À la UneActualité

Lutte contre le terrorisme en Afrique : Le Sahel se tourne vers l’Algérie

Les pays du Sahel estiment que le CEMOC peut apporter la réponse mondiale la plus large et qu’ils attendent en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme.

La plupart des pays du Sahel perçoivent l’Algérie comme le seul pays dans la région capable de les soustraire durablement des griffes du terrorisme. Ils attendent par conséquent beaucoup des autorités algériennes. Cette attente est confirmée par la réunion tenue le 18 janvier dernier à N’Djamena, la capitale du Tchad, par les ministres des Affaires étrangères du G5 Sahel, cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité qui ne compte plus que 4 membres depuis le retrait du Mali.

Lors de cette rencontre destinée à discuter de la manière de fortifier et de soutenir la force antiterroriste conjointe, des experts en sécurité ont estimé que le G5 Sahel devrait se tourner vers l’Algérie, cela en plus de convaincre le Mali de reprendre sa place. « Même avec le Mali, le G5 Sahel ne peut valablement faire face au terrorisme sans l’Algérie », a cependant prévenu au micro de la radio allemande Deutsche Welle l’analyste nigérien Abdoul Mooumouni Abass. « L’Algérie est un autre poids assez important qui doit être intégré aujourd’hui dans la dynamique de la lutte contre le terrorisme au Sahel », a-t-il estimé.

Le point de vue de Abdoul Mooumouni Abass est partagé par la politologue Kamissa Camara. Ancienne directrice de cabinet de l’ancien président malien Ibrahim Boubacar Keïta qui a fondé le Forum stratégique pour le Sahel, Kamissa Camara vante aussi les avantages d’une potentielle collaboration avec l’Algérie au Sahel. Egalement ancienne ministre malienne des Affaires étrangères, Mme Camara a estimé que le pays (l’Algérie) «offre des informations précieuses et des enseignements tirés de la lutte contre les organisations terroristes». Elle rappellera à ce propos que l’Algérie a réussi à vaincre, seule, les groupes armés terroristes. Pour elle, Alger a indéniablement une expertise à partager.

Mais plutôt que d’inciter l’Algérie à rejoindre le G5 Sahel, elle suggère que les pays du G5 Sahel s’insèrent au sein du Comité d’État-major Opérationnel Conjoint (CEMOC) créé par l’Algérie en 2010. Mme Camara considère que le CEMOC peut « générer le type de réponse mondiale plus large que les États sahéliens attendaient ». « L’avantage unique du CEMOC a toujours été la coopération sécuritaire institutionnalisée entre l’Algérie et le Sahel. Cette coopération intégrée en matière de sécurité doit maintenant devenir une réalité », souligne-t-elle.

L’Algérie a toujours exporté la paix

Dans un article écrit pour le Middle East Institute en décembre 2022, Kamissa Camara soutenait déjà que « le poids diplomatique régional, la puissance militaire et l’expérience de l’Algérie dans la lutte contre le terrorisme pourraient aider les États sahéliens à conjurer un effondrement politique et sécuritaire imminent ». « Avec ses régions frontalières poreuses et peu peuplées, le Sahel gagnerait à impliquer tous ses pays voisins pour lutter efficacement contre l’expansion agressive des groupes terroristes », précisait-elle encore.

L’ancienne MAE du Mali a soutenu qu’une collaboration entre l’Algérie et les pays du Sahel serait mutuellement bénéfique, car la sécurité de l’Algérie est liée à celle du Sahel – politiquement, démographiquement et géographiquement. Elle rappellera que l’Algérie partage des frontières s’étendant sur près de 3 000 kilomètres avec le Mali, la Mauritanie et le Niger. De nombreux spécialistes affirment que l’Algérie a l’avantage de bénéficier d’une bonne réputation dans la région sahélo-saharienne. Cette réputation repose sur le fait qu’Alger à toujours cherché à régler les crises et à exporter la paix. « Dans toute interaction de sécurité avec les pays du Sahel, l’Algérie a un bilan et une réputation de leader régional dans la résolution des conflits. Il a facilité les négociations qui ont conduit à l’Accord de paix d’Alger de 2015 entre le Mali et les groupes rebelles sécessionnistes (…) », mentionne-t-on.

Dans le même ordre d’idées, ces mêmes spécialistes africains rappellent que l’Algérie n’a déjà ménagé aucun effort pour aider les pays du Sahel à renforcer leurs capacités et à faire face à la menace terroriste. Les autorités algériennes ont effectivement mis en place l’Unité de fusion et de liaison (UFL) qui permet à de nombreux pays de la région de partager des informations. L’UFL présente l’avantage de garantir une analyse indépendante du renseignement de sécurité au Sahel. Plus récemment, l’Algérie a exporté ses connaissances en matière de déradicalisation. Cette initiative a été suivie par la création de la Ligue des oulémas, prédicateurs et imams du Sahel (LOPIS). Décrite comme une sorte d’université itinérante, LOPIS soutient la formation des imams et des prédicateurs et cherche à contrer les discours idéologiques ou radicaux.

Khider Larbi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *