Le cessez-le-feu est entré en vigueur à Ghaza: L’espoir est permis malgré les défis
L’entrée en vigueur du cessez-le-feu tant attendu à Ghaza hier a été marquée par un contraste saisissant entre l’espoir d’une population meurtrie et la violence persistante des forces d’occupation israéliennes, illustrant les défis considérables qui attendent l’enclave palestinienne sur le chemin de la reconstruction. Initialement prévu pour 8h30 heure locale (6h30 GMT), l’accord n’est finalement entré en vigueur qu’à 9h15 GMT, après plus de deux heures et demie de retard imposé par les autorités d’occupation qui ont conditionné son application à la réception préalable de la liste des prisonniers de guerre à libérer.
Cette transition vers le cessez-le-feu a été tragiquement entachée par une dernière démonstration de force meurtrière de l’armée sioniste. Dans les heures précédant l’entrée en vigueur de la trêve, au moins neuf Palestiniens sont tombés en martyrs et de nombreux autres ont été blessés dans différentes zones de Ghaza. Cinq d’entre eux ont péri dans une frappe de drone dans le quartier d’Al-Shujaiya, à l’est de la ville de Ghaza, tandis que quatre autres sont tombés en martyrs lors d’un bombardement d’artillerie à Beit Lahia, au nord de l’enclave. Ces dernières victimes s’ajoutent au bilan déjà catastrophique de cette agression génocidaire qui, selon les autorités palestiniennes de la santé, a fait 46.913 martyrs et 110.750 blessés depuis le 7 octobre 2023. La violence a persisté jusqu’aux derniers instants avant le cessez-le-feu, avec des bombardements d’artillerie signalés dans les gouvernorats de Khan Younes et de Rafah, ainsi que des tirs de blindés contre des civils tentant de regagner leurs domiciles. Plus tragique encore, dix Palestiniens ont dû être admis à l’hôpital Al-Ahly Al-Arabi en raison de blessures causées par des munitions non explosées laissées par les forces d’occupation à l’est du camp de Jabalia, soulignant les dangers persistants qui menacent la population même après l’arrêt officiel des hostilités.
Malgré ce contexte dramatique, les premières lueurs d’espoir sont apparues rapidement après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Jonathan Whittall, responsable par intérim de l’OCHA pour les territoires palestiniens occupés, a annoncé que « les premiers camions de ravitaillement ont commencé à entrer à peine 15 minutes » après le début de la trêve. Cette rapidité d’intervention témoigne de l’ampleur des préparatifs effectués par les organisations humanitaires, qui n’attendaient que ce moment pour déployer leur aide. L’UNRWA, par la voix de son Commissaire général Philippe Lazzarini, a confirmé disposer de 4.000 camions d’aide humanitaire prêts à entrer dans la bande de Ghaza, dont la moitié transportant de la nourriture et de la farine. Cette mobilisation massive s’accompagne d’un engagement de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui prévoit de déployer plusieurs hôpitaux de campagne dans les deux prochains mois pour soutenir un secteur de santé dévasté par les bombardements.
Échange de prisonniers
Le processus de paix s’est également concrétisé par le début des échanges de prisonniers, avec la remise de trois détenues sionistes au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) par les brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du Hamas et ce, à la veille de l’investiture du président américain Donald Trump. Cette opération, qui s’est déroulée à la place Al-Saraya au centre de la ville de Ghaza, marque le début de la première phase de l’accord, le Hamas attendant en retour une liste de 90 noms de prisonnières palestiniennes devant être libérées. Dans les rues de Ghaza, la population a accueilli le cessez-le-feu avec un mélange de soulagement et d’appréhension. Des milliers de Palestiniens sont descendus dans les rues, certains pour célébrer cette pause dans les combats, d’autres pour se recueillir sur les tombes de leurs proches martyrs. Les témoignages recueillis révèlent l’ampleur du traumatisme vécu par la population. « J’ai l’impression d’avoir enfin trouvé de l’eau à boire après m’être perdue dans le désert pendant 15 mois. Je me sens à nouveau vivante », a confié Aya, une femme déplacée de la ville de Ghaza, réfugiée à Deir Al-Balah. Cependant, comme le souligne Ahmed Abu Ayham, 40 ans, également déplacé, la « scène de destruction » dans sa ville natale reste « épouvantable ». Les défis humanitaires demeurent colossaux. Les autorités palestiniennes de la santé rapportent qu’un nombre indéterminé de victimes se trouve encore sous les décombres et sur les routes, les forces d’occupation empêchant les ambulances et les équipes de la Défense civile de leur porter secours. Cette situation dramatique souligne l’urgence de la mise en place d’un corridor humanitaire efficace et sécurisé. L’UNRWA, malgré l’interdiction de ses activités imposée par l’entité sioniste devant entrer en vigueur le 30 janvier 2025, reste déterminée à poursuivre ses opérations à Ghaza et en Cisjordanie occupée. Comme l’a souligné Lazzarini, « l’UNRWA est la seule agence capable de fournir des services essentiels de santé et d’éducation à Ghaza », rappelant ainsi le rôle crucial de l’organisation dans la survie de la population palestinienne.
Ce cessez-le-feu, bien qu’offrant un répit vital à la population Ghazaouie après 471 jours d’agression ininterrompue, ne représente qu’une première étape sur le long chemin de la reconstruction et du rétablissement d’une vie normale dans l’enclave. Les violations des dernières heures par les forces d’occupation, le nombre considérable de victimes encore prisonnières des décombres, et l’ampleur des destructions témoignent des immenses défis qui attendent la population palestinienne, même dans cette phase de trêve. La communauté internationale devra rester vigilante pour garantir le respect de cet accord et assurer l’acheminement efficace de l’aide humanitaire vers une population qui a payé un prix exorbitant.
Lyes Saïdi