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Face aux inquiétudes sur la croissance: Le pétrole au plus bas depuis quatre ans

Les marchés pétroliers traversent une zone de forte turbulence avec un effondrement spectaculaire des cours qui ont atteint aujourd’hui leurs plus bas niveaux depuis la pandémie de Covid-19. Cette dégringolade, qui s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu, reflète les profondes inquiétudes des investisseurs quant aux perspectives de croissance mondiale. À la mi-journée, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juin s’échangeait à 63,81 dollars, en chute de 2,70%, après avoir touché un plancher à 62,51 dollars en matinée, son niveau le plus bas depuis avril 2021. Dans le même temps, le West Texas Intermediate (WTI), référence américaine, perdait 2,84% à 60,23 dollars le baril pour une livraison en mai, touchant également un creux à 58,95 dollars non observé depuis quatre ans. Cette correction brutale des prix s’explique principalement par la résurgence des tensions commerciales internationales, incarnée par l’offensive douanière lancée mercredi dernier par l’administration Trump. Le président américain, resté inflexible ce dimanche, a instauré un droit de douane plancher supplémentaire de 10%, assorti de majorations ciblées, notamment 20% pour l’Union européenne. La Chine, premier importateur mondial de pétrole, se retrouve particulièrement exposée avec désormais 34% de taxes qui s’ajoutent aux surtaxes préexistantes. En représailles, Pékin a annoncé des droits de douane supplémentaires équivalents sur les produits américains dès le 10 avril, faisant craindre une escalade aux conséquences dévastatrices pour l’économie mondiale. Les experts de DNB soulignent que « l’industrie manufacturière et le commerce, secteurs énergivores de la croissance économique, seront les plus durement touchés », entraînant un impact particulièrement négatif sur les carburants industriels tels que « les matières premières pétrochimiques, le gazole et le fioul ». Les analystes anticipent qu’une telle situation pourrait déboucher sur « un ralentissement de la demande mondiale de pétrole de 0,1 million de baril par jour pour chaque baisse de 0,1 point de pourcentage du PIB », dans l’hypothèse d’une guerre commerciale prolongée. À cette conjoncture économique morose s’ajoute une décision inattendue de l’OPEP+, qui a annoncé jeudi une augmentation substantielle de sa production de 411.000 barils par jour dès mai 2025, soit le triple des 135.000 barils initialement prévus dans le cadre du plan de réintroduction progressive sur 18 mois des 2,2 millions de barils quotidiens retenus par huit membres de l’alliance. Si l’organisation justifie cette accélération par des « perspectives positives », Ole R. Hvalbye, analyste chez SEB, estime que cette décision « résulterait probablement d’une frustration au sein du cartel, notamment après des mois de surproduction au Kazakhstan et en Irak », reflétant des tensions internes quant au respect des quotas. Cette conjonction de facteurs baissiers a pris le marché de court, alors même que les tensions géopolitiques au Moyen-Orient et la saison estivale approchant aux États-Unis auraient normalement dû soutenir les cours. Les grands fonds d’investissement révisent désormais à la baisse leurs projections pour le second semestre 2025, certains n’excluant pas un test des 55 dollars pour le Brent si la situation économique continuait de se détériorer. Pour les pays producteurs, cette chute rapide des prix constitue un défi majeur pour l’équilibre de leurs finances publiques, particulièrement pour ceux dont le budget repose sur des hypothèses de prix nettement supérieures. L’Arabie Saoudite, chef de file de l’OPEP, pourrait être contrainte de reconsidérer sa stratégie si cette tendance baissière devait se confirmer dans les semaines à venir. Les analystes restent cependant prudents quant à l’évolution à court terme du marché, soulignant la volatilité exceptionnelle observée ces derniers jours et l’incertitude qui plane sur les décisions politiques à venir, tant du côté américain que chinois, susceptibles d’influencer significativement la trajectoire des prix pétroliers dans les semaines à venir.

Lyna Larbi

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