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Le ministère du Commerce prévoit de nouvelles mesures de régulation : L’État veut reprendre le contrôle sur les prix

Le nouveau ministre du Commerce ambitionne de reprendre le contrôle sur le marché et les prix. Pour ce faire, il a présenté une feuille de route pour mettre fin aux perturbations et lacunes enregistrées au cours des trois dernières. Au programme : refonte des circuits de distribution, révision des mécanismes d’approvisionnement du marché et surtout l’imposition d’une structure des prix, la mise en place de prix référentiels pour l’ensemble des produits et l’institution d’un observatoire des prix sur le marché. Et les opérateurs qui ne respectent pas les règles n’ont qu’à bien se tenir, car ils s’exposeraient aux dispositions de la loi relative à la lutte contre la spéculation.

« La libéralisation des prix ne doit pas justifier une envolée injustifiée ». C’est en ces termes que le Directeur général de la régulation et de l’organisation des activités commerciales Samy Kolli a justifié la nouvelle démarche du ministère du Commerce et de la Promotion des exportations. Une démarche qui veut s’appuiera désormais sur une libéralisation régulée des prix avec des structures qui vont reprendre le contrôle sur les leviers du marché et de la formation des prix afin d’éviter les dérives. Invité de la matinale d’Echourouk News TV, le responsable du ministère du Commerce a indiqué que si les prix ont connu une hausse continue depuis la pandémie de covid-19, dans le sillage de l’inflation mondiale alimentée par les goulots d’étranglements logistiques, les problèmes d’offres et la hausse des coûts logistiques, de fret et d’assurance notamment, des lacunes ont été également enregistrées en interne.

Dans ce contexte, Samy Kolli a indiqué que les services du Commerce ont été appelés à prendre leurs responsabilités et à se pencher sur les perturbations qui ont affecté le marché au cours des derniers mois et les lacunes enregistrées lesquels ont fait l’objet d’un bilan présenté samedi au cours de la rencontre d’évaluation qui a réuni le ministre du Commerce avec les cadres du secteur. L’occasion pour le nouveau ministre de présenter une feuille de route qui prévoit diverses mesures pour reprendre le contrôle sur le marché et sur les prix. C’est dans ce contexte que le Directeur de la régulation et de l’organisation des activités commerciales évoque la mise en place de nouvelles obligations pour les opérateurs afin de prévenir une hausse injustifiée des prix des produits non subventionnés. Il indique ainsi que des dispositions ont été intégrées à la nouvelle loi sur la concurrence, et qui est actuellement en voie de finalisation au niveau du Secrétariat général du Gouvernement. Il s’agit en premier lieu de l’obligation qui sera désormais instaurée à tous les opérateurs économiques pour déposer leur structure des prix au niveau des services du commerce. « Les opérateurs sont libres de fixer leurs prix, mais ils seront désormais obligés de communiquer leur structure des prix au ministère du Commerce », indique Samy Kolli qui précise que l’objectif de cette mesure est de débusquer les hausses injustifiées des prix et donc de les prévenir. Il est utile de noter dans ce contexte que la structure des prix permet de définir les éléments de coûts et les marges bénéficiaires à différentes étapes de commercialisation d’un produit, à la « sortie d’usine » où à l’import, sur le marché de gros et sur les circuits de détail.

Répercuter obligatoirement la décrue des cours mondiaux

Le responsable du ministère du Commerce a également indiqué qu’il s’agit de la mise en place d’un prix référentiel des produits en s’appuyant sur les coûts de revient et les prix des intrants et des produits de base sur le marché international, d’autant plus que les services des Douanes algériennes dispose d’un mécanisme pour suivre l’évolution des cours sur les marchés mondiaux. Dans ce contexte, Samy Kolli indiquera que le nouveau texte imposera une nouvelle obligation aux opérateurs, celles de répercuter les baisses des cours mondiaux des intrants et produits de base sur les prix finaux des produits commercialisés sur le marché national. Une disposition qui permettra, explique-t-il, de remédier à une pratique négative de « certains opérateurs qui s’empressent de répercuter la hausse des cours des intrants sur les prix de produits finis, mais omettent de faire l’inverse ». Des dispositions qui s’accompagneront de la mise en place d’un Observatoire des prix sur le marché national, afin de suivre et contrôler les prix. Des dispositions qui seront également accompagnées par une action concrète en ce qui concerne la gestion et la structuration du marché.

Le même responsable a ainsi rappelé le processus lancé par le ministre du Commerce, Tayeb Zitouni, pour une refonte des circuits de distribution. Il expliquera dans ce contexte que les perturbations qui ont été enregistrées dans le marché des produits alimentaires de base, notamment l’huile de table et la semoule, ont permis de prendre conscience du fait que la problématique ne se situe pas au niveau de la disponibilité de l’offre, mais plutôt dans les circuits de distribution déstructurés et mal-maîtrisés. Un processus « qui a bien avancé », assure l’intervenant. Une démarche qui s’appuie aussi sur la définition précise des capacités, de production, de stockage et de distribution de la production, ainsi que leur géolocalisation.

Loi sur la spéculation

Rappelant que les nouvelles dispositions relatives à la régulation des importations soumettent les importateurs à des obligations relatives à leurs programmes d’importation et la gestion des prix pour maitriser les approvisionnements sur le marché international, le Directeur de la régulation et de l’organisation des activités commerciales indique qu’en ce qui concerne l’offre nationale, une enquête a été lancée dimanche dans l’objectif de mettre en place une cartographie de la production nationale. Il a ainsi précisé que les enquêteurs du ministère du Commerce auront 45 jours pour mener des investigations sur le terrain pour identifier les producteurs, leurs produits, leurs capacités de production réelles et théoriques quotidienne, mensuelle et annuelle, ainsi que la géolocalisation de leurs unités de production. Il s’agit, poursuit-il, de définir avec précision le volume de l’offre locale, mais aussi la qualité du produit proposé avec pour finalité de parvenir à terme à atteindre un rapport qualité-prix qui réponde aux besoins des Algériens. Pour Samy Kolli, ces nouvelles règles devront mettre fin aux dérives constatés sur le marché et qui ont alimenté une hausse effrénée des prix. Et d’ajouter que si la définition de la spéculation a été jusque-là perçue sous l’angle du stockage illicite et de la provocation de pénuries et de pressions sur le marché, « la spéculation doit être surtout comprise comme étant toute pratique tendant à augmenter de manière injustifiée des prix et qui tombe donc sous le coup de la loi sur la spéculation ». Un message que le responsable du ministère du Commerce assume pleinement et qui sonne comme un avertissement en direction des opérateurs qui ne respectent pas les règles et qui cherchent des nichent de rente via des prix excessifs.

Samira Ghrib

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