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Des armes livrées à l’Ukraine commencent à alimenter les réseaux terroristes en Afrique : Le Sahel face à une nouvelle déstabilisation

La situation sécuritaire risque d’aller en s’aggravant au Sahel. La raison tient au fait que la région, réputée déjà pour être un eldorado du terrorisme, commence à devenir un réceptacle pour les armes légères initialement destinées au conflit ukrainien. Le premier responsable à avoir attiré l’attention sur ce phénomène est le président nigérian Muhammadu Buhari.

Lors d’une réunion, la semaine dernière à Abuja, des dirigeants de l’Afrique l’Ouest, Muhammadu Buhari a clairement signifié que les armes provenant de la zone de conflit en Ukraine commençaient à affluer et contribuaient à exacerber la violence et la menace du terrorisme au Sahel.Selon le président Buhari, une partie de ces armes atterrissent dans les pays membres de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT).  « Malheureusement, la situation au Sahel et la guerre qui fait rage en Ukraine sont les principales sources d’armes et de combattants qui renforcent les rangs des terroristes dans la région du lac Tchad », a-t-il averti. Muhammadu Buhari a insisté sur le fait que la propagation des armes légères illégales menace la sécurité régionale, soutenant que « les pays africains doivent intensifier les mesures conjointes de contrôle des frontières et les mesures d’application de la loi pour intercepter ces armes ».Il apparaît donc que le Sahel – qui est encore loin de s’être remis de l’intervention de l’OTAN de 2011 en Libye a entraîné la propagation d’une grande quantité d’armes provenant des stocks libyens dans toute la région – est en quelque sorte la victime collatérale de la guerre en Ukraine. La décision des Occidentaux d’inonder l’Ukraine en armes est aujourd’hui vécue comme un cauchemar en Afrique. Washington et ses alliés affirment qu’aider Kiev à vaincre la Russie est un objectif stratégique pour les nations occidentales. Pour faire taire les critiques, ils soutiennent qu’il existe un système robuste pour suivre leur aide létale en Ukraine. Cependant, ce n’est pas du tout le cas dans la réalité. De nombreux articles de presse indiquent que le système de traçage des armes occidentales livrées à l’Ukraine n’est pas aussi efficace qu’on le prétend et qu’un grand nombre d’armes légères et d’équipements se retrouvent sur le marché noir. 

Le président Muhammadu Buhari a donc toutes les raisons de s’inquiéter, surtout qu’il se révèle que les Occidentaux eux-mêmes ne savent pas vraiment où vont leurs armes. Dans un article sur le sujet, le magazine « Les Crises » indique en effet que « Les États-Unis n’ont aucune idée de l’endroit où atterrira leur aide militaire », admettant qu’elles pourraient « tomber entre des mains dangereuses ». Une fois en Ukraine, « les armes se perdent dans le brouillard de la guerre ». Elles « tombent dans un grand trou noir, et vous n’en avez presque aucune idée après une courte période de temps » a déclaré en juin dernier une source américaine à CNN.

Récemment, la National Crime Agency du Royaume-Uni a averti également que l’Ukraine pourrait devenir à moyen terme une source d’armes pour les gangs et les groupes terroristes. « L’afflux sans précédent d’armes suscite la crainte que certains équipements ne tombent entre les mains d’adversaires occidentaux ou ne réapparaissent dans des conflits lointains – dans les années à venir » déplorent les autorités américaines dans un article du Washington Post, regrettant « la capacité de Washington à garder la trace de ces armes puissantes lorsqu’elles entrent dans l’une des plus grandes plaques tournantes du trafic en Europe. » Semble-t-il, l’une des grandes inquiétudes du Pentagone est liée aux missiles Stinger qui sont capables d’abattre des avions de ligne, s’ils tombent entre les mains de groupes terroristes.

L’Ukraine, rappelle-t-on, est connue pour être une plaque tournante du trafic d’armes depuis la chute de l’Union soviétique. Au tout début des années 90, les militaires soviétiques ont laissé derrière eux, en Ukraine, d’énormes quantités d’armes légères et de petit calibre. Sans aucun contrôle des stocks. Selon le Small Arms Survey, organisme de recherche basé à Genève, cité par le Washington Post, une partie des 7,1 millions d’armes légères stockées par l’armée ukrainienne en 1992 « a été détournée vers des zones de conflit » et s’inquiète du « risque de fuite [des armes actuelles] vers le marché noir local ». Interpol, l’organisation internationale de police criminelle basée à Lyon, s’inquiète également de « la grande disponibilité d’armes du conflit actuel qui entraînera la prolifération d’armes illicites dans la phase post-conflit » selon le directeur général d’Interpol.

Khider Larbi

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