Algérie-Afrique du Sud : Jeter les bases d’une alliance stratégique
La déclaration commune algéro-sud-africaine du 8 décembre en cours, fruit de la visite d’État du président Cyril Ramaphosa et de la 7e session de la Haute Commission bilatérale de coopération, dessine les contours d’une alliance stratégique profonde entre deux nations unies par un héritage historique de résistance et de lutte pour la liberté.
Dès l’ouverture du document, les deux pays soulignent « les liens historiques profonds entre eux, enracinés dans leur lutte commune pour la liberté et la justice », et mettent en exergue « l’importance stratégique du partenariat entre l’Algérie et l’Afrique du Sud ». Cette alliance se nourrit d’un discours historique prononcé par le président Ramaphosa devant le Parlement algérien, où il a mis l’accent sur « l’héritage historique commun, la solidarité inébranlable et la coopération stratégique », tout en définissant « une vision commune pour faire avancer la transformation socioéconomique en Afrique ».
Les dimensions de cette coopération sont multiples et ambitieuses. Le président de la République Abdelmadjid Tebboune et son homologue sud-africain ont identifié des domaines clés de collaboration, notamment « l’économie et le commerce, l’énergie et les mines, l’agriculture, l’industrie mécanique, l’enseignement et la technologie, la défense et la sécurité, les technologies spatiales, les infrastructures, les communications et les technologies numériques, la santé, l’éducation, les échanges entre les peuples, ainsi que la coopération dans les domaines des affaires sociales, de la culture et du patrimoine ».
Sur le plan économique, les deux pays ont insisté sur « la coopération économique en tant que pilier fondamental des relations bilatérales ». Ils ont salué la création d’un conseil d’affaires conjoint et encouragé leurs secteurs privés à tirer profit de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Cette approche s’inscrit dans une vision plus large : « traduire les relations privilégiées en partenariat économique solide et durable ».
Soutien à la Palestine et au Sahara occidental
La dimension internationale de leur collaboration est tout aussi significative. Les deux présidents ont exprimé « leur profonde inquiétude face aux foyers de conflit et d’instabilité en Afrique et au Moyen-Orient », déplorant « les lourdes pertes en vies humaines, les dégâts matériels considérables, le déplacement des civils et les crises humanitaires complexes ».
Sur la question palestinienne, ils ont réaffirmé « leur soutien inconditionnel au droit légitime du peuple palestinien à l’établissement de son Etat indépendant et souverain sur les frontières de 1967 avec El-Qods pour capitale ». Ils ont appelé à « mettre fin immédiatement à l’impunité et à l’injustice », insistant sur « l’impérative mise en œuvre des décisions de la Cour internationale de justice ». Concernant le Sahara occidental, les deux présidents ont affirmé leur « engagement indéfectible en faveur de la lutte légitime du peuple sahraoui pour l’autodétermination », soulignant la nécessité de reprendre les négociations directes entre le Front Polisario et le Maroc, sous l’égide des Nations Unies. Sur la scène multilatérale, ils ont plaidé pour « une réforme globale de l’ONU, notamment du Conseil de sécurité », afin d’assurer « une représentation équitable de l’Afrique et d’autres régions moins représentées ». Cette position s’inscrit dans leur engagement commun « en faveur du règlement pacifique des conflits par le dialogue, la médiation, les négociations, le respect de la souveraineté des Etats et le renforcement de l’architecture de paix et de sécurité en Afrique ». La déclaration a également mis en lumière le rôle central de l’Algérie comme membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies pour la période 2024-2025, soulignant son importance « pour défendre les causes africaines, dont le renforcement de la paix, de la sécurité et de la justice dans le continent ». Concrètement, cette vision s’est traduite par la signature de mémorandums d’entente dans des domaines stratégiques : « coopération juridique et judiciaire, coopération économique, entrepreneuriat et innovation, sciences et techniques spatiales, et recherche agronomique ». Les deux pays ont également préparé sept mémorandums supplémentaires couvrant des secteurs comme le tourisme, les affaires sociales, les archives, les ressources en eau, les finances, la poste et les télécommunications.
Notons enfin que le président Ramaphosa a adressé une invitation au président de la République pour effectuer une visite d’Etat en Afrique du Sud et co-présider les travaux de la 8e session de la Haute-Commission bilatérale de coopération, prévue en 2025 à Pretoria. Cette déclaration commune symbolise plus qu’un simple accord diplomatique : elle représente une vision partagée d’un avenir africain plus uni, plus prospère et plus souverain, fondée sur des principes de solidarité, de coopération et de justice internationale.
Hocine Fadheli