises dans un climat insurrectionnel est le reflet de quelque chose, c’est bien que la France, voire l’Europe, est malade de son racisme et de sa xénophobie. Une réalité que la classe politique feint d’ignorer, mais qui, vue d’ailleurs, et parfaitement claire.
Un constat qui a d’ailleurs été souligné par le Nations unies. La porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, Ravina Shamdasani, réagit pour épingler la police française qu’elle accuse de « racisme et de discrimination ». L’ONU demande à la France de « se pencher sérieusement » sur la question de ces violences policières. Le pays des droits de l’Homme, avant d’être mis au piquet, est ainsi mis au banc des accusés par l’institution que préside Antonio Guterres à la suite de l’assassinat, mardi à Nanterre, en banlieue parisienne, du jeune Nahel, tué par un policier lors d’un contrôle routier. « C’est le moment pour le pays de s’attaquer sérieusement aux profonds problèmes de racisme et de discrimination raciale parmi les forces de l’ordre », avait déclaré Ravina Shamdasani. Une accusation vite réfutée par le ministère français des Affaires étrangères en dépit des déclarations du président Macron qui trouve ce meurtre « inexplicable et injustifiable » sans toutefois demander pardon à la famille de la victime et à sa communauté. Pourtant, cette réaction onusienne n’est pas la première du genre puisqu’en mars 2023, la Commission nationale consultative des droits de l’homme avait alerté l’ONU au sujet d’une grave augmentation des violences policières, notamment sur les multiples violences physiques lors de contrôles ou de garde à vue.
Racisme décomplexé
Poursuivant sa politique du tout sécuritaire inspirée de l’idée de Sarkozy de procéder au nettoyage des banlieues au « karcher » lors des émeutes de Clichy-sous-Bois en 2005, en banlieue parisienne, Macron excelle dans le zèle, déploie sa force et la renforce de 45.000 policiers et gendarmes. Le président français continue cependant à soutenir l’article 435 assassin de la loi Cazeneuve, une loi considérée de « scélérate » qui permet aux policiers de faire usage de leur arme à feu en cas de « refus d’obtempérer ». Le fait est aussi que la réaction des banlieues à la mort du petit Nahel procède d’un tout et peut être vue comme étant la goutte qui a fait déborder le vase. Car, en plus de la marginalisation sociale et la discrimination systématique des communautés issues de l’immigration en France, c’est la stigmatisation de cette même communauté qui alimente une forme de racisme décomplexé au sein de la société française qui devrait être à l’index. Un racisme assumé, promu par les médias lourds, surtout certaines chaines d’information aux mains d’intérêts économiques ouvertement islamophobes et proches de la droite, pour ne pas dire de l’extrême droite française. Un racisme qui s’est également invité dans les milieux sportifs et footballistiques français. Les affaires Galtier, Benzema et Le Graët (du nom de l’ex-président de Fédération française de football) en sont la parfaite illustration. Une stigmatisation qui a également été embrassée par les milieux politiques français qui font de la question de l’immigration le sujet principal de leur discours politique. C’est dans ce contexte que verse le débat vain et stérile sur les accords de 1968 sur l’immigration entre la France et l’Algérie, les propos consternants de Gabriel Attal, ministre français des comptes publics sur les retraités résidants en dehors de l’UE, ou encore la polémique lunaire sur l’hymne national algérien (Kassaman).
Vives réactions en Algérie
Pour sa part, l’Algérie dont est originaire la famille de la victime, n’est pas restée en marge et annonce dès jeudi dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger continuer « à suivre avec une très grande attention les développements de l’affaire de la disparition « brutale et tragique du jeune Nahel en France ». Le MAE ajoute avoir « appris avec choc et consternation la disparition brutale et tragique du jeune Nahel et les circonstances particulièrement troublantes et préoccupantes dans lesquelles elle est intervenue » et dit « faire confiance au gouvernement français à assumer pleinement son devoir de protection, soucieux de la quiétude et de la sécurité dont doivent bénéficier nos ressortissants sur leur terre d’accueil ». Le même communiqué « avertit » que le gouvernement algérien continuait à suivre avec « une très grande attention » les développements de cette « affaire tragique, avec le souci constant d’être aux côtés des membres de sa communauté nationale au moment de l’adversité et de l’épreuve ». La classe politique algérienne a, elle aussi, réagit à cet assassinat pour dénoncer un acte « raciste ». Le FLN indique dans son communiqué que cette « effroyable tragédie révèle le degré d’irresponsabilité dont ont fait preuve les policiers français devant un jeune sans défense ». Le parti que dirige Baadji s’interroge « sur les motifs qui ont conduit à faire feu sur le jeune Algérien et à le tuer de sang-froid » et affirme que « seules une enquête sérieuse et la punition des coupables peuvent rendre justice à la famille de Nahel et à la communauté algérienne, qui est traitée selon la politique de deux poids deux mesures ». De son côté, le parti de Bengrina, le mouvement affiche son « entière solidarité avec la communauté algérienne en France, suite à la mort tragique du jeune Nahel, tué par un policier français lors d’une intervention « controversée » et se dit « très inquiet des retombées que ces incidents pourraient avoir à l’avenir ». El Bina accable « les autorités françaises qui « ont l’entière responsabilité de mener une enquête transparente pour faire toute la lumière sur les circonstances de cette agression et rendre justice » et appelle les autorités françaises à « assurer une meilleure protection à notre communauté et à prendre davantage de mesures pour empêcher tout dépassement à son encontre ». Le Mouvement Ennahda a dénoncé, quant à lui, « un acte raciste et extrémiste ». Ce qui est loin d’être faux eu égard aux propos tenus par l’ancien candidat à la présidentielle française, Eric Zemmour, qui considère que ces ressortissants étrangers sont des « délinquants venus de l’émigration ». Des propos qui rejoignent ceux de l’extrême droite stigmatisant les maghrébins et l’émigration en général et où le maghrébin est assimilé à un « trafiquant de drogue, à défaut d’être un terroriste ». L’assassinat du petit Nahel est loin d’être un cas isolé puisqu’auparavant, samedi 24 juin 2023, Rayane Lemmouchi, un jeune dentiste d’origine algérienne âgé de 25 ans fut tué par une dizaine d’individus en Seine-Saint-Denis. Ces actes à connotation raciale répétés en France et visant la communauté algérienne ont motivé la réaction officielle de l’Algérie. Le Président Tebboune qui s’est engagé à protéger la communauté nationale à l’étranger et la diaspora, avait fait le sermon en présence de nos compatriotes résidant à l’étranger que «l’État algérien était attaché à assurer la protection de ses enfants à l’étranger et à les défendre s’ils sont victimes d’injustices dans leurs pays de résidence, et ce dans le cadre du respect de la souveraineté de ces derniers ». « Les représentations diplomatiques du pays avaient été chargées d’assurer la défense de tout Algérien victime de harcèlement ou d’injustice», avait-il tenu à rappeler. Abdelmadjid Tebboune avait tenu à rassurer les membres de la communauté algérienne vivant à l’étranger leur déclarant que « nous ne vous avons pas oubliés. Vous êtes des Algériens, où que vous soyez, éloignés ou pas, vous restez des Algériens et l’Algérie reste votre pays » soulignant que «l’État s’engage à protéger les membres de la Communauté nationale à l’étranger et à appuyer leur contribution au développement du pays».
Azzedine Belferag