Projet de loi relatif à l’exercice syndical : Des amendements pour l’équilibre?
Les députés se penchent actuellement sur le projet de loi relatif à l’exercice syndical qui leur a été soumis par l’Exécutif. Un texte, tout comme celui concernant le droit de grève, qui est rejeté par les organisations syndicales, y compris l’UGTA. Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Youcef Chorfa, a affirmé mardi, lors de sa présentation du texte, que ce projet de loi visait « le renforcement du rôle des organisations syndicales dans la défense des droits et la réalisation de la justice sociale ». La Commission de la santé, des affaires sociales, du travail et de la formation professionnelle de l’APN a, quant à elle, proposé, dans son rapport préliminaire, quelques amendements dont certains en lien avec la représentativité des syndicats.
Les deux projets de loi relatifs, pour le premier, aux modalités d’exercice du droit syndical, et pour le deuxième, à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève, ont fait énormément parler d’eux depuis leurs arrivées au Parlement début janvier dernier. La quasi-totalité des organisations syndicales, y compris l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), se sont exprimées sur la question en les rejetant, notamment en raison de leur « non-implication », dans la préparation des deux textes, mais aussi parce que, selon ces organisations, ils sont en contradictions avec des dispositions de la Constitution et des conventions internationales ratifiées par l’Algérie. En somme, les syndicats estiment que ces deux textes sont « restrictifs », par rapport à l’exercice du droit syndical et de grève. D’ailleurs, une grève nationale a été organisée, dans différents secteurs, le 28 février dernier, par plusieurs syndicats autonomes. Des unions de wilayas de l’UGTA continuent toujours pour leur part à exprimer leur rejet.
Intervenant mardi à l’APN, lors de sa présentation de l’avant-projet de loi relatif à l’exercice du droit syndical (celui concernant à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève n’est pas encore programmé), le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Youcef Chorfa, a estimé que le texte vise « le renforcement du rôle des organisations syndicales dans la défense des droits et la réalisation de la justice sociale ». D’après lui, celui-ci « garantit l’indépendance et la neutralité des syndicats, loin de tous tiraillements politico-partisans, distingue l’exercice syndical de l’exercice politique, réorganise le paysage syndical en accompagnant la création de fortes organisations syndicales, cesse la transhumance syndicale et instaure le principe d’équité entre tous les syndicats sans discrimination aucune ». Le texte, ajoute-t-il, tient compte des « normes internationales relatives à la liberté syndicale et à la préservation du droit syndical ». Le ministre a tenu, par ailleurs, à préciser que « le paysage syndical actuel est composé de 160 organisations syndicales enregistrées, dont 99 organisations de travailleurs (72 dans le secteur de la fonction publique : 34 dans le secteur de l’Education nationale et 20 dans le secteur de la Santé), dont 43 sont inactives ». Il faut rappeler que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, et tout en réaffirmant que « l’exercice du droit syndical est un droit garanti par la Constitution », avait estimé, lors de son entrevue avec des médias diffusée le 24 février dernier, que cette nouvelle loi « permettra aux organisations syndicales de retrouver leur vigueur et leur crédibilité ». Il a néanmoins trouvé « insensé », le fait « d’avoir 34 syndicats dans un même secteur ».
Pour sa part, la Commission de la santé, des affaires sociales, du travail et de la formation professionnelle de l’APN a apporté plusieurs amendements à ce texte. Lors de sa lecture du rapport préliminaire, le président de cette commission, Riad Khellaf, a indiqué que 16 amendements « de fond » ont été apportés à ce projet de loi. Il est question, entre autres, de l’adhésion des membres d’une organisation syndicale (pas les responsables) à un parti politique, qui sera garanti. Celui-ci a indiqué que les dispositions relatives à la relation entre l’exercice syndical et politique ont été précisées, laissant le choix aux organisations syndicales « de définir dans leurs statuts les fonctions de directions ». Certaines dispositions contenues dans le texte soumis par le ministère du travail à l’APN ont été par contre supprimées, a encore signalé Riad Khellaf. Il a cité, à ce titre, parmi le lot des dispositions supprimées, « la poursuite d’un conflit interne qui entrave le bon fonctionnement d’une organisation syndicale », comme motif de de sa dissolution. Les membres de la Commission ont également supprimé la disposition qui exige des élections dans une section d’un syndicat, étant donné que cela est « une ingérence dans les affaires internes d’une organisation syndicale ». Le taux de représentativité, pour la création d’un syndicat, a par ailleurs été baissé par la commission de 30%, comme mentionné dans la mouture initiale, à 25%. Des amendements qui globalement vont dans le sens des revendications des organisations syndicales. Cela va-t-il suffire pour calmer les organisations syndicales ? On en saura un peu plus dans les prochains jours, d’autant que le texte qui pose le plus problème est celui relatif au droit de grève. Les autorités sont décidées à faire passer ces deux textes, alors que les syndicats les rejettent. Tout dépendra donc des amendements qui seront apportés et adoptés.
Elyas Nour