Le PJD se décompose après les élections générales au Maroc : La rançon de la normalisation
La normalisation avec l’entité sioniste aura coûté cher au parti islamiste, le PJD, que préside Saad Eddine El Othmani. C’est la bérézina. Première formation politique régnant sans partage sur la scène politique marocaine depuis une décennie, le parti de la justice et du développement s’écroule tel un château de cartes. Ce n’est pas tant la frilosité de la mouvance islamiste qui traverse une période de turbulence annonçant le déclin de la nébuleuse islamique que l’excès de zèle du dirigeant islamiste marocain qui, à force de trop louvoyer vers le palais royal en tirant sur la corde dans l’espoir de plaire, a fini par la casser. Première force politique siégeant précédemment au parlement avec 125, le PJD ne récoltera qu’une douzaine de sièges lors des élections législatives de mercredi 8 septembre. C’est l’hécatombe. Les résultats sont inattendues, du moins pas de la sorte. Il est vrai que la pactisation du royaume chérifien avec l’entité sioniste entérinée officiellement par le chef du gouvernement El Othmani, celui –là même qui jurait quelques jours plus tôt de ne jamais tisser d’alliance avec le colonisateur sioniste pour se dédire ensuite, a suscité beaucoup de désapprobation autant au sein de la population que chez les partisans du PJD. Cela a d’ailleurs précipité le départ de l’ancien chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane qui, en marque de rejet, avait claqué la porte du parti dont il était secrétaire général. Chahuté et chassé par les foules lors de la campagne électorale autant pour sa gestion de la crise sociale que par la trahison à la cause palestinienne, El Othmani était loin d’imaginer une telle chute qui risque de mener le parti aux abysses et de l’anéantir. Traversé par une série de conflits, le PJD ne désarmera pas pour autant et continuera à se soumettre à la politique du Makhzen. Cependant, la déplorable situation socioéconomique que vivent les Marocains à l’ombre de la grande menace du Covid-19 sont aussi les autres raisons de l’échec de ce parti islamiste qui n’a pu gérer la crise se contentant de faire des promesses jamais tenues. En dépit aussi du subterfuge politique focalisé sur l’Algérie, le régime marocain ainsi que le gouvernement El Othmani ne réussissent pas à faire détourner les regards des Marocains qui désespèrent de voir une heureuse issue à leurs problèmes tant politiques qu’économiques. Les attaques répétées perpétrées contre l’Algérie ne permettront pas à El Othmani de galvaniser les foules, lasses d’espérer. Minés par le chômage galopant, par les milliers de cas de contamination quotidiennes par le covid-19 et l’absence d’une politique sanitaire adéquate ont fini par excéder les citoyens de plus en plus avides de liberté. La normalisation avec Israël fut la goutte qui fera déborder le vase populaire marocain. Foncièrement hostiles à l’entité sioniste, les Marocains rejettent les plans élaborés par le Makhzen et dénoncent cette alliance qu’ils considèrent contre nature. L’état de santé du roi du Maroc et la question de sa succession par son fils ainé, le jeune Moulay Hassen, âgé à peine de 18 ans fraichement révolus, suscitent beaucoup d’inquiétude autant chez le Marocain lambda que chez les opposants du régime et du palais royal, dont le prince Hicham el Alaoui qui vit en exil et souhaite publiquement la chute de la royauté et le passage du Maroc à un régime républicain et démocratique. Tous ces ingrédients qui, ajoutés au fait que le contexte actuel exige de se passer des islamistes et de leurs jérémiades anti-juives, aura contribué à la défaite des islamistes du PJD dont les positions souvent ambiguës commencent à déranger les nouveaux alliés du Makhzen et leur plan expansionniste. En fait, El Othmani et ses copartisans d’obédience islamistes devront comprendre que désormais, leur temps est révolu et qu’ils risquent même d’être frappés de persona non grata au sein du palais royal.Le divorce est consommé par trois répudiations, selon les préceptes de l’Islam de Mohamed VI qui veut s’imposer en « commandeur des croyants » conseillé par le grand rabbinat de Jérusalem. Mais le départ d’Al Othmani n’arrange en rien les affaires du voisin de l’Ouest. Car la succession, tout comme les clés du gouvernement ont été confiées à Abdelaziz Akhannouch, richissime homme d’affaires, proche du palais royal. Ce n’est en fait que le symbole de cette mafia politico-financière makhzenienneà la tête d’un RNI dépoussiéré pour en faire une machine électorale dans un simulacre de scrutin.
Azzedine Belferag